À l’occasion de notre venue à Quimper, les médias (dont l’EAQ) ont rencontré Alexandra Redde-Amiel, cheffe de la délégation française, pour évoquer la préparation de l’Eurovision junior 2024 à l’approche du départ pour Madrid.
La directrice des divertissements et des jeux de France Télévisions est tout d’abord revenue sur la sélection de Titouan, choisi en interne parmi une vingtaine de candidats lors d’un casting qui a mêlé démarchage sauvage (avec l’aide d’Alexandra Bouchou, directrice musicale de France Télévisions) et candidatures spontanées. La cheffe de délégation a été frappée par la maturité et l’environnement musical du représentant français, aux références atypiques pour un adolescent de son âge. “Titouan fait partie de ces artistes habités dont on a besoin et qui assument pleinement leur univers musical. Lors du casting, il s’est mis au piano et il nous a chanté des titres d’artistes complètement différents.” À ses yeux, le représentant français séduit d’emblée de par son charisme, un trait qu’il partage avec ses prédécesseurs français à l’Eurovision Junior, qui ont tous comme point commun “cette lumière permanente qu’ils ont dans les yeux. Quand on regarde Titouan, il se passe quelque chose. »
“On essaie avant tout d’assumer un concours junior.”
Comme ci, comme ça a été choisi par Titouan parmi trois titres qui lui ont été proposés. Un coup de cœur pour le représentant français, dont la rencontre avec Malo’ fut déterminante et la connexion avec lui immédiate. Avec Marie Bastide, co-autrice du titre, l’ancien candidat de Destination Eurovision 2018 a procédé à de nombreuses adaptations et participé à de longues sessions en studio, afin que la chanson colle au mieux à son interprète âgé de quatorze ans (une première pour la France au Junior). En résulte un titre plus adulte que les précédentes contributions, quoique fidèle à la pop colorée dont la France s’est faite la spécialiste à l’Eurovision Junior. La cheffe de délégation préfère toutefois parler d’“énergie” lorsqu’on l’invite à qualifier la ligne directrice du pays : “On essaie avant tout d’assumer un concours junior et de proposer des chansons en phase avec l’âge des enfants. Les enfants sont porteurs de messages, et offrir des chansons pop joyeuses, c’est non seulement un moyen de partager notre culture, mais aussi d’apporter l’énergie dont le monde a besoin.” Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si Comme ci, comme ça défend un message sur l’acceptation de soi et de l’autre, à l’heure où les enfants ont une parfaite conscience de leur monde. Un thème générationnel qui dépasse les frontières et que l’on retrouve dans de nombreuses chansons feel good de l’édition, portées par des artistes désireux de faire bouger les lignes. Au-delà, Alexandra Redde-Amiel rappelle également l’importance de “raconter le candidat”, le style de la chanson étant choisi en fonction de la signature et de la personnalité du candidat, d’où la présence d’instruments dans la composition de Comme ci, comme ça – référence au Titouan musicien (il joue de la guitare, de la basse et du piano N.D.L.R.).
“Trois victoires d’affilée, cela paraît fou parce que c’est impossible.”
Trois fois vainqueure de l’Eurovision Junior en quatre ans, un cycle inégalé, la France rêve-t-elle à écrire encore plus l’histoire du concours ? “Trois victoires d’affilée, cela paraît fou parce que c’est impossible. Mais la vie ne vaut d’être vécue que si elle est folle. Je suis la plus positive au monde et c’est en créant cette énergie qu’on arrive à faire les plus belles choses. Donc oui, je crois complètement à la victoire de Titouan, et c’est dans cet objectif que je travaille avec les artistes et mes équipes.” De quoi faire des jaloux parmi les autres pays participants ? Ces derniers sont visiblement curieux de la recette française, qui repose sur la recherche de l’authenticité et de l’accroche immédiate exigée par la durée de la prestation (le “Catch 12 points”). “Chez un enfant, je vais rechercher l’aura, le charisme et la connexion. Cela, je ne peux pas l’expliquer. La chanson que l’on choisit sera ensuite habitée par l’artiste et le talent fera le reste.” Elle rappelle également l’importance de la scénographie, faite de peu de mouvements de caméras et essentiellement concentrée sur l’enfant, pour mieux capter ce que recherchent les téléspectateurs selon elle : l’âme. “Dans la réalisation de la prestation, je filme l’émotion plus que la scénographie. C’est elle qui doit être au service de l’émotion et du regard, et non l’inverse.” ajoute Alexandra Redde-Amiel.
Si cette quête assumée de la victoire leur offre une stimulation, cela n’empêche pas la cheffe de délégation de préparer ceux qu’elle appelle “[ses] petits” à des résultats moindres qu’espérés. Elle confie ainsi jouer parfois un rôle de maman auprès d’eux, les accompagnant à la fois dans la douceur et dans l’intensité pour qu’ils puissent se chercher et se trouver en tant qu’artistes grâce à l’Eurovision Junior. Une différence de taille dans l’accompagnement des participants juniors (souvent sans managers et forcément moins avancés dans leur carrière musicale que des artistes adultes), pour une évolution future qui impressionne Alexandra Redde-Amiel. “Lorsque je suis allée voir Mon premier cabaret avec Zoé, j’ai eu les larmes aux yeux à certains moments, parce que je trouvais cela incroyable. Il y a vraiment une sorte d’avant-après Eurovision Junior, où je les vois grandir et, en un instant, ils s’envolent.” De là à choisir un jour un des anciens participants à l’Eurovision Junior pour représenter la France au concours adulte ? “C’est comme si vous demandiez à une mère de choisir entre ses enfants ! Je les emmène tous et je chante avec eux.” répond la cheffe de délégation, qui laisse toutefois la porte ouverte à l’éventualité si, d’aventure, l’un d’eux venait à proposer sa candidature à France Télévisions.
« L’Eurovision Junior est une marque très importante pour l’avenir, qu’il faut continuer de faire grandir. »
Jusqu’alors diffusé le dimanche à 16 heures (depuis 2016), l’édition 2024 sera pour la première fois retransmise un samedi à 18 heures. Par ailleurs présidente du groupe de référence de l’Eurovision Junior, Alexandra Redde-Amiel est revenue sur ce changement. « En raison du décalage horaire dans certains pays, une programmation en prime time est impossible. Un consensus a été trouvé autour du samedi à 18 heures et cette diffusion en access offre une belle visibilité au concours. L’Eurovision Junior est une marque très importante pour l’avenir, qu’il faut continuer de faire grandir. » Satisfaite des audiences du concours en France (supérieures à la moyenne de la case), elle a ajouté que ce changement de jour de diffusion est pour le moment un test, qui fera l’objet d’un bilan par pays à l’issue du concours. Alors que le nombre de participants stagne depuis plusieurs années, Alexandra Redde-Amiel semble déterminée à voir d’autres pays rejoindre le concours en 2025 et prévoie d’aller à la rencontre des télédiffuseurs afin de les convaincre, tout en promettant des « surprises ».
Interrogée sur la possibilité de mettre en place une sélection nationale pour sélectionner le candidat français, Alexandra Redde-Amiel a répondu par la négative, mettant au cœur du processus la nécessité de bien connaître les enfants sélectionnés. “Je passe du temps avec eux en amont, tandis que Léa Ivanne (coach vocale de la délégation) et Alexandra Bouchou rencontrent toutes les familles en amont et parlent beaucoup avec les enfants. Cette étape psychologique est indispensable avant que je ne donne mon feu vert définitif.” La présence de la famille et des proches au sein de la délégation est d’ailleurs un rouage essentiel de l’ancrage du candidat et de sa prestation sur scène. La cheffe de délégation est également revenue sur la politique de protection des enfants (inspirée par le Royaume-Uni) mise en place par l’UER afin de garantir le bon déroulement de l’Eurovision Junior – qui échappe pour le moment aux tensions géopolitiques, au contraire du concours adulte. Les télédiffuseurs s’attachent également à renforcer leurs politiques de protection des artistes notamment vis-à-vis des réseaux sociaux, avec la mise en place d’une forte modération par les équipes numériques de France Télévisions.
Rendez-vous fin décembre/début janvier pour l’Eurovision 2025
À quelques jours de l’envol de la délégation pour Madrid, les médias ont pris le pouls de la cheffe de délégation pour l’Eurovision 2025. Cette dernière – qui est revenue sur l’édition 2024 qualifiée d’”intense” à tous points de vue – s’avoue pour l’heure surtout focalisée sur le concours junior. “Plusieurs questions se posent pour l’Eurovision 2025. Les attentes sont grandes et l’enjeu est important. Si nous voulons gagner, la France doit être extrêmement mobilisée et nos équipes concentrées sur l’objectif. Ce que je peux dire, c’est qu’il n’y aura pas d’annonce aussi précoce que l’année dernière.” Avant de nous donner rendez-vous d’ici fin décembre ou début janvier pour de premières annonces officielles.
Mais avant cela, la première étape passera par Madrid, destination l’Eurovision Junior 2024. Le rêve impossible d’une troisième victoire consécutive deviendra t-il réalité ? Rendez-vous samedi 16 novembre avec Titouan pour le découvrir… et dès le vendredi 15 pour lui apporter vos votes sur vote.junioreurovision.tv/ !
Crédits : Jean Ranobrac
Dommage que la délégation française ne soit pas plus inspirée pour le concours adulte, même si on a eu droit à des noms confirmés de la scène musicale française ces dernières années. Si France 2 est capable de se la jouer « Irlande du Junior » avec » 3 victoires en 4 ans, elle devrait pouvoir montrer autant d’ingéniosité et d’audace musicales au concours adulte qu’au concours junior.
Je trouve honnêtement les chansons françaises du junior plus inventives musicalement et mélodiquement que celles servies au concours adulte. Il faut ensuite y coller la voix.