EDITO – L’Eurovision 2024 va se tenir du 7 au 11 mai, avec 37 pays en compétition. Les répétitions des candidats commencent dés aujourd’hui. Mais cette année, un pays qui fut emblématique du concours dans les années 2000 ne montera pas sur scène : la Roumanie. Le pays a hésité à participer, pour finalement prendre sa décision le 25 janvier de ne pas se lancer dans la course au micro de cristal…. À ce moment là, ce choix n’avait rien d’étonnant. Pourtant, en faisant un bond quelques années en arrière, on aurait jamais cru le pays de Dracula tourner le dos au concours.
En couverture : les chanteurs Paula Seling & Ovi, chantant « Playing with Fire » en 2010, l’un des deux podium roumain au concours.
La Roumanie au concours, c’était tout d’abord…
Des débuts difficiles, dans les années 90. Dans cette période post union soviétique, de très nombreux pays de l’Est purent intégrer l’Union européenne de radio télévision (UER) en 1993, et une dizaine d’entre eux toquèrent à la porte pour rejoindre le concours immédiatement. Le Roumanie est représentée par le biais de la chaîne TVR, la « Televiziunea Română« , unique chaîne de télévision roumaine à cette époque. La sélection nationale employée pour désigner l’artiste représentant s’intitule sobrement « Selectia Nationala » (« Sélection nationale » en vf).
Mais la Roumanie est reléguée en 1993 au cours d’une émission pour déterminer quels nouveaux pays candidats pourraient s’ajouter au concours, et ne peut pas participer à la finale de l’Eurovision. Lorsqu’elle y arrive l’année suivante, elle termine en fin de tableau. Par la suite, le schéma se répétera, soit la Roumanie est reléguée, soit elle concoure, et ne brille pas.
Et puis, dans les années 2000, la Roumanie trouve sa marque de fabrique avec les chansons rythmées, et sait comment faire se trémousser le public pour obtenir ses voix. De plus, la Selectia Nationala obtient un certain succès, des stars et musiciens célèbres du pays y participent. À partir de 2005, tout s’emballe. 3e place à Kiev, 4e place à Athènes l’année suivante. A nouveau une 3e place en 2010 (Photo en couverture). Quand le pays n’est pas au sommet, il se qualifie toujours en finale et termine en milieu de classement. La Roumanie fait à ce moment-là partie des pays qui visent la victoire et pourraient bien finir par l’obtenir un jour ou l’autre…..
Mais ce n’est pas arrivé.
Les milieux de classement s’enchaînent de 2011 à 2015. La Roumanie n’est jamais en danger et se qualifie toujours largement ; en demi-finale, le pire qu’elle ait pu connaître est la sixième place. Mais les audiences commencent à baisser d’année en année. Et puis en 2016….
2016 : la dette
… Comme d’habitude, la TVR organise la Selectia Nationala, et c’est le chanteur Ovidiu Anton et sa chanson Moment of Silence qui sont élus pour participer à l’Eurovision à Stockholm. La ballade, peu appréciée de la communauté des fans, aurait peut-être pu signer la première élimination des roumains, mais ça n’aura pas été le cas, et pour cause…
Alors que tout se passait normalement jusque là, à trois semaines du concours, l’UER (Union Européenne de Radio-Télévision, qui organise l’Eurovision) lance un ultimatum à la TVR : elle doit régler une dette de 16 millions de francs suisses, qui s’accumulait depuis 2007, sans quoi la chaîne serait exclue de l’UER et perdrait ses droits de diffusion. Après un suspense sur ce que la TVR allait faire, finalement elle ne paie pas cette dette, et la Roumanie et Ovidiu Anton se retrouvent privés d’Eurovision. L’euromonde est en émoi, le chanteur déclare qu’il ne veut plus entendre parler du concours…. Et ce qui pique encore plus, c’est que la Roumanie aura su réunir les fond pour reparticiper dés l’année suivante !
Cette disqualification aura fait parler, mais surtout, aura mis en lumière les soucis financiers auxquels la TVR faisait face, un facteur que doivent prendre en compte nombre de diffuseurs de pays à l’est chaque année pour pouvoir participer. Mais on en reparlera à la fin de l’article.
En 2017, la Roumanie fera sensation auprès des téléspectateurs de l’Eurovision avec le duo Ilinca et Alex et leur chanson « Yodel It« , qui contenait du Yodel. Ils termineront 7e, le dernier bon classement du pays….
2018 – 2021 : les vaches maigres
Déjà à partir de 2016, la TVR décidait de tenter de nouveaux systèmes d’élection de son candidat. Une année, 100% télévote. Une autre, 100% jury en demi-finale, mais 100% télévote en finale. Pour une étrange raison, ils ne semble plus savoir sur quel pied danser.
À partir de 2018, la descente commence réellement. À l’issue d’une Sélectia Nationala où les votes du public déjà enregistrés étaient révélés alors que le vote n’était pas terminé, la Roumanie sort des sentiers battus : le groupe The Humans les représente avec une balade rock traitant du suicide. Le pays dont la force était surtout le vote du public se retrouve avec une chanson qu’on dirait plus « chanson à jury »…. The Humans terminent 11e en demi-finale, et la Roumanie est éliminée « normalement » pour la première fois.
L’année suivante, les juges de la Sélectia Nationala comptent pour 90% du résultat, et nouveau raté : 13e place pour la chanteuse Esther Peony. Le jury de l’Eurovision l’aurait qualifiée de justesse, mais pas le public. Pour 2020, la TVR décide de reprendre les choses en main en sélectionnant en interne leur star locale, Roxen (Photo en couverture). Après une édition annulée par le Covid, la chanteuse arrive avec une ballade qu’elle interprète difficilement. Résultat, une troisième élimination, et à nouveau, le jury de l’Eurovision la qualifiait de justesse, mais pas le public.
Le pays qui avait trouvé à une époque une recette pour plaire aux téléspectateurs a complètement perdu le nord. Pire : tout comme c’est le cas habituellement, en cas d’élimination d’un pays en demi-finale, ses audiences sont moins bonnes, et en l’occurrence, les téléspectateurs de la TVR qui étaient déjà de moins en moins nombreux à regarder le show année après année, laissent la finale de l’Eurovision sombrer…
2022 : l’affaire des jurys annulés
La finale roumaine est organisée comme avant le Covid-19, et la période d’auditions se termine de manière étrange : sur les 20 auditionnés, les 6 derniers à chanter sont éliminés, et ce alors que de nombreux favoris s’y trouvaient, des rumeurs fusent comme quoi les juges auraient arrêté d’évaluer vers la fin du programme… Rumeurs uniquement, mais les choses se gâtent déjà.
Finalement, le chanteur WRS remporte la finale roumaine et part représenter son pays à Turin. Alors qu’il n’est au départ pas bien placé pour se qualifier, son numéro entraînant et chorégraphié lui permet de se qualifier. 18e place en finale, ouf, l’honneur est sauf !
…Ou pas. Car le soir même de la finale, au moment d’annoncer les points de la Roumanie, c’est Martin Österdahl qui apparaît pour expliquer qu’un problème de connexion lui impose d’annoncer les points lui-même…..
C’est le lendemain que la vérité tombe : en réalité, les points du jury roumains ainsi que de cinq autres pays ont été annulés… Car ils auraient triché en demi-finale, en se votant tous les uns les autres. (Cet article -en anglais- vous expliquera le pourquoi du comment).
Les diffuseurs concernés s’insurgent, déclarant qu’il s’agit d’une (extrêmement grosse) coïncidence, mais la TVR va plus loin : elle va publier les résultats de leur jury en montrant qu’ils sont tout à fait normaux, et ils seront relayés dans les médias roumains. Mais, un petit tour de passe-passe a été effectué : ce sont uniquement leurs votes pour la finale de l’Eurovision qu’ils font circuler, se gardant bien de montrer leurs votes de la demi-finale, ceux qui sont à l’origine de la triche…
Ensuite, la TVR accuse également trois autres pays de la même demi-finale (La Suède, l’Australie et la Belgique) de s’être également votés les uns les autres. (Ce qui est vrai, mais ces trois pays recevaient des points en masse par les jurys des autres pays, ce qui ne rends pas ce vote suspect). Pour couronner le tout, la TVR envisage de porter plainte contre l’UER pour diffamation et de se retirer du concours… Ce qui a été vraisemblablement classé sans suite, puisqu’on a plus eu aucune nouvelle à ce sujet, et que la Roumanie prendra bien part à l’Eurovision l’année suivante.
2023 : le désastre
2023 sonne l’année du désastre. Comme d’habitude, la TVR lance sa sélection nationale, et à l’issue de celle-ci, c’est une étoile montante de la scène roumaine qui l’emporte…. Mais dont la chanson n’était pas du tout parmi les préférées du fans du concours. Theodor Andrei, d’à peine 18 ans, obtient le droit de partir à Liverpool pour y chanter son titre D.G.T.
Et à partir de là, Theodor participe à certaines pré-parties, et il ne se passe rien de particulier jusqu’aux répétitions…. Du moins en apparence. Theodor a rapporté plus tard en interview ce qui se déroulait en coulisses pendant ce temps.
D’après lui, la TVR a voulu lui imposer des choix qui ne lui plaisaient pas. Tout d’abord, interpréter D.G.T. en version acoustique, ce que Theodor ne voulait pas faire, pensant que la chanson perdrait du potentiel. Finalement, c’est une version hybride, dont la première minute est acoustique, qui sera présentée au concours. Ensuite, alors que Theodor serait parti pour proposer ses idées de scénographie, la TVR a déclarait qu’elle se chargeait de tout, et que ce n’était pas le job de Theodor de travailler sur la mise en scène.
Et quand on voit le résultat…. Dès les répétitions sur la scène anglaise, les retours sont mauvais : un décor de lave en fusion (on peut vraiment dire qu’ils auront joué avec le feu !) avec des femmes en tenues blanches par-dessus tapisse les écrans. Theodor est habillé en jaune poussin aux répétitions, finalement il sera vêtu de rose le jour J.…. A la fin de la performance, une jeune femme (sa petite amie) vient barbouiller le ventre du chanteur de noir. Le tout est jugé moche…. La qualification roumaine qui semblait déjà improbable avant, est à présent impossible selon les observateurs.
…Et le destin leur donnera raison : la Roumanie termine avec zéro point, une première pour le pays dont le vote du public était autrefois la force. (Notez que la Moldavie, qui octroie toujours des points à la Roumanie, ne votait pas dans cette demi-finale.) Pas de Roumanie en finale, et visiblement pas d’engouement de toute manière : la finale de l’Eurovision 2023 fera le score famélique de 3% de part d’audience en Roumanie. Quand aux fans, roumains comme européens, ils accusent la TVR d’avoir laissé tomber Theodor en cours de route.
Question très sérieuse : la TVR a-t-elle fait exprès ? Est-il possible d’avoir autant mauvais goût ?
Résultats catastrophiques, audiences en berne, fans en colère contre la TVR, opinion publique qui l’est contre l’Eurovision, et accusation de triche l’année précédente de la part de l’UER… Peut-on faire un plus mauvais bilan ?
Lorsque la liste officielle de participants à l’Eurovision 2024 est dévoilée, la Roumanie ne figure pas dessus. Le pays est encore en négociations… Mais y’a-t-il un intérêt si la motivation n’est plus là ? Finalement, un mois plus tard, est annoncé ce à quoi on pouvait s’attendre : la Roumanie tourne la page de l’Eurovision 2024, pour un retour pas confirmé.
Le désintérêt de l’Est…
Le parcours roumain est symptomatique d’une tendance plus large : le désintérêt du concours Eurovision en Europe de l’Est. La Roumanie n’est que le nouvel absent du concours, d’autres ont pris le large avant elle.
De 1993 jusqu’à la fin des années 2000, les pays de l’Est ont rejoint l’un après l’autre le concours Eurovision, et vont progressivement le dominer : de 2001 à 2008, chaque nouvelle victoire était la première pour le pays vainqueur, et la Roumanie faisait partie des pays déterminés à y arriver. Et puis, dans la décennie suivante, les pays de l’Ouest font de nets progrès et se réapproprient un concours dans lequel ils peinaient, et avaient pour certains cessé de faire des efforts.
Cela commencera avec la réintroduction du jury, supposé atténuer l’effet diaspora des téléspectateurs, mais qui sera vite décrié, notamment par la Turquie qui abandonnera le concours après l’édition 2012. Par la suite, la drag-queen Conchita Wurst gagne le concours en 2014, qui petit à petit se crée une identité marquée LGBT, ce qui ne plaît pas partout, surtout en Hongrie, pays qui se retirera après leur échec en demi-finale de 2019. Le concours devient de plus en plus cher, obligeant certains diffuseurs à baisser les bras. Lorsque la guerre éclate, la Russie et la Biélorussie sont exclues… Et au cours de cette même décennie, ce sont surtout des pays à l’Ouest qui ont été ramenés après une longue pause : Italie et Autriche en 2011, Tchéquie et…. Australie en 2015, et tout récemment, le Luxembourg.
… Et celui de la Roumanie
La Roumanie s’inscrit dans cette tendance, tout en ayant ses spécificités. Car si de nombreux pays cités ci-dessus sont partis d’un seul coup alors que leur présence dans le concours était frustueuse, le cas roumain fait état d’une déchéance sur plusieurs années.
La Roumanie fait partie des pays qui n’ont jamais gagné le concours, alors que certains de ses voisins y sont arrivés. Mais elle est également un des pays qui a le plus pâti du retour des juges. De 2012 à 2014, le pays a manqué le top 10 précisément à cause des jurys. L’idée d’une possible victoire a reculé dans la conscience collective des roumains, mais c’est aussi l’émergence de nouvelles émissions TV musicales en Roumanie sur les nouvelles chaînes de télévision qui a éparpillé l’audience, et l’intérêt. Le show que la Selectia Nationala proposait dés les années 90 n’avait plus rien d’exceptionnel dans les années 2010.
De plus, il y la TVR. La chaîne, créée en 1956, fut pendant très longtemps la seule chaîne de télévision roumaine, et par conséquent la chaîne gouvernementale. Celle-ci, qui défendait les idéaux de l’état, anti-soviétiques mais communistes malgré tout jusqu’à la fin des années 80, a donc servi à la propagande pendant de longues années. En conséquence, la TVR aujourd’hui se traîne une réputation d’organisation corrompue, dans un pays qui est pourtant gangrené par la corruption. La dette de la TVR en 2016, et les accusations de triche de 2022 ont encore appuyé cette réputation et ont beaucoup entaché la confiance des roumains envers la chaîne, mais également envers l’UER.
Enfin, il y a les contraintes financières… Et pour ce qui est de la Roumanie, son chemin au concours suit un peu son état : les années 2000 sont pour la Roumanie symbole d’une croissance économique, de l’entrée dans l’union européenne et dans l’OTAN. En 2023, cette ascension est terminée, et le pays a fait face à un afflux de plus d’un million et demi de migrants ukrainiens. Et contrairement à la Moldavie, petit pays qui fait peu parler de lui et s’accroche au concours pour gagner en visibilité, la Roumanie est un « grand » pays de l’est, qui n’a pas besoin du concours pour de l’exposition (elle en aura par exemple à l’Euro de foot 2024 où elle s’est qualifiée).
Alors, en est-ce fini de la Roumanie à l’Eurovision ? On ne peut le savoir, car tout peut arriver : la Moldavie et l’Ukraine, voisins directs de la Roumanie, continuent de participer chaque année avec un enthousiasme vif, et cela malgré leurs contraintes financières ou guerrières. Chaque année contient son lot de surprises, et le pays pourrait tout à fait revenir comme si de rien n’était en 2025… À condition d’en avoir retrouvé, de l’enthousiasme. Et ce n’est pas gagné…
Merci d’avoir lu ! Si vous voulez en savoir plus, Cet article en anglais du site ESCYounited, écrit par un roumain, vous donnera de plus amples détails sur l’aventure roumaine à l’Eurovision et les tensions qui en ont découlé.
Crédit image : UER
Le nombre total de pays ayant participé est de 52. On peut en éliminer 2 qui n’ existent plus: la Yougoslavie et la Serbie-et-Monténégro qui n’ a participé que 2 fois en 2004 et 2005. Le Maroc a participé une seule fois en 1980. Pour une limite à 46, 45 si le pays organisateur est du big 5, il faudrait que 3 ou 4 pays se sacrifient.
Quand je lis certains commentaires je suis un peu étonné.
On souhaite la victoire croate pour faire revenir les pays se l’est qui ont quitté le concours?
Ca sera l’effet inverse je pense car cela revient à favoriser (tricherie?) un pays au détriment des autres et faire de la politique en quelque sorte, tout ce que l’on reproche au concours.
Vouloir un retour des pays, l’inscription de nouveau et en même temps parler de diminuer les coups n’a aucun sens. L’eurovision est quelque chose d’énorme avec 37 pays cette année. On ne peut pas souhaiter un show plus modeste et vouloir rajouter d’autres nations. Il faudra bientot 3 demi finale et donc une explosion des coûts.
Revenir a une soirée comme à l’époque?
Dans ce cas d’autres pays quitteront le concours pour la même raison que le Luxembourg à l’époque.
Au delà de l’aspect financier, il y a un manque d’intérêt pour le concours dont les chiffres d’audience sont, on le sait tous, très exagérés.
L’attrait diminue aussi à cause des votes. Les gens en on marre de voir toujours les mêmes pays favorisés, souvent par les votes diasporas.
Il n’y a pas vraiment de solution ici. Entre les coûts, les préférences des téléspectateurs dans les différents pays en fonction des différentes cultures, les décisions gouvernementales (conservateur, puritain, anti-gay…) les raison pour quitter le concours sont nombreuses et ca n est pas toujours les bonnes excuses qui sont données.
Tout d’abord, je ne pense pas que les gens (dont moi) parlent d’utiliser la « tricherie » pour faire gagner la Croatie mais bien d’un vote démocratique. La Croatie fait partie des grands favoris cette année, il n’y aurait rien d’étonnant à la voir gagner. Et je suis prêt à donner un coup de pouce en apportant mon petit vote si il le faut.
Ensuite, je ne sais pas à quel moment on peut imaginer qu’il faudra bientôt 3 demies finales. Nous avons actuellement 37 pays dans le concours. Nous en avons déjà eu 43 par le passé tout en ayant des demies finales de 19 pays, ce qui est tout à fait cohérent. Les gens veulent que des pays reviennent, on ne parle pas d’en faire adhérer 15 nouveaux au concours. Une victoire Croate contribuerait très certainement à raviver un peu la flamme des Balkans pour le concours.
Je tiens également à préciser que l’UER a déjà dit avoir fixé un plafond au nombre de pays pouvant participer lors d’une édition. Aux dernières nouvelles ce nombre était de 46. L’idée de l’UER en fixant ce nombre est certainement de viser 2 demies de 20 pays max compte tenu du fait qu’il y a 6 pays d’office en finale (5 si le pays hôte fait partie du big 5). Vous imaginez ce qu’il faudrait pour arriver à 46? Si la Hongrie, la Bosnie Herzégovine, le Monténégro, la Macédoine du Nord, la Bulgarie, la Roumanie, la Slovaquie et la Turquie (pour ne me focaliser que sur cette partie de l’Europe) revenaient, on serait à 45. Il reste encore une place pour Monaco ou Andorre par exemple (partons du principe que la Russie et la Biélorussie sont out). Bref, tout ça pour dire qu’on n’est près d’atteindre le plafond fixé par l’UER et avec les tensions dans l’est, ça n’arrivera certainement jamais.
Pour ce qui est de réduire les coûts du concours, c’est en effet un peu utopique. Je ne suis pas économiste, je ne travaille pas non plus dans l’événementiel. Je me doute qu’il doit être extrêmement difficile de réduire les coûts d’un tel événement. Mais n’y aurait-il pas moyen de faire un peu d’économie concernant la construction de la scène? Puis je me demande aussi à quel point l’UER s’en met dans les poches parce que, excusez moi mais les audiences de l’Eurovision sont énormes. Avec de tels audiences il y aurait certainement moyen d’attirer plus de sponsors (et des gros). Faut supporter les publicités qui iraient avec bien évidemment.
Merci beaucoup pour cet article.
Excellent article de Michaël – comme d’habitude – qui résume bien la situation de plusieurs pays absents du Concours.
J’ y ajouterai un élément qui n’est qu’évoqué, l’argent !
Ce sont majoritairement (Turquie mise à part) de petits pays qui ont des budgets qui ne leur permettront JAMAIS d’organiser un Concours dans son format actuel. Comme pour le JO, une réflexion sur le dimensionnement de l’événement est sans doute à mener pour leur redonner l’espoir et l’envie.
Des peuples qui ont conscience de leur modeste place dans la culture européenne (à tort pour la plupart) et que les jurys ne leur passeront JAMAIS RIEN et que la structure du show ne leur permet que par la force du télévote de faire bonne figure.
Ils se sentent jugés à l’aune exclusive de la musique anglo saxonne : le folklore ne détrônera jamais la « bonne musique » mainstream et si ils s’ aventurent sur ce terrain, ils joueront forcement en seconde division, l’élite de ce genre étant occidental.
La position actuelle de favori de la Croatie peut, si elle se concrétise, rebattre les cartes et voir certains pays revenir, au moins pour une période, tenter leur chance.
L’arrogance des « pays forts » qui se comportent comme si l’Eurovision était leur pré carré et les difficultés financières des diffuseurs sont les deux obstacles majeurs à un Concours à 50 états.
La Hongrie et la Turquie sont des cas distincts : leur défection tient à des raisons politiques et rien ne se fera avec les dirigeants actuels. La Slovaquie vient de prendre le même chemin en reconduisant le socialo-fasciste Robert Fico.
Le Bélarus, qui n’est pas officiellement et directement partie prenante dans la guerre d’Ukraine, pourrait candidater à nouveau, en soumettant, comme Israël cette année, son titre au comité de censure – pardon, d’évaluation – de l’UER !
Tout ça pour dire que l’Eurovision va continuer à s’étioler temps qu’elle sera managée par les scandinaves qui cumulent les deux obstacles.
La Croatie figure parmi les favoris. Si elle obtient un bon classement, voire une victoire avec l’ absence de 3autres pays yougoslaves et d’ un voisin direct (la Hongrie), ce serait un exploit. Cela pourrait inciter les autres à revenir.
Parmi les pays des Balkans absents cette année, 3 pouvaient espérer une victoire grâce à des bons classements, parfois des 12:
1/ la Roumanie grâce à une 3ème place en 2005 (dont 3 12, son record) et 2010 et une 4ème en 2006. Elle pouvait compter sur le soutien de la Moldavie et l’ Espagne, voire l’ Italie, le Portugal et Israël.
2/ la Bosnie 3ème en 2006 avec 8 12 (son record, majoritairement des pays yougoslaves, musulmans ainsi que la Suisse et l’ Autriche, 2 pays votant surtout pour des pays yougoslave en télévote), 6ème en 2011 malgré le passage en 2ème position, 9ème en 2004 (pas de 12 mais des 10 derrière la Serbie-Et-Monténégro 2ème) et 2009 et 10ème en 2008.
3/ la Bulgarie. Au début, ce pays était rarement qualifié pour la finale mais quand il y accédait, c’ était le top 5 puisque 5ème en 2007, 4ème en 2016 et 2ème l’ année suivante derrière le plus ancien pays en attente d’ une première victoire après 53 ans d’ attente au mieux 6ème en 1996. On s’ est dit qu’ il n’ attendra pas aussi longtemps une première victoire.
Parmi les autres absents, la Hongrie a fait fort à sa première participation en terminant 4ème et 4 12 dont les 3 premiers pays à voter. Par la suite, les top 10 ont été rares (5ème en 2014, 7ème en 2017, le représentant est disqualifié pour la finale en 2019 et 9ème en 2007).
L’ absence de la bande Slovaquie-Hongrie-Roumanie-Bulgarie isole la Grèce et l’ Albanie mais aussi les pays du Caucase avec l’ absence de la Russie. Espérons que ce n’ est qu’ un au revoir et qu’ ils reviendront dans les années qui viennent. La Russie et sa soeur biélorusse seront peut-être autorisées à revenir quand la guerre sera terminée.
Tout ce qu’écrit Michaël tient du génie. Notre classement, c’est une idée qui jaillit de son cerveau.
Et ce texte est splendide.
La Bulgarie a pourtant terminé deuxième en 2O17, la Turquie a gagné en 2003 et doit être à moitié satisfaite de voir que le Big 5 participe plus pleinement aux demi-finales que par le passé. Ces pays nous manquent et même si elle est présente, je suis furieuse que la Serbie passe en la position la moins côtée.
Ce que j’ai préféré dans toutes les contributions roumaines se résument à deux (Sans oublier le baiser donné à Ilinca), mon coup de foudre pour les deux prestations restent intacts. Il s’agit de https://youtu.be/Y96QWdyx5TQ?si=3cAS0aWNaDxbwld6 et de https://youtu.be/2a1Q_hpGLbs?si=D4QpqfK9rYDPCFNp (la seule vidéo que j’ai montré au père de Laurène et qui a lui aussi apprécié).
Souvent, je me dis que Jan Ola SAND était le meilleur superviseur exécutif de toute l’histoire de l’Eurovision.
Encore un article très détaillé et très intéressant de la part de Michael qui pointe du doigt un problème de taille, le retrait successif et progressif des pays des balkans mais également d’autres pays de l’est. En ce qui concerne la Roumaine, je ne sera pas surpris que le pseudo sabotage de la chanson Roumaine de l’année dernière soit volontaire. Pourtant la Roumanie comporte d’excellents artistes et a toute de même fait ses preuves à l’Eurovision, dans le passé. Alors le retrait de cette année ne me surprend pas tant que ça, il va au-delà d’éventuels problèmes financier, on peut donc envisager qu’il s’agit d’un désintérêt massif pour l’ESC.
Après, je voudrais tout de même ajouter que si certains pays se sont retirés à cause d’éléminations successive en demi-finale, ils devraient peut-être se remettre sérieusement en question et revoir leur mode de sélection pour trouver des chansons beaucoup plus percutantes et qui plaisent au plus grand nombre.
Que peut faire l’UER ? Revoir son concept et redonner une dimension plus accessible et modeste pour favoriser la participation de pays qui se sont retirés au fil des années. c’est effectivement une option qui me semble possible.
Personnellement , je regrette tout de même l’absence de la Roumanie cette année, tout comme celui de la Bulgarie, de la Slovaquie et de la Hongrie, sans oublier la Macédoine du Nord, la Bosnie et le Montenegro qui proposaient tout de même assez souvent de belles chansons à la fois ethniques et authetiques. Par contre pour la Bielorussie c’est une autre histoire que je ne souhaite pas aborder ici, car je ne souhaite pas mêler la politique avec la variété, car l’Eurovision reste tout de même à la base un concours de chansons.
Alors j’espère qu’à l’avenir l’UER se penche sur le sujet et qu’elle trouve des solutions pour que cette gigantesque vitrine mondiale soit à nouveau accessible à tout le monde , y compris pour de nouveaux pays qui souhaiteraient y participe.
Encore Merci Michael pour cet article qui interpèlle et qui comme toujours est de grande qualité !
Merci Michael pour cette analyse très complète et fort intéressante.
Eurovisuellement !
Philippe
Très bon article qui met en avant un problème qui devient inquiétant depuis quelques années.
Le désintéressement de l’Europe de l’Est vis à vis du concours, et surtout celui des pays Balkans, soulève de nombreuses questions.
Peut-on encore, en 2024, considérer l’Eurovision comme une grande fête réunissant toute l’Europe autour de la chanson? Pour moi la réponse est non. Sur la grosse décénnie qui vient de passer, nous avons perdu la Slovaquie, la Hongrie, la Bosnie-Herzégovine, la Turquie, la Biélorussie et la Russie sur des durées plus ou moins longues et qui peuvent encore s’allonger. Les raisons sont diverses certes, mais le résultat est le même. On ajoute à cela le Monténégro, la Macédoine du Nord, la Bulgarie et la Roumanie qui s’en vont et reviennent de façon régulière, souvent à cause des coûts qu’engendre une participation au concours. Lorsque l’on regarde la carte des pays prenant part au concours cette année, on se rend compte du désastre.
Il est nécessaire que l’UER trouve une solution à ce problème. Le concours peut se dérouler sans ces pays mais il n’aura pas la même saveur. Il faut certainement commencer par réduire les coûts nécessaires à l’organisation et la participation au concours. Cela implique évidemment de faire un événement de moins grande ampleur et j’imagine des scènes moins impressionnantes mais ça sera certainement moins triste que de perde la moitié de l’Europe.
Je pense également que la victoire d’un pays de l’est pourrait redonner de l’espoir. C’est pour cette raison que je ne suis pas contre une victoire de la Croatie cette année. La chanson n’est pas une de mes favorites mais elle a l’air de plaire à un large public et je pense sincèrement qu’un concours en Croatie ramènerait au moins 3 pays (voir plus).