Un mois après la seizième place de la France à l’Eurovision 2023, le temps du recul imposé et nécessaire s’est lentement écoulé. Vient désormais celui d’essayer de répondre à la question qui nous brûle les lèvres : pourquoi ?
Dans ma tête ce n’est pas tant évident
Je cherche la vérité, tout en l’évitant
On a beau être sur le toit du monde
On ne peut toucher le ciel du doigt
Rarement paroles n’ont été si prophétiques quant au destin français à l’Eurovision.
La posture d’eurofan n’est pas tant évidente. Que dire de celle de fan media. Il y a là l’enthousiasme intrinsèque à porter la candidature française. Il y a là la volonté et l’envie viscérale de voir briller la Grande France, et de mettre tous les moyens en œuvre pour. Il y a là la sincérité et l’engouement. Il peut y avoir parfois là aussi une certaine forme d’aveuglement, de déni, dont le recul nous éclaire.
Trouver le ton juste pour faire l’autopsie d’un échec n’est pas tant évident, surtout quand on a défendu bec et ongles sa représentante. Trouver le ton juste n’est d’autant pas évident que l’on s’expose aux risques d’être accusé de cracher dans la soupe, de retourner sa veste ou a contrario de faire montre de trop de complaisance.
J’ai plusieurs fois essayé de poser ma plume sur cet édito sans que les mots, le ton, la ligne directrice ne viennent. Rare crise de la page blanche. J’ai préféré laissé sa chance au recul, nécessaire, indispensable, avant de poser enfin mes mots sur cette anatomie d’une chute qui, contrairement à Justine Triet, a été loin d’emmener La Zarra sur le toit du monde. Hélas.
Tout avait pourtant bien commencé.
Le choix de l’artiste, tant espérée par les eurofans. La première fois depuis une éternité que la France choisit l’une de ses artistes en devenir du moment pour porter ses couleurs. La volonté affichée de France Télévisions d’aller décrocher la victoire à Liverpool, comme jamais elle n’a été exprimée et assumée jusqu’alors. Une représentante très accessible avec les eurofans, à qui elle a offert sa réelle disponibilité, sa sympathie et ses moments de grâce lors des previews et lors de la rencontre à Liverpool. Il en fut de même avec nous lors des interviews que nous avons eu la chance et le plaisir de réaliser. Une chanson de belle facture, mêlant à la fois les standards d’une pop-variété à la francaise, ADN musical de La Zarra, et des sonorités rétro-disco-funk dans la pure veine des tendances musicales du moment en France.
Derrière les mastodontes Loreen et Käärija, jouer la gagne allait être compliqué et nous le savions. Mais devant le niveau général de l’Eurovision 2023, l’iconisme de la diva La Zarra, l’engouement autour de sa candidature et la qualité objective de la chanson, un top 10, voire un top 5, nous semblait largement à la portée d’une France star du junior, mais à la peine au concours adulte, malgré les espoirs nés du miracle Pravi.
Seulement, tout ne s’est pas passé comme prévu.
Une première frayeur début mars, avec l’énigmatique story Instagram où La Zarra annonce tout arrêter, suscitant stupeur et panique dans l’euromonde, avant d’avouer qu’elle ne parlait ici que de … gluten. L’eurodrama originel d’Amsterdam où, moins d’un mois avant Liveroool, la candidate française se retire à la dernière seconde de l’euroconcert, officiellement en raison d’un état d’épuisement émotionnel. L’acharnement médiatique qui a suivi. Une campagne de communication mise au ralenti du fait de la mise au repos de l’artiste, alors qu’elle aurait du battre son plein. Et surtout, le doute qui subsiste : verra t-on La Zarra sur la scène de l’Eurovision 2023 ?
Une story inhabituellement sobre et sans fards, une tribune des fan médias (à laquelle s’est associée L’Eurovision au Quotidien et que nous assumons bec et ongles), une interview d’Alexandra Redde-Amiel sur Sud Radio pour “remettre l’église au centre du village”, une belle prestation live sur la scène de C à vous. Et entre-temps, une artiste largement soutenue par les eurofans et par les bookmakers, qui la font grimper à la 3ème place. Un nom qui s’impose sur toutes les lèvres avec lesquelles nous discutons à Liverpool. “Diva”, “iconique” … et surtout “Évidemment”. Plus que jamais, les espoirs sont permis, et l’on se prend même à rêver retrouver la France dans le top 5. Pour ne pas dire y croire.
Très vite émergent toutefois de nouvelles craintes. Face à la concurrence, la France propose une belle mise en scène (même si pas autant “jamais vue” qu’annoncée) teintée de beaux jeux de lumière, mais où l’artiste semble peiner à trouver ses marques. Chanter à 3 mètres de hauteur sur une micro plate-forme qui bouge au moindre mouvement n’est pas tant évident, et ce n’est pas en une semaine qu’on s’habitue à un tel défi technique. Surtout, c’est sur le plan vocal que subsistent les plus gros doutes, toutefois éteints par une belle prestation lors du Jury Show de la première demi-finale, et par l’accueil dithyrambique du public en salle.
L’espoir renaît, mais il est vite éteint par un ordre de passage médiocre (6ème, comme en 2022), qui plus est dans une moitié de finale où les favoris (Suède, Finlande, Italie, Espagne) se bousculent. Surtout, la prestation du Jury Show de la finale réduit vite à néant les espoirs de la France de bien figurer chez les professionnels, La Zarra livrant une prestation vocale aléatoire, où le stress et le manque de maîtrise la placent sur le fil les trois minutes du titre durant, jusqu’à ce “La Grande Fraaaaaaance” étranglé. Reste un télévote que l’on espère favorable devant la très belle prestation du samedi soir. Il n’en sera malheureusement rien, et la suite ne sera que doigt d’honneur (appelons un chat un chat), urgence waters et … accident industriel.
Tant de déception et d’amertume devant toutes ces belles promesses, finalement que du vent. Tant de déception et d’amertume devant l’attitude finale de La Zarra, car la déception n’excuse pas tout. Et surtout, un questionnement. Comment la France est t-elle passée à ce point d’une Eurovision dont elle voyait l’organisation en Angleterre comme le symbole d’une victoire annoncée ?
Évidemment, il est facile de refaire l’histoire après coup, d’autant plus quand on a défendu la candidature française avec passion, sincérité et conviction. Mais nul échec ne peut faire l’économie d’une remise en question indispensable pour remettre la France sur de bons rails.
1- Un excès de confiance en la victoire et un manque d’humilité dans la reconnaissance de l’échec ?
Dès l’annonce de la candidature de La Zarra, France 2 a exprimé haut et fort la volonté affichée, si ce n’est la certitude, de “ramener la coupe à la maison” pour la première fois en 46 ans. Toute la saison durant, le télédiffuseur n’a cessé de véhiculer ce message, s’offrant même certaines audaces, comme celle de déclarer que l’ultra-favorite et eurolégende Loreen ne lui faisait pas peur. Avec le résultat que l’on sait au final … À force d’avoir affiché la certitude de la victoire à rebours des signaux envoyés par les faits, l’ambition légitime et évidemment partagée n’est-elle pas devenue inconsciemment une forme d’orgueil déplacé eu égard à la réalité de nos chances ?
Dans cette lignée, les réactions fassent à la défaite ont de quoi surprendre, la cheffe de délégation et l’artiste déclarant respectivement qu’“on repart gagnant” et que “La Zarra repart gagnante aujourd’hui”, en dépit d’une seizième place aux antipodes de l’ambition initiale. Depuis, silence radio, jusqu’à une interview récente de Stéphane Sitbon-Gomez, directeur des programmes de France Télévisions, à Télé Loisirs. Interrogé sur l’Eurovision 2023, il admet la déception tant par rapport au résultat inattendu qu’envers l’attitude de La Zarra, tout en gardant pour objectif une prochaine victoire.
Il ajoute toutefois “On a tenté sans succès toutes les combinaisons donc ça signifie qu’il y a des raisons plus profondes pour lesquelles un artiste français n’arrive pas à convaincre le public européen …” Au-delà du caractère discutable de la première affirmation, dire à demi-mot qu’un désamour envers la France serait la raison intrinsèque de l’échec des candidats français à l’Eurovision n’est-il pas trop facile … et très franco-français dans le rapport à la défaite ?
2- Une overdose de French Touch ?
Loin de moi l’idée de défendre un formatage anglo-saxon, là où un eurotube doit être représentatif de la scène musicale de son pays (ce qui est loin d’être le cas de tous, nous en conviendrons).
Si la France a par le passé exploré plusieurs pistes, le pays est resté sur le succès miracle de Barbara Pravi et sa proposition inscrite dans la lignée d’une chanson française qui participe à la vitrine de la France au niveau international. Une artiste et une performance souvent ramenées à l’icône Edith Piaf, Immense parmi les Immenses, dont le seul nom et deux-trois notes suffisent à faire briller les yeux des européens et des internationaux.
Ajouté à cela le succès indéniable de la French Touch au Junior (avec une deuxième victoire qui a déjoué tous les pronostics), dont elle s’est départie avec la proposition électro-breizh d’Alvan et Ahez (pour le résultat qu’on connaît), France 2 a depuis érigé la touche française en marque de fabrique répondant aux attentes des européens. Mais le concours adulte n’est pas le Junior, et il est difficile de dupliquer un modèle sur un terrain qui n’a rien à voir.
Du béret érigé en bonnet phryigien de notre Marianne eurovisionesque au “Vais-je réussir à changer la grande France”, avec le drapeau tricolore illuminant la scène de la M&S Bank Arena, la touche française était partout à une Tour Eiffel près (uffa). Et si le cliché assumé avait engendré une overdose ? Si la French Touch façon Eurovision 2023, c’était tout sauf des clichés touristiques à la française ?
3- Une proposition trop formatée Eurovision … mais avec une vision erronée du concours ?
À la première écoute d’Evidemment – dont je garde la conviction profonde qu’il s’agit d’un titre de qualité – il est évident que le titre a été taillé sur mesure pour le concours. De l’orchestration grandiloquente (avec une intro jamesbondienne qui évoque Conchita Wurst) à la note finale sur “la Grande France”, la production s’est voulue “formatée Eurovision”. Un parti pris qu’a d’ailleurs toujours assumé France 2. C’est oublier toutefois qu’en plusieurs années, le concours a connu une évolution spectaculaire, tant en termes de production que de diversification musicale.
Là où une ballade sirupeuse et un titre scandic/euro pop étaient les marqueurs d’une victoire jusqu’à la fin des années 2000, les temps ont depuis changé. Remporter l’Eurovision n’est plus qu’une question de style, mais une question d’accroche et de marquant au-delà du style. À avoir voulu formater un titre en vue de la victoire, là où le formatage n’en est justement plus la garantie, n’y a t-on pas perdu en sincérité ? De même, n’a t-on pas construit la chanson et la candidature françaises au regard de standards erronés de l’Eurovision en 2023 ? Avec son meilleur rendu live que télévisuel, la scénographie n’en serait-elle pas le témoignage au détriment d’une réelle vision du concours ?
4- Conquérir la France avant de conquérir l’Europe, un écueil français à l’Eurovision ?
Nul n’est prophète en son pays … Mais si ce sont les européens (et désormais les internationaux) qui élisent le vainqueur de l’Eurovision, il est d’abord essentiel d’installer la candidature dans le pays afin que ce dernier la porte ensuite à l’Eurovision. Pour cela, une médiatisation de l’artiste et une diffusion accrue du titre auprès des français sont des étapes incontournables. Alexandra Redde-Amiel n’a t-elle d’ailleurs pas dit que le soutien des français et des médias étaient des conditions indispensables à la victoire ?
Alors même que la candidature de La Zarra avait tout pour faire l’évènement – et l’annonce de janvier avait offert de belles promesses médiatiques en ce sens – celle-ci ne l’a finalement été qu’au gré des polémiques, alors qu’il y avait un boulevard pour vendre la candidature française à l’Eurovision 2023.
S’agissant du titre, et en dépit du fait qu’Évidemment ait été accepté par toutes les radios – ce qui était exceptionnel – la chanson n’a finalement connu qu’une diffusion confidentielle en France, en témoignent des charts aux antipodes de ceux d’Amir, Natasha St-Pier ou de Jessy Matador à l’époque. L’attitude de notre représentante n’ayant pas aidé, radios et médias opèrent un boycott massif du titre depuis l’affaire du “toz”.
Certes, la campagne promotionnelle reste aussi dépendante d’un champ médiatique majoritairement porté sur une image déformée, péjorative, voire carrément hostile de l’Eurovision. Mais le travail de promotion en France restant un préalable indispensable à la conquête du public européen, l’a t-on suffisamment jouée cette année ?
5- L’Eurovision 2023, un marathon devenu un 100 mètres par manque de préparation ?
La Zarra est une artiste pétrie de talent, au naturel désarmant, sincère et adorable avec les eurofans. Ce n’est pas complaisance de le dire, tous ceux qui l’ont rencontré aux previews et à Liverpool peuvent en témoigner.
L’artiste est également une diva, assumée. Au-delà de ses qualités artistiques, certaines choses nous ont assurément échappé, quoiqu’elles furent perceptibles à certains égards de notre point de vue. Tout comme bien des coulisses nous échappent s’agissant de personnalités médiatiques appréciées.
Sur le plan de la préparation, participer à l’Eurovision est un véritable marathon, une course de fond aussi bien épuisante pour le physique que pour les nerfs. L’affronter n’est pas une sinécure, et bien des eurostars en ont témoigné par le passé, à commencer par Barbara Pravi elle-même, qui évoquait le sujet en toute sincérité dans une interview à Fanzine en décembre 2021. Avoir conscience de cela, être prêt et se préparer à être embarqué dans un tel tourbillon – avec ce qu’il comporte d’ondes positives et d’énergies négatives, avoir l’expérience du live et de la scène pour, autant d’éléments indispensables pour tenir le cap jusqu’à l’Eurovision. Furent-ils artistiques ou personnels, les feux étaient-ils réellement au vert en 2023 ?
6- La France a t-elle les moyens humains et financiers de son ambition annoncée ?
Sujet épineux. La délégation et la présidence de France Télévisions assument leur volonté de gagner – ce qui n’a pas toujours été le cas -, et le groupe audiovisuel public français est l’un des principaux en Europe, en témoignent son importante contribution financière au concours et son statut de membre du BIG 5.
En dépit de l’objectif annoncé, et au vu de la marche gigantesque que représente une route vers la victoire à l’Eurovision, France 2 dispose t-elle des moyens suffisants ? À notre connaissance, la délégation reste assez restreinte de par sa taille de même que, par le passé, le télédiffuseur n’a pas toujours été le plus généreux en termes de ressources financières dédiées à l’Eurovision.
Une candidature à l’Eurovision, ce sont autant de cases constitutives d’une dense to do list. Communication, réseaux sociaux, évènementiel, euro concerts et campagne promotionnelle en Europe, tournée des radios et des plateaux télé, rencontre du public, affichage dans l’espace public (comme cela a été fait à merveille pour Drag Race France saison 1), … Autant d’éléments indispensables pour emmener notre pays à “faire France” autour de notre candidat à l’Eurovision, jusqu’à l’accompagner sur le toit du monde. Les moyens financiers et humains adéquats sont d’autant plus indispensables pour mener cette vaste opération à bien.
Au-delà de la volonté et de la conviction, ne serait-il pas temps de mettre des moyens à la hauteur de nos ambitions ?
Cet édito est sans doute prolixe, mais nécessaire.
Je reconnais le travail, la volonté, l’engagement. Je connais suffisamment l’Eurovision pour affirmer que l’alliance des trois ne suffit parfois pas à décrocher la victoire ou le classement espéré (l’Espagne en est par exemple la preuve parfaite cette année). Je suis parfaitement conscient des difficultés qui ont émaillé une aventure qui semble avoir parfois adopté les atours d’un chemin de croix. Pour un résultat final certes sévère, mais dont on ne peut que prendre acte.
Je ne jette pas la pierre et je ne jette nulle opprobre. Je ne retourne pas ma veste, et bien au contraire. Notre soutien à la candidature française, nous l’assumons sans le renier. Nous avons cru en La Zarra et en la force d’Évidemment, tout comme nous avons cru en l’ambition et en la volonté affichées.
Mais face à l’échec et à la déception, il est indispensable de poser des questions sur le pourquoi du comment a posteriori. Sans cela, il sera impossible de dégager l’horizon, destination l’Eurovision 2024.
Crédits : Corinne Cumming | UER
Pourquoi ça a foiré ? Hummm bonne question et personne n’a vraiment la réponse je pense et c’est pour cela que la France ne gagne plus j’ai le sentiment qu’elle ne comprend plus vraiment ce concours alors qu’elle a visiblement bien compris le junior c’est amusant d’ailleurs cet écart. J’ai aussi l’impression que le côté disco de la chanson n’a pas énormément plu ou a dérouté celles et ceux qui ne s’attendaient pas à voir la chanson partir dans cette direction ?
Essayons peut-être d’analyser les chansons en français qui ont plu et pourquoi ? Pravi, Gjon’s Tears, Amir, Natacha St Pier, Corinne Hermès, Amina, Joëlle Ursull, Sandra Kim, Patrick Fiori, Sandrine François
Existe-t-il un dénominateur commun malgré le fait qu’il y a 40 ans entre certaines chansons ? Moi quand j’écoute ces chansons que j’aime toutes sauf la belge ce qui me plaît c’est qu’elle sont incarnées et donnent toutes l’impression que l’on nous raconte une histoire même si on ne comprend pas le français. Et vous qu’en pensez vous ? Peut-être que La Zarra était trop en pression pour donner l’impression de nous raconter son histoire et on y a vu surtout une personne en panique
Je vois pas comme toi …du tout
Comme si c était important
Peu importe chacun son opinion
Très bon article Rémi… comme d habitude
Mais à mes yeux on n oublie toujours que 15eme c est pas si mal que ça
En tous cas honorable
Quant on jvoit les allemands derniers … à n y rien comprendre d ailleurs
Bref tout résultat est honorable . Tout le monde ne peut gagner
Non, 15ème ou dernier c’est pareil! Passé le top 10 où se concentrent 75% des points, tu fais parti des plus mauvais et ça ne se joue plus qu’à quelques points !
Des mauvaises langues disent que c’ est mon drapeau FRANCE 12 POINTS qui porte malheur. Qu’ ils le prouvent ou se taisent à jamais. J’ en suis fier.
En tout cas, les animateurs du concours ne se sont pas prives de se moquer continuellement de notre langue….
La faute à la “grande France ” ?
Bonjour. Vous pointez un peu la quadrature du cercle ; comment envoyer une chanson qui convainc à la fois le public et les critiques français et à la fois susceptible de gagner l’Eurovision, puisque l’Eurovision représente un peu ce que le public et les critiques français n’aiment pas et que ce que le public et les critiques français aiment ne fonctionne généralement pas à l’Eurovision ?
J’avais donné mon avis fin avril, lors du “conseil de classe d’EAQ” pour dire que la chanson française me semblait trop formatée, trop peu spontanée et sans émotion, reposant trop sur des clichés (avec en plus un texte sans queue ni tête), pour me séduire (et donc qu’elle ne méritait pas de bien se classer au concours). Je ne pense pas être très clairvoyant s’agissant de l’Eurovision, car je ne comprends toujours pas la victoire suédoise et le bon classement italien avec des chansons que je juge sans intérêt ou le score espagnol avec une chanson sublime, mais j’ai immédiatement accroché à la proposition finlandaise qui a eu les faveurs du télévote, donc je ne suis pas complètement à l’ouest. Et surtout, j’avais écrit qu’à mes yeux, la chanson française ne méritait pas de figurer dans le top 10 (si ce n’est en 10ème place), malgré la “hype” du moment notamment sur ce site.
Et puis, un autre truc qui m’avait frappé et que j’avais pointé ici, c’était les commentaires en réaction à la prestation de La Zarra dans une émission de France 5 (dont je ne me souviens plus du nom) où les “Eurofans” français ne se gênaient pas pour dire que la chanteuse devrait être un peu plus comme-ça ou un peu moins comme-ci, que sa tenue devrait être plus ou moins quelque chose, que les choristes devraient plus ou moins présents, etc. bref, des commentaires de café des sports sur la composition de l’équipe de France et les qualités de l’entraineur. Je n’ai jamais vu ou lu cela sur des prestations d’artistes de la chanson et ça me paraît sidérant. A-t-on jamais entendu des commentateurs dire que Brel, Aznavour, Johnny Halliday, Lio ou Indila devrait modifier ceci ou cela dans leur prestation ? Serait-ce même seulement admissible ? Ce sont des artistes, ils proposent leur univers artistique et on y adhère ou pas, mais on ne leur demande pas de changer tel ou tel aspect pour mieux convenir à son goût (certes, les producteurs le font pour des raisons commerciales, mais ils ne revendiquent pas d’être des artistes, juste des marchands). Je comprends que dans ces conditions, peu d’artistes confirmés ou en voie de l’être acceptent de se prêter au jeu de représenter la France à l’Eurovision.
Il me semble que la chanson de Barbara Pravi de 2021 n’a pas non plus bénéficié d’un soutien ou d’un engouement médiatique très fort en France, mais elle avait au moins une légitimité, elle avait été choisie par les téléspectateurs français qui avaient regardé la sélection nationale. Pour moi, je le redis, la délégation française ne devrait pas viser la victoire, mais rechercher une chanson dont le public français pourrait être fier et qu’il pourrait soutenir, quitte à “floper” au concours (comme Alvan et Ahez, dont le mauvais classement a pourtant été beaucoup moins mal vécu que le classement moyen de La Zarra). Il faut d’abord que les Français aient envie de défendre la proposition qui les représente au concours pour espérer quoi que ce soit en termes de classement final (dont j’ai envie de dire que ce n’est pas la priorité, puisque ce n’est pas un gage de qualité, on le voit bien cette année). Sinon, ça sert à rien de participer, demandons aux Suédois de faire la proposition française comme en 2020 et on économisera de l’argent et de la fierté nationale blessée…
On va être honnête, ça n’a vraiment pas fonctionné.
Et pourtant je pense que ça a bien commencé non ? La chanson plaît à beaucoup de monde et (quasiment) tout le monde mettait la France dans le top 10, top 5 et même top 3 pour les plus optimistes (dont je fais partie j’avoue). Bon, alors.. qu’est ce qui n’a pas marché ? La mise en scène je pense :
Premièrement, vouloir jucher La Zarra sur une plateforme de 3 mètres de hauteur comme si elle était la tour Eiffel n’est peut-être l’idée la plus brillante de 2023, c’est sympa, ça innove mais les mouvements restaient quand même assez limités.. Ensuite, le drapeau français qui s’illumine derrière la chanteuse ne serait-il pas un peu.. orgueilleux ? En tant que français derrière mon écran, j’avais l’impression qu’on essayait de “dominer” les autres nations avec notre chanson.
Ajoutons à ça le fameux doigt d’honneur qui restera dans les annales et le départ de La Zarra de la Green room pendant le vote et nous auront la classe à la française dans toute sa splendeur…
Je ne renie pas avoir adoré la chanson ET la chanteuse, je suis simplement déçu par ce qui s’est passé durant la prestation et durant le vote…
J’espère réellement que ce ne sera pas aussi décevant l’année prochaine…
Merci pour l’édito. De mon côté je pense que france.tv devrait davantage jouer sur le temps long, et ça commence par installer dans le marbre une sélection nationale. D’une part ça fait faire vivre la marque Eurovision (sinon tant de moyen pour une seule soirée…), d’autre part il faut fédérer en amont, ce qui n’est pas possible avec des petites conférences de presse et des passages radio çà et là comme avec La Zarra… Le modèle de Destination Eurovision était vraiment un super souvenir pour moi : 3 soirées, la découverte de nombreux artistes mais aussi la présence de plus expérimentés, et même si les résultats finaux étaient un peu mitigés ça avait le mérite de moderniser le concours en France et peut être qu’on aurait commencé à avoir du plus gros calibre dans les candidats.
En tout cas les sélections internes sont à proscrire surtout quand on a que l’artiste !!! (même si on pense avoir le must du must on le met à l’épreuve, on se souvient du flop annoncé de Tom Leeb).
Je ne sais pas si c’est une question de moyens qu’on ait pas une sélection digne de ce nom (on se souvient aussi des audiences abyssales de ECVQD et malgré le miracle Pravi, la sélection était d’une qualité discutable), si ARA a un peu trop la main mise sur tout le processus ou une toute autre raison.
J’en entends beaucoup théoriser sur ce qu’il faut précisément envoyer, mais à un moment on prend toutes les propositions intéressantes, on les met sur le grill et si ça marche, ça marche et sinon beh ce sera pour une prochaine fois. À chaque fois on tire des conclusions hâtives du genre : ce style de musique les européens n’aiment pas, mais non : cette chanson performée par tel artiste la mayonnaise n’a pas pris. Et je redis encore qu’on ne sent la puissance d’une chanson que pendant un live en mode compétition sinon on prend de trop gros risques. Dire que tel type de chanson fonctionne bien ou mal pour l’Eurovision est totalement absurde car chaque chanson est unique ! Et il suffit de regarder les derniers gagnants : pleins de styles différents mais une chanson et interprétation exceptionnelle.
Pour notre pauvre La Zarra, c’est vraiment dommage qu’on en soit arrivé là, ça ne m’empêchera pas de l’écouter encore parce que j’adorais déjà son univers et j’ai mes places de concert. Mais je dois noter que “Évidemment” n’est plus dans ma playlist et que le formatage de la chanson ne colle pas trop à son univers originel… Je ne sais pas qu’est ce qu’ils avaient en tête pour faire un truc aussi lisse mais faut vraiment faire changer l’idée qu’il y a une recette magique pour gagner.
Enfin bon, sur ces belles paroles, je pense qu’il y a une belle couche d’opacité sur tous les paramètres avec lesquels la sélection française doit composer. Et en conclusion, pour performer il faut “juste” une très bonne chanson et un très bon artiste, à nous de les trouver. Et peut-être qu’il y aura meilleur chez les autres et il faudra réessayer. J’espère juste que les déboires des deux dernières années ne découragent pas de potentiels candidats…
Analyse intelligente mais subjective ! Plus que prendre du recul, il faudrait prendre de la hauteur !
Le recul nous permet d’analyser les choses en restant sur le même niveau horizontal de passion alors que la prise de hauteur nous détache du sentiment de base et nous donne accès à la nécessaire objectivité dépassionnée…
En regardant d’en haut , on doit d’abord admettre que la chanson , la mise en scène et la prestation étaient banales. Une chanson pop-variété chantée avec une voix à peine perceptible ne pouvait pas se démarquer au milieu de chansons pop , même classiques, où la voix faisait largement la différence (Italie, Suède). Une mise en scène déjà vue (Ukraine, Australie) ne pouvait pas surprendre au milieu de mises en scène originales ( Suède, Finlande, Israël). Une interprétation sans pathos ou joie ne pouvait pas accrocher contrairement aux pays du top 5 final….
Bref, le doigt d’honneur d’après vote n’est pas responsable de l’échec de La Zarra.
C’est le choix d’une mauvaise chanson et d’une mauvaise mise en scène pour le concours qui sont discutables.
La déception est à la hauteur des faux espoirs des fans qui ont trop souvent un regard nombriliste voire ringard sur le succès supposé de leur représentant !
Pour gagner , il faut choisir une chanson qui est susceptible de plaire à la grande variété des publics européens et non pas aux seuls français !
La subjectivité est en effet complètement assumée ! C’est d’ailleurs pour cela que je m’exprime ici au “je” et non au “nous”.
Je crois qu’il y a un ras le bol du top five. L’Italie s’en échappe, s’imprégnant de la mythique culture latine et aussi du Melodifestivalen
L’Espagne a eu une lueur d’espoir et espère rester première du Top 250 diffusé le 31 décembre sur ESC radio. Ce pays n’a plus gagné depuis 1969, délai hyper long pour se souhaiter une nouvelle victoire.
Le Royaume-Uni a brillé grâce à Sam RYDER mais a vite descendu l’année suivante.
L’Allemagne est accolée à la dernière place. Et le groupe allemand ne correspond pas au style des invités d’Andrea KIEWEL.
La France reçoit au mois de mai le Festival de Cannes et fin mai le Tournoi de Roland Garros, peut-être qu’il y a des pays jaloux de ces festivités et sanctionnent le pays. A propos de pays “Petit pays” le lundi 26 juin en clair sur France 3.
Comment sauver la France ? Il faudrait proposer une chanson qui s’annoncerait inoubliable à chaque écoute, l’interpréter modestement donc éviter les faux airs de supériorité qu’a montré La Zarra, une chanson avec une chorégraphie originale inédite sans artifices, il faudrait établir un panel entre professionnels et public, donc je sollicite le retour de “Eurovision France : c’est vous qui décidez”. Eviter tout langage local, cela n’a réussi ni à Amaury VASSILI, ni à Dan Ar Braz et l’héritage des Celtes et encore moins à Alvan et Ahez. Etre présent dans tous les galas des previews est une nécessité. La France serait ainsi moins sanctionnée. Oter les caprices, eviter tout signe malencontreux. La France doit donc corriger tout ce qui s’est passé pour proposer l’année prochaine et dans l’avenir une sélection plus efficace.
Évidemment ne méritait pas cette place pour l Eurovision 2023 mais si elle était sortie non pour le concours je n aurais pas accroché avec cette chanson. La preuve ont demande au jury et public de voter pour nous alors que la plupart de nos représentants ne font pas un succès chez nous avec leur chanson !!! Après depuis des années ont va casser la baraque avec la chorégraphie et malheureusement le jour J c est vraiment pas ouf . Les français donneurs de leçons et bouffie d orgueil. Après le style de la chanson c est simple une bonne chanson bien interprété la preuve l Italie, ils viennent pas avec une nappe à carreaux et un plat de spaghetti et ils font de bons résultats.
Je n’ai jamais compris la hype autour de “Evidemment”. La chanson n’est pas mauvaise mais ça manque d’authenticité. La délégation a sélectionné l’artiste avant même que la chanson soit finalisée et c’est un problème.
Ensuite, je trouve prétentieux de vouloir promouvoir “la grande France” . La délégation devrait apprendre à ne pas trop forcer avec les clichés pour ne pas donner un air hautain.
Pour moi, on mérite la 16e place par rapport à la concurrence. Il y avait largement pire mais il faut avouer que cette chanson ne faisait pas le poids face aux autres titres plus authentiques ou originaux.
Suite à toute la haine que reçoit La Zarra, je me demande si nos artistes ne vont pas vouloir tourner le dos au concours par peur de subir la même haine. Par exemple, on sait que Slimane était un potentiel représentant, est-ce qu’il va tout de même vouloir se produire à l’Eurovision malgré ce qu’il s’est passé cette année ?
Baaaaahh en vrai pour le coup depuis la fin du concours ce n’est pas le concours qui est incriminé en soi mais son attitude supposée (d’ailleurs le shitstorm aurait-il été le même si c’était un mec blanc? hum, pas sûr…), donc pour le coup je pense que ça n’aura pas beaucoup d’incidence sur un.e représentant.e l’année prochaine.
Merci beaucoup pour cet édito aussi complet qu’intéresant.
Mon ressenti est qu’Alexandra Redde-Amiel a fait son temps et même si elle devrait encore rester dans l’équipe du Junior, une autre personne devrait prendre sa place au seine de la délégation française.
L’Europe s’attend vraiment à quelque chose de spécifique de notre part, quelque chose qui peut à la fois être un succès en France qu’à l’étranger.
Nous avions la preuve l’an dernier que l’Europe ne nous aimait pas pour nos choix risqués, nous avons maintenant la preuve qu’elle n’apprécie pas les choix trop calculés comme Evidemment.
C’est ce qui fait la différence avec le Junior. Dès son retour, la France opte pour des uptempos enfantins et frais, mais authentiques et efficaces. C’est une recette qui peut gonfler certains mais cela marche. On ne peut pas accuser la France du Junior de rester dans son précarré au Junior puis porter aux nues la Suède qui reste dans sa pop formatée, l’Ukraine dans ses contributions aux accents folkloriques ou l’Italie dans sa personnalité transalpine (pouvant se traduire dans plusieurs styles).
Je ne pense pas qu’il faille aller aussi loin en etrme de style. Nous devons présenter soit une ballade émotionnellement puissante et sincère (à la Voilà) ou une chanson French pop fraîche que les radios s’arracheraient (comme J’ai Cherché).
Ca va être compliqué de mettre en place un festival à la Sanremo, à la Melodifestivalen ou à la Benidorm mais pourquoi ne pas tenter un summercamp d’écriture de chansons à proposer par la suite à des artistes calibrés pour une compétition ? Cela a plutôt bien marché avec la Suisse en 2021.
En espérant que la délégation lira cet article et nos commentaires, je vous souhaite une bonne semaine.
Merci pour cet édito.
Quand j’ai vu l’article de Wiwibloggs sur La Zarra hier, je me suis demandée quand EAQ allait s’exprimer.
Je ne suis pas forcément d’accord sur tous les points, et j’aurai peut-être un ou des trucs à ajouter, mais je ne pense pas que ce soit très utile ici.
Un point qui reste positif que j’ai à dire : je pense que la délégation française a les ressources mentales pour remonter la pente vers le top 10. Elle nous a prouver à plusieurs reprises qui savent s’adapter. Après je ne dirais pas que l’adaptation qui en ressort est parfaite ou me convient, mais que j’apprécie ou pas les changements, il y a toujours eu des changements avec une prise en compte des avis.
J’attends donc la sélection nationale de l’année prochaine 😉 …
Comment ça a pu se foirer ? C’est très simple.
La chanson : Elle n’était pas bonne, tout simplement. Pas nulle non plus, mais juste… moyenne. Avec un mixage plat, sans relief… bref, français quoi.
Le chant : Dès la doublette préparty de Madrid + C à vous, on a vu que ça allait être pas compliqué, mais fragile dirons-nous.
La mise en scène : L’archétype même de la fausse bonne idée, elle est là mais c’est tout. Et puis ce drapeau au climax semble dire au spectateur (qui ne parle pas français pour 95% du public) “regardez-nous : nous c’est la france et on est mieux que vous”.
La délégation : Bouffie d’orgueil, beaucoup d’effets annonce pour très peu de résultat. La moindre apparition de ARA me file des boutons.
La concurrence : Il y avait plus propre, plus ambitieux, plus excitant, plus produit, plus moderne. Pas étonnant.
La Zarra elle-même ? Baaaahhh elle a fait du mieux qu’elle a pu et est passée par beaucoup de moods, ça a été un wild ride pour elle aussi. Mais son petit geste fut un peu malencontreux.
Tout ça pour dire que très vite, dès la préparty de Madrid j’ai senti un résultat à la Bilal, en mode “tout ça pour ça”… Ca me fatigue d’avoir eu raison.
Bref il y a du travail du côté de la délégation parce que sinon je sens une nouvelle double décénnie de vache maigres qui va arriver. Oui oui, comme après l’ex-aequo d’Amina, oui oui.
Bonjour. ….je suis vraiment content que vous parliez d’Amina car j’ai vraiment l’impression que cette excellente chanson a été oubliée . ..et pour moi elle reste la dernière victoire française malgré ce règlement à la “con” …..je reste également sur la très belle prestation sincère et émotionnelle de Barbara Pravi. …pour Évidemment la chanson était excellente belle orchestration et j,y croyais au top 5….j’étais très content pour l’italien marco Mengoni mais lui aussi méritait encore mieux. …alors le problème est que La Suède, qui n’a fait qu’un copié collé de euphoria avait déjà gagné depuis qu’elle a été sélectionnée et c’est là le vrai problème. ..il faut commencer par cette piste. …cordialement Jean-claude
Non 1993, 1995, 2001 et 2002 n ont pas été des vaches maigres. En fait de 1992 a 1995 on a fait que des top 10. Les mauvais résultats commencent vraiment en 1998 avec l introduction du televote.
Bonjour. ….on peut rajouter sur ces années top 10, 1990 avec Joëlle Ursull qui a fini 2ème et surtout 1991 avec la très belle Amina et sa chanson tout aussi belle qui a fini 1ère exequo mais le règlement en a décidé autrement ….pour moi c’est l’une des plus belles chansons françaises à l’Eurovision avec Natacha St Pierre et Barbara Pravi. ..cordialement. Jean-claude