Regarde-toi
Relève la tête, te laisse pas tirer vers le bas
Oublie d’où tu viens, où tu vas, autour de toi
Tout va trop vite, tu ne sais même plus où tu vas, t’es qué-blo tu fais les cent pas

Fais le vide, non ne dors pas
Fais le vide, fais-le comme ça
Majeur en l’air, une bouffée d’air tu traces comme s’il n’y avait que toi
Fais le vide, ne les écoute pas
Ceux qui parlent et qui n’avancent pas
Ferme les yeux et danse en levant le doigt

2019 a été l’année Bilal Hassani. Regardez-un peu : une seizième place à l’Eurovision 2019 sous les couleurs de la France avec Roi, un premier album intitulé Kingdom et la réédition qui va avec, une tournée à travers l’Hexagone qui s’achèvera au Trianon à Paris le 27 septembre prochain, un Olympia complet (diffusé au mois d’avril sur France 2), une autobiographie intitulée Singulier à seulement vingt ans, et pour couronner le tout, un Olympia Awards du concert de l’année et le NRJ Music Awards de la révélation francophone. Sans compter les millions de vues que comptent ses singles Jaloux, Fais beleck ou Je danse encore sur YouTube, où il a dépassé le million d’abonnés.

Une carrière à la vitesse grand V pour celui qui avait franchi la scène de The Voice Kids en 2015 avant de devenir l’un des youtubeurs stars de la génération des millenials et de vivre la carrière musicale qu’on lui connaît. On aurait alors pu penser qu’une petite pause serait bien méritée après une année aussi riche en action et en émotions. Que nenni ! C’est bien mal connaître notre Roi déjà en préparation de son deuxième album (prévu pour la fin de l’année 2020) qui nous a fait découvrir durant le confinement son nouveau single : Fais le vide.

De Roi j’aimais le message, mais je n’adhérais point à la composition et à la musicalité. De même, je ne suis d’ordinaire guère sensible au talent et à l’univers musical de Bilal Hassani. C’est donc par simple curiosité et presque par hasard que je me suis retrouvé à écouter sans convictions le nouveau single du jeune artiste sur Spotify. Et pourtant, l’improbable se produisit, puisque … J’A-DO-RE !!!

Wouh-ouh (wouh-ouh), Wouh-ouh (wouh-oh-oh), Wouh-ouh-ouh-ouh-ouh-ouh. C’est bien simple : depuis jeudi dernier, j’ai écouté le titre environ 253 fois et ne cesse de le mettre en boucle dans mes nouvelles airpods not airpods dont je n’ai pas encore saisi le mode de charge. Wouh-ouh-ouh-ouh-ouh-ouh… Enregistré avec ses proches, des ami.e.s stars et ses fans en visio pendant le confinement, le clip de Fais le vide est à la hauteur du titre : une véritable bouffée d’air frais, extrêmement enthousiasmant et pétillant, optimiste, de ces chansons qui vous invitent à lâcher prise et à danser trois minutes et vingt-huit secondes durant, le temps de vous déconnecter de ces soucis sans lesquels il y a philosophie. Il suffit d’écouter les premières notes pour n’avoir qu’une seule envie : se précipiter sur la piste de la danse (le tapis du séjour et la salle de bains feront l’affaire en attendant la réouverture des boîtes) et se déhancher au son de ce titre énergique et solaire qui respire le positif. Et pile poil le style musical qui lui aurait le mieux collé à la peau pour le concours.

La résonance avec le vécu de Bilal est évidente, celui d’un garçon brimé par ses camarades de classe, celui d’un jeune homme victime d’un incroyable déferlement de haine de la part de courageux haters qui pullulent derrière d’anonymes pseudos sur les réseaux sociaux. Tout cela pourquoi ? Parce qu’il se trouve en rupture avec les codes de la masculinité tels qu’ils sont imposés et véhiculés par une société encore largement dominée par des stéréotypes et des pseudo-normes auto-érigées qui exercent leur violence sur celles et ceux qui n’y répondent pas. Tu seras viril mon kid chante Eddy de Pretto (H. S. : si jamais tu veux représenter la France à l’Eurovision …) pour démontrer l’imbécilité de ces injonctions qui ont la vie dure. Et bien non : qui que tu aimes, qui que tu sois, quoi que tu portes sur ta tête ou quoi que tu fasses avec ton corps, libre à toi, kid, et sois en fier.e comme l’est Bilal Hassani (d’ailleurs désigné comme l’une des trente personnalités LGBTQI+ de l’année 2019 en France par le magazine Têtu). À ces insipides haters qui lui ont fait l’enfer, Bilal répond par ce titre, « majeur en l’air », car à perdre de l’énergie avec les personnes toxiques, autant regarder droit devant soi, la tête haute, et avancer. À vivre, autant consacrer son énergie au moment présent et à la poursuite de son chemin, car envers celles et ceux qui vous dénigrent, « L’ignorance est le plus grand des mépris ». Et Fais le vide le meilleur phoque possible que Bilal Hassani puisse adresser à ses détracteurs et offrir tant à ses fans qu’aux auditeurs lambda, hashtag Proud.