London Eurovision Party 2023 : compte-rendu des prestations

La saison des pré-parties s’est achevée en beauté cette année. C’est à Londres que 22 artistes se sont rendus pour défendre leurs titres en live. J’ai écouté leurs performances, et je vous en donne mon avis. À noter que je ne me concentrerai que sur la prestation vocale dans mon jugement. Alors ? Qui a surpris ? Qui a déçu ? Qui a confirmé son statut ? Réponse maintenant !

*Crédits vidéo : Wiwibloggs

Finlande

Käärijä – Cha cha cha

Rien de nouveau sous le soleil, Käärijä fait du Käärijä. Toujours autant d’énergie communicative et de charisme. L’artiste s’amuse sur scène et porte son titre avec conviction. Il est tellement dans son morceau, qu’on lui pardonnera volontiers ses petites fautes de justesse sur la partie plus pop. D’habitude je suis intransigeante là-dessus, mais ici, je dirai que cela participe au côté chaotique (et quasi punk) de Cha Cha Cha.

Appréciation : Feu vert pour la Finlande.

Évolution : Aucune, mais n’en avait pas besoin.

Espagne

Blanca Paloma – EAEA

Une fois encore, Blanca Paloma est magistrale. Du début à la fin, le public est suspendu à ses lèvres. Puissante et hypnotique, l’artiste nous offre une prestation habitée, digne des plus grands noms du flamenco. Vocalement c’est impeccable. Rien ne semble pouvoir arrêter l’Espagne cette année, un beau résultat se profile à l’horizon.

Appréciation : Feu vert pour l’Espagne. On notera seulement qu’il semble y avoir eu un léger oubli de paroles au premier couplet. Était-ce volontaire ou non ? En tout cas Blanca Paloma s’est bien rattrapée, et l’on n’y voit presque que du feu.

Évolution : aucune, mais n’en avait pas besoin.

Serbie

Luke Blake – Samo Mi Se Spava

Radicale ! C’est l’évolution de Luke Black entre ses performances au PZE et cette performance londonienne. L’artiste me paraît mille fois plus à l’aise sur scène, mille fois plus connecté avec son morceau. Et cela se ressent aussi dans la cohésion avec le public : les spectateurs frappaient volontiers leurs mains au rythme du refrain. Vocalement, il a bien plus de prestance et de présence. Son charisme et son aura magnétique (déjà bien évidents sur la chanson en elle-même) crèvent l’écran désormais, et c’est exactement ce qu’il faut pour une proposition si audacieuse. La Serbie ne devrait pas faire de la figuration en demi 1. (Et c’est un détail, mais j’éprouve une joie secrète au fait que Luke Black ait conservé dans son live le petit rire diabolique de sa prestation en finale du PZE).

Appréciation : Feu vert pour la Serbie.

Évolution : Par rapport au PZE, une évolution remarquable qui se ressent tout de suite. Un interprète bien plus assuré et en cohésion avec son morceau.

Autriche

Teya et Salena – Who The Hell Is Edgar ?

Les retours avaient été très bons pour l’Autriche lors des précédentes pré-parties, et la bonne impression se confirme. Le duo est excellent. Vocalement elles tiennent la route avec de jolies harmonies. Leur complicité se ressent, et le public achète complètement leur prestation. Une excellente surprise pour une chanson qui aurait pu courir à la catastrophe, mais qui devrait s’en sortir avec les honneurs.

Appréciation : Feu vert pour l’Autriche.

Évolution : Teya et Salena confirment les bons retours qui ont pu être faits de leurs précédentes prestations. Une qualification est quasiment assurée en demi 2.

Suède

Loreen – Tattoo

Loreen fait du Loreen. Une belle voix (quoiqu’un peu cassée ce soir-là, ce qui lui donnait un petit côté Cornelia Jakobs pas déplaisant du tout), de la puissance à vous en donner les frissons… Quoi qu’on en dise (et moi la première), Loreen n’est pas favorite pour rien, il faut l’admettre. Seul petit reproche : l’articulation ! Heureusement que je connais les paroles, sans quoi je n’y aurais rien compris ! Loreen donnait un peu l’impression de manger ses mots. Parfois aussi elle semblait s’éloigner du micro, sa voix se faisait moins entendre. Mais ce ne sont que broutilles et chipotages. Rien qui puisse entacher le parcours de Loreen, en tout cas.

Appréciation : Feu vert pour la Suède.

Évolution : Aucune, mais n’en avait pas besoin.

Royaume-Uni

Mae Muller – I Wrote A Song

Visiblement plus confiante à domicile, Mae a donné à Londres sa meilleure performance en pré-parties. Sa voix n’est peut-être pas la plus juste ou la plus assurée, mais elle semble l’assumer et être surtout là pour s’amuser et profiter de l’expérience eurovisionesque. Les choeurs pré-enregistrés se faisaient encore beaucoup entendre, ce qui est dommage car sincèrement, Mae me paraissait bien plus juste qu’à d’autres pré-parties, et j’aurais aimé entendre un peu plus sa voix sur les refrains.

Appréciation : Feu orange tirant sur le vert pour le Royaume-Uni.

Évolution : Une amélioration vocale semble à souligner. Mais les choeurs pré-enregistrés sont encore trop présents, alors que Mae pourrait chanter seule.

Croatie

Let 3 – Mama ŠČ

Un peu comme pour Käärijä, Let 3 fait partie de ces candidats dont on pardonne largement les faiblesses vocales, car elles font partie de la performance, au fond, et participe à son côté délirant et assumé. Il m’a semblé que le chanteur était constamment sur le point d’éclater de rire durant les couplets, c’était divertissant je dois dire. Le groupe reste dans son style en tout cas, il ne me semble pas avoir noté d’évolution particulière. Leur prestation va dénoter en mai, c’est une évidence.

Appréciation : Feu vert pour la Croatie.

Évolution : Aucune, mais n’en avait pas besoin.

Portugal

Mimicat – Ai Coraçao

À peine la chanson commencée, le public était déjà en folie et frappait dans ses mains au rythme de la musique. Signe d’un morceau qui fédère la foule. Fidèle à elle-même, Mimicat assure un excellent live, jonglant entre fun et puissance vocale. Un véritable sans faute qui devrait emporter également le public en mai.

Appréciation : Feu vert pour le Portugal.

Évolution : Aucune, mais n’en avait pas besoin.

Tchéquie

VESNA – My Sister’s Crown

Alors, VESNA ? Naufrage évité ou bateau en perdition? À Londres, la prestation a été bonne. Pas parfaite, mais bonne. Manque de souffle et harmonies parfois brouillonnes sont les principaux défauts vocaux que j’ai pu trouver à cette prestation. L’ensemble sonne parfois un peu chaotique et confus. Mais c’est loin d’être une catastrophe. On sent qu’il y a eu du travail et du progrès au fil des pré-parties. La qualification n’est cependant toujours pas assurée pour le groupe.

Appréciation : Feu orange

Évolution : Une bonne progression vocale, mais encore quelques faiblesses et un ensemble parfois trop brouillon.

Norvège

Alessandra – Queen of Kings

Une bonne prestation de la part d’Alessandra. Une petite introduction a été rajoutée avant qu’elle ne se mette à chanter, et c’est fort joli. J’espère qu’elle sera conservée pour Liverpool. Alessandra, quant à elle, porte son morceau avec beaucoup de punch. On ressent sa joie d’être là. Cependant, elle manque parfois de souffle et de justesse, et a tendance à crier au lieu de chanter, ce qui n’est pas toujours très agréable à écouter. Cela dit la Norvège n’a pas grand-chose à craindre, la première demi-finale devrait ressembler, sauf catastrophe, à une promenade de santé.

Appréciation : Feu vert tirant sur le orange pour la Norvège.

Évolution : Une bonne énergie, mais une voix loin d’être parfaite. Mais rien qui n’empêche Alessandra de bien figurer en mai.

Slovénie

Joker Out – Carpe Diem

Et le prix de la consistance est attribué à… Joker Out! Et haut la main ! Le groupe a participé à toutes les pré-parties cette saison, et pas une fois ils n’ont failli. Londres n’a pas fait exception à leur beau parcours. Charisme, énergie, fun, assurance vocale, adhésion du public… Tout y était. Un sans-faute de bout en bout. Dites-moi, les Joker Out ne pourraient-ils pas devenir de sérieux dark horses pour la victoire ?

Appréciation : Feu vert vif pour la Slovénie.

Évolution : Aucune, mais n’en avait clairement pas besoin.

Roumanie

Theodor Andrei – D.G.T. (Off And On)

Je déteste tirer sur les ambulances. Mais le pauvre Theodor ne m’a pas convaincue. Du tout. Déjà que sa chanson n’est pas très populaire, il fallait que sa performance live soit fort désagréable à écouter ! Il semblait plus hurler que chanter, et son articulation n’était pas optimale. Par instants, il donnait l’impression de chanter trop proche du micro. Et ses maniérismes vocaux se transforment une fois sur deux en fausses notes ! Pauvre Theodor, c’est tout sauf gagné pour lui.

Appréciation : Feu rouge pour la Roumanie.

Évolution : Avec ce live, la Roumanie part sur des bases bien bancales. La qualification s’éloigne plus encore qu’avant.

Lituanie

Monika Linkitė – Stay

Prestation sans nuages pour Monika Linkitė. Il n’y a vraiment rien à redire. Les high notes sont là, la justesse est là… Sans peur et sans reproche, Monika défend Stay de si belle manière, que la chanson en devient même moins oubliable grâce à son interprétation. Une qualification est envisageable.

Appréciation : Feu vert pour la Lituanie.

Évolution : Aucune, mais n’en avait pas besoin.

Australie

Voyager – Promise

Encore une des bonnes surprises de la saison des pré.parties (enfin, surprise pour tout le monde, sauf pour les fans convaincus de Promise, qui savaient à quoi s’attendre. Je m’inclus dedans). Voyager ont su dissiper le scepticisme de la première écoute, en donnant des prestations live impeccables et millimétrées. Londres n’y a pas fait exception. Le groupe commence sa prestation en plaisantant avec le public. « Hey, achetez notre merchandising au stand, parce que ça coûte cher de revenir en Australie, et on aimerait bien revoir nos familles un de ces quatre ». Et d’enchaîner avec un live plein de vivacité. La voix du chanteur est impressionnante. On croirait entendre la version studio, et pourtant je peux jurer qu’il ne s’agit pas de playback. Le tout va rendre merveilleusement bien sur la scène de Liverpool, et la seconde demi-finale se conclura en beauté.

Appréciation : Feu vert pour l’Australie.

Évolution : Aucune, mais n’en avait pas besoin.

Moldavie

Pasha Parfeny – Soarele şi Luna

Une bonne prestation de Pasha, comme attendu. La justesse n’est peut-être pas toujours au rendez-vous sur les refrains, mais l’énergie est là et c’est tout ce qu’il faut à ce morceau pour briller. Le charisme de Pasha, la flûte et les choristes : voilà la recette magique qui devrait permettre à la Moldavie de ne pas manquer la finale.

Appréciation : Feu vert pour la Moldavie.

Évolution : Aucune, mais n’en avait pas vraiment besoin.

Danemark

Reiley – Breaking My Heart

Le danger de chanter en voix de tête pendant presque toute une chanson, c’est que la moindre fausseté s’entend plus distinctement. Et pas de chance, Reiley n’échappe pas à ce désavantage. Même avec les choeurs pré-enregistrés (sur lesquels il a une fâcheuse tendance à s’appuyer), on peut encore entendre des notes assez disgracieuses et des faiblesses vocales. De plus, Reiley me semble assez froid, sans grande connexion avec le public. Sa prestation est en somme assez fade.

Appréciation : Feu rouge pour le Danemark.

Évolution : Les faiblesses vocales continuent de pourchasser Reiley, et le vocoder n’y changera rien. Pas assez d’énergie, on dirait que Reiley est juste là pour chanter et pas pour communiquer avec le public. Le Danemark est en mauvaise posture cette année.

Malte

The Busker – Dance (Our Own Party)

Il y a des chansons où, quand ça veut pas, ça veut pas ! The Buskers assurent en live, le morceau est toujours bon… Mais le public n’a pas l’air de trop suivre, et au final la prestation du groupe fait partie des moins mémorables de la soirée ! Et c’est bien dommage.

Appréciation : Feu orange pour Malte.

Évolution : Aucune en terme de prestation. En revanche, en terme de mémorabilité, le titre pêche par un manque d’adhésion du public.

Azerbaïdjan

TuralTuranx – Tell Me More

Boarf. Voilà comment décrire en une onomatopée la prestation des jumeaux azéris. Le morceau est déjà suffisamment peu compétitif, mais les harmonies parfois hésitantes et le manque de justesse n’arrangent rien ! La prestation est globalement molle et brouillonne, pas très mémorable malgré la bonne volonté de Tural et Turan.

Appréciation : Feu orange pour l’Azerbaïdjan.

Évolution : Un live qui ne sert pas vraiment la version studio, et n’aide pas le morceau à décoller. Une prestation qui ne provoque rien. Une finale sans Azerbaïdjan est à envisager cette année.

Islande

Diljá – Power

Rien à redire du côté de la Terre de Glace. Diljá a tout donné. Cependant, elle est meilleure sur les refrains que sur les couplets. Sa puissance vocale se ressent davantage, là où les couplets sont un peu fragiles. Le seul regret reste l’abondance de choeurs pré-enregistrés sur le refrain, chose d’autant plus regrettable que Diljá n’en a pas besoin. Mais aucune alarme : ce ne sont que des détails.

Appréciation : Feu vert pour l’Islande.

Évolution : Aucune, mais n’en avait pas besoin.

Irlande

Wild Youth – We Are One

Une performance convenable, mais pas la meilleure de la soirée. Le chanteur m’a donné l’impression de forcer sur sa voix, surtout dans les refrains. Le tout sonnait un peu fébrile, malgré l’efficacité d’un refrain qui fédère.

Appréciation : Feu orange pour l’Irlande.

Évolution : il y a encore des progrès à faire. Le manque d’harmonies et de justesse pourrait coûter cher à l’Irlande. À moins que le refrain ne soit assez puissant pour changer le cours des choses.

Estonie

Alika – Bridges

Les prestations d’Alika se suivent et se ressemblent. Leur point commun ? L’excellence. Impeccable de bout en bout, l’artiste déroule son petit numéro avec toujours autant de brio. Sa prestation londonienne avait des airs d’Adele. Bref : Alika maîtrise son sujet, et ne craint pas les ratures sur sa copie. 20 sur 20 Mademoiselle !

Appréciation : Feu vert pour l’Estonie.

Évolution : Aucune, mais n’en avait vraiment pas besoin.

Saint-Marin

Piqued Jacks – Like An Animal

S’il y a bien une chose que l’on ne peut pas reprocher à Piqued Jacks, c’est de croire en leur titre et de s’éclater sur scène. En dépit d’un public qui n’accroche décidément pas, la performance est fidèle à ce à quoi Piqued Jacks nous a habitué au cours de cette saison des pré-parties. Cela dit vocalement, c’est toujours un peu crispant à l’oreille. Et le « She knows the way » ne passe décidément toujours pas !

Appréciation : Feu orange pour Saint-Marin.

Évolution : Vocalement, c’est toujours aussi criard, ce qui n’avantage pas une chanson déjà peu populaire, en dépit des bonnes qualités d’un groupe sympathique.

Conclusion

À part quelques alertes rouges (Theodor Andrei, Reiley et TuralTuranx entre autres), les artistes se sont surpassés à Londres, et certains ont même donné leurs meilleurs performances jusque-là (en particulier Voyager et l’impressionnant Luke Black). Les favoris ont confirmé leurs statut, Joker Out gagne l’award de la consistance musicale, et tout ce beau petit monde nous promet, en somme, un Eurovision 2023 de haut vol… que vous suivrez sur l’EAQ, bien entendu !

Crédits photographiques : London Eurovision Party