C’est ce soir que démarrent les hostilités en Estonie, avec la première demi-finale de l’Eesti Laul 2023. L’occasion pour Loreen (alias moi-même) de livrer ses premiers avis en direct de Viimsi (ou preque).

Dire que Loreen est satisfaite de cette première vague de titres n’est pas une sinécure, car après deux-trois éditions de moyenne facture, l’Eesti Laul signe cette année son grand retour dans le haut du panier des sélections pour l’Eurovision. C’est en effet une première demi-finale fort relevée et riche en éclectisme que nous propose l’Estonie ce soir, avec un beau panaché de sa scène musicale. Pop, ballade, rock, punk, musique d’ambiance, jazzy : il y en aura pour tous goûts ce soir à partir de 18h30 (heure française) sur ERR ! Certes, tous les titres ici proposés n’ont pas le potentiel, si ce n’est foncièrement la vocation, de faire le voyage à destination de Liverpool. Il n’en reste pas moins que plusieurs se démarquent de par leurs qualités, tandis que dans une optique purement eurovisionesque, un semble se démarquer plus que les autres aux oreilles de votre humble serviteur.

1- JANEK – “House of Glass”

C’est l’un des favoris de la sélection qui ouvre le bal de l’Eesti Laul 2023. Janek propose ici une efficace ballade contemporaine aux tonalités pop et nous offre de belles envolées finales à même de nous propulser tout droit à l’intérieur de sa maison de verre. House of Glass n’est clairement pas la proposition ni la plus atypique, ni la plus risquée de cette demi-finale (très loin de là), mais sa production parfaitement calibrée et sa belle puissance musicale auraient de quoi faire mouche sur la scène de la M&S Bank Arena de Liverpool en mai prochain.

2- Ellip – “Pretty Girl”

Plus rythmé que ce que l’artiste a l’habitude de livrer, Pretty Girl est un titre à l’atmosphère accrocheuse, qui témoigne de la culture musicale éclectique de son interprète. Évoquant les sonorités de la fin des années 90 et du début des années 2000 (certains citent Kylie Minogue version Body Language), la pop est ici habilement mêlée à des touches jazzy et à des soupçons de funk qui rendent l’ensemble extrêmement séduisant. D’autant plus qu’il est porté par une interprète très charismatique, dont je suis très curieux de voir de quelle manière elle fera vivre un tel titre sur scène.

3- Kaw – “Valik”

Les titres indie pop à l’estonienne tels que je les aime ! Valik nous plonge tout droit dans une atmosphère vintage tout en étant un titre d’une véritable modernité. Bref, un ensemble tout aussi séduisant par sa rythmique que par son ambiance musicale. Certes, le potentiel eurovisionesque n’est pas des plus larges, mais Kaw est l’une des multitudes cordes à l’arc d’une scène musicale estonienne riche en diversité.

4- MERLYN – “Unicorn Vibes”

Que serait une sélection pour l’Eurovision sans son joke act ? En dépit de mon appétence certaine pour la créature légendaire et pour les ambiances très très colorées, trop d’unicorn vibes tuent la vibe de la licorne. Certes, l’euromonde produit pire et produira bien pire, mais tant musicalement que dans le texte et le style, le titre de MERLYN a décidément le goût d’une overdose de licornes, ô animal pourtant vénéré ici injustement mis à mal par une avalanche de mauvais goût stylistique.

5- MIA – “Üks samm korraga”

Une jolie ballade en estonien pour MIA, telles que l’Eesti Laul nous en livre chaque année son quota. Un titre simple, classique dans sa composition, loin du révolutionnaire, mais qui n’en demeure pas moins agréable à l’écoute. Quand bien même on eut connu plus offensif à l’oreille, ce sont trois jolies minutes que nous offrent Üks samm korraga et la belle voix de son interprète.

6- Neon Letters & Maiko – “Tokimeki”

Un singulier titre électro-pop pour le duo Neon Letters & Maiko, qui mêle influences musicales nippones et nordiques au travers de ce titre électro-pop. Tokimeki est une proposition radicale, à la composition égale et avare en variations rythmique, soit dans laquelle on se laisse embarquer, soit dont on reste froidement mais cordialement à la porte. Me concernant, je suis rentré et me suis laissé porter dans une atmosphère planante, telle une audacieuse carte des sons de Tallinn à Tokyo. Une excellente musique d’ambiance colorée des lumières d’une ville la nuit, qui trouverait toutefois très difficilement sa place dans l’univers de l’Eurovision.

7- OLLIE – “Venom”

Un titre rock aux sonorités très 90/2000 (qui reviennent progressivement en force revival) pour Ollie, qui livre ici un morceau simple et efficace à même de trouver son public à coup sûr. Me concernant, quand bien même je reconnais les qualités de l’ensemble, Venom présente un certain classicisme et une saveur de déjà-vu, là où cette demi-finale nous offre des propositions bien plus intéressantes. Il n’empêche pas moins que cela reste un titre de bonne facture, auquel je ne suis toutefois pas très sensible, au contraire d’une large partie de l’euromonde visiblement beaucoup plus enthousiaste que moi.

8- Andreas – “Why Do You Love Me”

Sur des airs de guitare, Andreas débarque à l’Eesti Laul 2023 avec une jolie ballade, qu’il berce de son jolie grain de voix. Trois minutes délicates et sans fards, peut-être pas des plus percutantes sur le plan d’une composition au demeurant assez linéaire. Mais Why Do You Love Me nous offre une écoute douce, agréable et très plaisante, ce sans que l’artiste n’ai besoin de recourir au moindre soupçon de puissance. Parce que, parfois, il n’y a tout simplement pas besoin de cela.

9- Bedwetters – “Monsters”

Quoi de mieux que de célébrer son retour sur la scène musicale après neuf ans d’absence par une première participation à l’Eesti Laul ? Un beau cadeau de retour pour Bedwetters et son univers pop punk-électro rock dans la mouvance de Tokio Hotel, au même moment duquel le groupe a percé. Un style musical dont je suis (très) loin d’être le spécialiste, dont Monsters est un représentant de très bonne facture. Simple, efficace, à l’image d’un refrain direct et suffisamment mémorable pour imprimer.

10- Anett x Fredi – “You Need to Move On”

Les super-finalistes surprises de l’édition 2020 (dont ils avaient largement toppé le vote du jury de manière tout à fait inattendue) reviennent trois ans plus tard avec un titre dans la droite lignée de leur Write About Me d’alors. À l’instar de son précédesseur, You Need to Move On se présente comme un morceau d’ambiance élégant, aux belles tonalités pop et jazzy. L’univers d’Annett x Freddi, c’est une véritable invitation au chill, allongé sur le sofa d’un appartement cosy aux lumières tamisées, verre de Chardonnay et cigarette à la main. Sans oublier la bougie parfumée à l’ambre.

Vous l’aurez compris : mes coups de coeur de cette première demi-finale s’appellent Janek et Neon Letters & Maiko qui, dans deux styles complètement opposés, sont parvenus à m’accrocher. Dans l’optique de Liverpool, le premier cité est clairement celui qui a le plus ses chances parmi les dix, quand bien même il n’a pas l’audace et la singularité de l’univers des seconds. Mais House of Glass est de ces ballades pop d’excellente facture qui, bien exécutées par leur interprète, auraient tout à fait leur place sur une scène du concours qui y serait sensible. Là où le public pourrait être plus rétif, ou moins unanime, devant des propositions plus risquées ou moins évidentes d’accès que la scène de l’Eesti Laul a grand mérite d’accueillir. Car il est bien connu qu’une sélection nationale, cela sert également à exposer une partie du paysage musical d’un pays, quand bien même sa destination n’est pas l’Eurovision. Ce qui n’enlève à rien la mission première d’une sélection, à savoir désigner un représentant digne de bien figurer au concours, attention !

Rendez-vous ce soir pour découvrir les six premiers qualifiés pour la finale de l’Eesti Laul. En attendant, quel est votre favori de cette première demi-finale ?

Eesti Laul 2023 (DF1) : quelle est votre favori ?
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