Le tour de la Francophonie se poursuit pour l’EAQ, avec aujourd’hui, une étape en Belgique, et non des moindres, puisque ce n’est ni plus ni moins de l’une des plus grandes eurostars francophones de l’histoire du concours que vous allez lire l’interview aujourd’hui.

Il faut y croire, j'ai moi aussi
Des flashs d'espoir, des insomnies
Mais au total, à l'addition
J'aime l'horizon

Trente quatre ans exactement que son pays – la Belgique – attend une deuxième victoire et un.e successeur.e à celle qui, un soir de mai 1986, chanta à l’Europe entière son amour de la vie alors qu’elle n’était âgée que de treize ans. Ladies And Gentlemen, nous vous présentons … Sandra Kim !

La prestation en images :

Classement : vainqueure de l’Eurovision 1986 (176 points)

C’est par téléphone depuis sa Flandre d’adoption que Sandra Kim nous a fait l’immense honneur de nous accorder cet entretien.

Vous êtes un mythe pour les belges et les eurofans, puisque vous êtes la première et seule belge, la plus jeune artiste et l’une des dernières francophones à avoir gagné le concours.

Avec Céline Dion, après.

Qu’est-ce que ça fait d’avoir cette casquette ?

Je ne vais pas dire que cela ne me fait pas grand-chose, mais j’ai plus tendance à dire que je suis fière d’avoir remporté l’Eurovision pour la Belgique, parce que j’adore notre petit pays. Et puis c’est vrai que c’était un rêve pour eux. Je suppose qu’il y aura d’autres gagnants dans les années à venir, parce que la Belgique a toujours de très bonnes chansons ces dernières années avec Loïc Nottet ou Blanche. Elles manquent juste un petit peu de chance face à des pays comme ceux d’Europe de l’Est, mais elles ont marqué le concours. Je pense qu’un jour, il y aura un autre gagnant, et ce sera bien pour moi, parce que c’est une casquette assez lourde à porter. C’est-à-dire que pour tout ce qui se rapporte à l’Eurovision, c’est toujours chez moi qu’on vient sonner et demander mon avis. Après trente-quatre ans, je ne vais pas dire que c’est pesant, mais c’est fatigant de répéter toujours la même chose. Je ne sais plus que faire (rires). Les souvenirs commencent à s’estomper, évidemment, parce que j’étais toute petite lorsque j’ai gagné l’Eurovision. C’était une grande joie, évidemment, mais je ne suis pas non plus une grande fan du concours. Cela ne me fait ni chaud ni froid : c’est juste une fierté et puis voilà. En tout cas, je ne suis pas une aussi grande fan que vous d’après ce que je comprends (rires).

Vous participez au concours au tout début de votre carrière, vous aviez à ce moment-là treize ans, et comment se retrouve t-on alors à participer à l’Eurovision ?

Je chantais pas mal quand j’étais plus jeune. J’ai commencé à faire des concours dès l’âge de huit ou neuf ans. En participant à tous ces petits concours de quartier et de jeunes talents dans la région liégeoise, où je vivais à l’époque, je me suis retrouvée au festival de la chanson italienne de Liège, qui était assez réputé à l’époque. J’y ai rencontré mon ex-manager de l’époque, Marino, qui a écrit le texte de J’aime la vie, et il m’a proposé de travailler avec lui. C’était une opportunité pour moi. Évidemment, mes parents étaient un peu méfiants au départ. C’était ce que je voulais faire et ce que je ne voulais pas faire en même temps. Je m’explique : cela n’a jamais été une vocation pour moi de devenir chanteuse professionnelle. J’aimais chanter comme un enfant aime jouer au foot ou au tennis. J’ai accepté de chanter, de faire plaisir à mon entourage, parce que mon père était musicien. Il jouait dans un groupe et on baignait dans la musique, donc ça coulait de source. Mais en faire une carrière et aller à l’Eurovision, ce n’est pas du tout ce qu’on pensait faire. C’était une opportunité, donc on a envoyé une cassette à la RTBF, et ils ont retenu la chanson. J’ai été prise dans une espèce de concours, où il y avait dix chansons à proposer au public, qui a voté pour moi.

À défaut de vouloir devenir chanteuse professionnelle, à quoi aspiriez-vous ?

Hôtesse de l’air. J’adore voyager à la base, cela a toujours été mon rêve d’aller loin et de voir de nouveaux horizons. Vous savez, en Belgique, on a vite fait le tour (rires). À l’époque, ce métier faisait rêver et c’était prestigieux, comme pilote, tandis que maintenant, les pauvres, elles turbinent et sont mal payées. Je voulais faire ça, mais grâce à mon métier, j’ai quand même pas mal voyagé et je voyage toujours, parce que grâce à cette victoire à l’Eurovision, je suis souvent invitée à l’étranger pour des sélections nationales. Je vais très régulièrement dans les pays scandinaves notamment.

Je me souviens vous avoir vu porte-parole au Melodifestivalen !

Oui, j’ai fait ça au moins dix fois ! La Suède, la Finlande, je suis allée jusqu’en Islande, j’ai fait pas mal la Turquie, le Danemark, Israël, les pays du sud comme le Portugal, jusqu’au Japon. Pour moi, c’était très kiffant !

Tout a commencé par un voyage en plus, à Bergen en 1986, où vous remportez le trophée. Vous attendiez-vous à votre victoire au sein de la délégation belge ?

En étant sélectionnée pour l’Eurovision, j’avais le public belge derrière moi, qu’il fut wallon ou flamand. J’étais vraiment partie avec un élan de popularité, donc les gens attendaient cette victoire. Avec la délégation, nous n’étions pas partis pessimistes, mais c’était juste un rêve dont on espérait qu’il devienne réalité. En arrivant là-bas, les bookmakers nous avaient placés favoris, avec la Suisse, l’Allemagne et la Norvège. Effectivement, ils ne se sont pas trompés, parce que j’ai fini première, la Suisse était deuxième, l’Allemagne quatrième ou cinquième, je ne me souviens plus vraiment …

Ils étaient huitièmes.

D’accord. La Norvège un peu moins, parce que c’était le pays organisateur… Moi, j’étais partie favorite, puis est arrivé ce qui est arrivé.

De cette expérience sur place, quel souvenir en gardez-vous ?

Très enrichissante. Ça m’a permis de vieillir plus vite. Je n’étais jamais allé autre part qu’en Italie en voiture, puisque je suis d’origine italienne. Déjà, la Norvège, c’était extraordinaire. En arrivant là-bas, je découvrais un monde complètement différent de ce que j’avais connu jusqu’alors. C’est l’Eurovision, c’est professionnel, c’est une super scène, on rencontre des gens hyper sympas et attentionnés, parce que vous êtes très jeune. Tout le monde est très bienveillant avec vous, et j’étais un peu la chouchoute du concours. Il ne faut pas oublier qu’à l’époque, en 1986, il n’y avait que vingt pays – et c’était beaucoup mieux. Tout le monde se connaissait, sympathisait avec l’autre. Maintenant on ne peut pas être très lié avec toutes les délégations. J’avais créé des liens avec certaines personnes, et je suis toujours en contact avec le participant norvégien (Ketil Stokkan N.D.L.R.) par exemple. C’était très sympa, très chouette à faire, mais c’était aussi très dur. À moment donné, j’étais très fatiguée, parce qu’à treize ans, les enfants vont dormir après dix heures. Là, je devais jouer à l’adulte parce j’étais propulsée dans un monde d’adulte, donc ce n’était pas évident à gérer, mais mon entourage faisait très attention.

J’allais y venir : à l’époque, l’Eurovision Junior n’existait pas. Vous vous retrouvez à participer à un concours d’adulte. Votre jeune âge n’était-il pas une pression, du moins un poids supplémentaire ?

Totalement ! J’avais double pression et puis il fallait gérer la fatigue, etc. Je voulais aussi jouer un peu à la grande, mais à moment donné, je ne pouvais pas suivre mes musiciens qui allaient dans des bars (rires). Je voulais déjà faire la maline, mais à moment donné il faut savoir s’arrêter. Ce n’est pas tellement tout ça, mais c’était quand même un peu dur psychologiquement, et finalement de gagner… Parce que je me disais que si je rentrais sans gagner, j’aurais la pression, parce que les gens étaient tous derrière moi. Ils changent vite, les gens, ils peuvent vous adorer et puis vous oublier du jour au lendemain. Tout dépend du résultat, mais j’ai vécu ça. Deux ou trois ans après l’Eurovision, la mayonnaise est retombée et les gens vous tournent le dos, vous n’êtes plus la petite Sandra qu’on aimait.

Il y a l’effervescence post-victoire, mais comment gère t-on l’après-Eurovision à terme, d’autant plus qu’on vous y ramène systématiquement ?

On m’a bien entouré. J’avais vraiment des parents au top, qui ne me mettaient aucune pression, même le manager de l’époque ne m’a jamais poussé. Mes parents ne m’ont jamais dit que je devais chanter. Ils m’ont posé la question « maintenant que tu as gagné, qu’est-ce que tu veux faire, tu veux continuer ou tu veux retourner à l’école ? ». Et moi je voulais retourner à l’école, mais également continuer, même si je ne voulais pas en faire un métier. Puis, en allant à l’école, je me suis rendu compte que les gens commençaient à changer, et pas dans le bon sens. Tout d’un coup, je devenais la meilleure amie de gens qui ne m’avaient jamais adressé la parole jusqu’alors. Ce n’était pas facile. Je me suis dit que j’allais rentrer dans une période compliquée, parce que tout le monde disait que j’avais la grosse tête, alors que ce n’était pas vrai du tout. Moi, je n’ai jamais changé, ce sont eux qui changeaient de comportement avec moi. Tout d’un coup, je devenais l’amie de tout le monde. Quand il y a moins de succès, au bout d’un an, un an et demi, les choses changent et là, on commence quasiment à vous tourner le dos.

J’aime la vie a été un tel succès qu’il est difficile de refaire le même après. Et pourtant, j’ai vendu beaucoup de disques après, mais beaucoup moins évidemment que J’aime la vie, parce que ça a été l’une des meilleures ventes de Belgique avec le groupe ABBA en 45-tour et je suis la seule à avoir vendu plus de trois cents mille copies, presque quatre cents, dans mon pays, ce qui est énorme pour la Belgique ! C’était difficile de refaire un score pareil, ce qui est logique. Et puis, je n’avais pas vraiment les journalistes avec moi. Je les avais avec moi depuis le début, mais après, on me traitait de petite écervelée, fille sans expérience, etc. La suite a été plus dure à accepter, mais ça fait partie du métier. Maintenant je suis rodée, je me fous de ce que les gens pensent de moi. Si je plais, tant mieux, et si je ne plais pas, tant pis (rires). Parce que tout le monde n’aime pas l’Eurovision. Il y a des journalistes qui critiquent l’Eurovision. Je n’avais pas que des admirateurs, j’ai essuyé énormément de critiques, mais voilà, ce n’est pas grave, cela fait partie du métier. On ne peut pas plaire à tout le monde.

Avez-vous essayé de rompre avec cette étiquette ?

Avec ces années, j’ai essayé de prendre un peu de recul. J’ai tellement fait ça pendant des années qu’après trente ans, je me suis dit que je ne savais plus quoi dire. Je fais toujours des galas spécial Eurovision, aux Pays-Bas, en Scandinavie, mais j’essaie de prendre du recul. On m’a tellement demandé de parrainer des artistes à l’Eurovision que, maintenant, je ne peux plus, surtout que ce n’est pas toujours bon ! J’essaye de ne pas toujours répondre à la moindre question, mais dans un petit pays comme le mien, ce n’est pas toujours facile, surtout qu’ici, ce sont davantage les flamands que les wallons qui aiment l’Eurovision. Eux rêveraient de gagner le concours pour la Belgique, de dire que le vainqueur du concours est un flamand (rires). Parce que vous savez, on a beaucoup de problèmes linguistiques ici.

À l’époque, ils vous avaient d’ailleurs soutenu.

Ah oui, et d’ailleurs, comme à l’époque, j’ai la chance de travailler davantage en Flandre qu’en Wallonie. Ma carrière est complètement basée sur la Flandre : mon agent est flamand, mon mari également, j’y habite, je parle la langue, je suis vraiment ancrée là-bas et je n’ai aucun souci avec ça.

Vous pensez que ça a un lien avec le concours ?

Oui, certainement, mais j’ai toujours travaillé des deux côtés. À l’époque, mon agent pour les galas en Flandre était flamand, et je n’ai jamais fait de différence. Mon public était à 50% issu de Flandre et de Wallonie. Maintenant, je suis toujours très appréciée en Flandre. Cela ne veut pas dire que les gens ne m’apprécient pas en Wallonie, mais on dit toujours « Nul n’est prophète en son pays » et c’est le cas pour moi. Bien entendu, j’ai mes fans francophones et néerlandophones depuis le début, mais je ne me suis jamais vraiment expliquée pourquoi j’ai toujours été plus considérée chez les flamands en tant que wallonne, que l’inverse (rires).

Vous me disiez que vous n’êtes pas un fan de l’Eurovision …

Non.

Vous avez évoqué les récents candidats belges… Avant de participer au concours en 1986, quel rapport aviez-vous avec lui ?

On le regardait chaque année avec mes parents, parce que c’était une institution à l’époque l’Eurovision ! C’était le gala télévisé par excellence, qu’on attendait chaque année. Je me souviens, quand on était petite, on avait vu les plus grandes victoires, les plus grands succès de l’Eurovision avec mes parents. On faisait tout ce qu’on aimait bien à manger, on préparait du pop-corn, et on regardait le concours. On faisait des listes où on cochait les pays qu’on aimait, on marquait les points, donc pour mes parents, c’était plus quelque chose que pour moi. J’ai regardé le concours jusqu’aux années nonante, après ça ne m’intéressait plus. J’étais adolescente, et puis, maintenant, je m’y intéresse doucement à nouveau, parce qu’il y a quand même e bonnes chansons qui sont sorties depuis. Mais je dois dire que l’Eurovision en elle-même a fort changé depuis mon époque. Il y a avait un orchestre qui jouait en live,  on était très peu sur scène, on ne faisait pas vraiment attention à la tenue, on privilégiait plus le texte et la musique, maintenant, c’est le contraire ! Les musiques sont parfois sympas, mais c’est presque le look, l’acte sur scène qui sont plus importants que tout le reste.

Justement, le concours est devenu une grosse machine, à quarante-trois pays, un grand spectacle à gros budget et à grosse capacité, que pensez-vous de cette évolution ?

Ce n’est pas toujours de bon goût. L’évolution, je la comprends, c’est normal, on a plus de moyens technologiques, les plateaux et les lumières sont très beaux, le spectacle est incroyable. Ce qui me manque un peu, c’est que les pays ne chantent plus dans leur langue. Chanter dans une langue des balkans, cela sonne différemment comparé au français, à l’anglais, l’espagnol ou l’italien. Je comprends que tout le monde chante aujourd’hui en anglais, sauf la Belgique, la France ou l’Italie, puisque leurs langues sont très belles. Je regrettais par exemple que votre candidat, Tom Leeb, chante à moitié en anglais et à moitié en français, et même Bilal Hassani. Quand on représente la France, on devrait chanter en français et pas en anglais, je suis désolée. Je peux comprendre que les pays chantent en anglais parce que c’est une langue internationale que tout le monde comprend. Ce qui me manque à l’Eurovision, c’est qu’on représente un pays, une culture, mais aussi un show entièrement en live, avec des musiciens. Je comprends que ce soit compliqué, parce que c’est coûteux et que toutes les délégations devraient venir avec leurs propres musiciens, ce qui est compliqué.

Ces dernières années, des titres, des artistes, vous ont-ils particulièrement marqué ?

Je ne dirais pas marquer, mais je pourrais vous parler de quelques victoires. J’avais adoré – peut-être pas le personnage, parce que c’était pour moi un petit peu dérangeant, même si je n’avais rien contre – Conchita Wurst. Moi, j’ai un public essentiellement gay, je n’ai pas de problèmes avec ça parce que je suis une icône gay en Belgique. Un homme habillé en femme avec une barbe, ça ne me posait pas de problème, mais ça me dérangeait. Mais le mec ou la fille venait avec une chanson magnifique, une voix extraordinaire, et cela m’a beaucoup marqué. J’ai adoré aussi Loreen, avec Euphoria. C’est une fille que je connais un peu, que j’ai rencontré plusieurs fois et j’ai récemment chanté cette chanson. Puis l’année dernière le chanteur néerlandais, Duncan. J’ai trouvé sa chanson extraordinaire. C’était différent, c’était calme. Je suis un peu moins fan des chansons belges qu’on a envoyé, ce n’est pas mal fait, mais ça me touche moins.

Vous avez anticipé ma prochaine question, sur les difficultés des pays francophones à l’Eurovision. La Belgique a connu de bons résultats avec Loic Nottet, Laura Tesoro et Blanche, mais deux éliminations en demi-finale ont suivi avec Senek et Eliott.

Je ne me souviens plus titre d’Eliott. Senek, je n’ai rien contre la chanteuse, mais je ne trouvais pas la chanson extraordinaire. Comme Hooverphonic. Je n’aimais pas cette chanson. Ce groupe a tellement de talent que c’était décevant de les voir envoyer cette chanson. Je ne dis pas que ce n’est pas bien fait, c’est totalement du Hooverphonic, mais je n’étais pas convaincue de la mélodie, ça ressemblait même très fort à une autre chanson.

Selon vous, quelle serait la recette idéale pour vous trouver un.e successeur.e ?

Oh ! Je n’en ai aucune idée ! Personnellement, une bonne chanson, mais maintenant ce n’est plus tellement important comme je vous le disais tout à l’heure. L’Eurovision, c’est un ensemble, ce n’est pas spécialement la bonne chanson ou le texte, même s’il est partout au concours. Tout le monde chante la guerre, la paix, des textes politiques, mais il y a moyen de chanter pas mal de choses. Il n’y a pas vraiment de recette, parce que je vois parfois des participants qui chantent bien qui se retrouvent mal classés. Par exemple, il y a deux ans, le groupe Madame Monsieur : ce n’était pas mal ! Ce n’était pas une grande chanson, mais l’idée était bonne, pas le classement. Patricia Kaas avait aussi une jolie chanson, et elle était classe.

Elle a fait un top 10 …

Il n’y a pas vraiment de recette. Puis ce qui me dérange très fort, ce sont ces pays qui votent toujours entre eux. Les russes qui sont chaque année très bien classés, ça commence à bien faire, parce que la suprématie russe est là et il faut faire avec. Maintenant, c’est vraiment un hasard que les Pays-Bas aient gagné l’année dernière. Ils rêvaient de cette victoire depuis tellement d’années que c’était inespéré. C’est pour ça que, nous le belges, nous ne désespérons pas pour une prochaine victoire (rires). Et vous non plus d’ailleurs.

Entre nous, en France, on commence à désespérer (rires)

(Rires) La dernière c’est Marie, c’est ça ?

Tout à fait !

Je la connais bien, c’est une amie ! On s’est vue l’année dernière à une scène commune à Amsterdam, on était dans le même hôtel et on a toujours très fortement sympathisé. On est un petit groupe de francophones, avec Corinne Hermès et Anne-Marie David. On se voit régulièrement dans ce genre de galas, avec Katrina également, Dana International que j’adore et qui m’adore aussi. On est un petit groupe de copines qui se contactent de temps en temps et on a beaucoup de respect l’une envers l’autre, c’est chouette.

Et ce micro de cristal, vous l’avez mis où ?

Il faut dire qu’à l’époque, ce n’était pas un micro, c’était une espèce de pierre qu’on trouvait en Norvège, qui ressemblait aux cristaux qui se trouvaient dans le décor de la scène cette année-là.  C’est une espèce de plaque, où il est inscrit « gagnante de l’Eurovision », avec des espèces de cristaux qui sortent de partout. C’est très moche (rires). C’est un trophée que j’ai gardé alors qu’il ne m’était pas du tout destiné. À l’époque, on le donnait à l’auteur de la chanson, maintenant c’est le chanteur qui reçoit le trophée. Je l’avais pris pour des séances photos, et je l’ai gardé. Il est toujours chez moi.

Lors de votre participation au concours, un souvenir, un instant, vous a-t-il marqué plus particulièrement qu’un autre ?

Il y a une anecdote assez sympathique. Juste avant de monter sur scène, je me suis prise le manche de guitare de mon guitariste en pleine figure, sur le front. J’ai eu une belle bosse, un beau bleu, que personne n’avait vu, parce que j’étais coiffée les cheveux en arrière avec une espèce de frange qu’on m’a descendu pour ne pas qu’on voit cette bosse en train de pousser. Ensuite, quelques mois après, j’ai rencontré quelqu’un que j’apprécie énormément à l’Eurovision, Johnny Logan, qui est un copain. Je l’admirais beaucoup, j’étais très fan de sa chanson What’s Another Year quand il a gagné en 1980, j’étais limite un peu amoureuse, et quand je l’ai vu en 1987 à Bruxelles, lors de sa seconde victoire, j’étais évidemment sous le charme … J’étais très contente de le rencontrer, ça m’avait fait bizarre.

Et avec le recul, si c’était à refaire, vous le referiez ?

Non, pas du tout. Non. C’est affirmatif de chez affirmatif. On m’a tellement posé ce genre de questions que je peux vous assurer que même si j’étais au creux du creux de la vague, je ne referai jamais l’Eurovision, pour la simple et bonne raison que je ne vois pas pourquoi je devrais le refaire. Je l’ai gagnée une fois, et ça m’a apporté une notoriété, mais également des emmerdes. Je ne vais pas rentrer dans les détails, mais j’ai eu une carrière un peu en dent de scie, ici en Belgique, parce qu’on a une étiquette Eurovision et puis j’ai eu des soucis avec le producteur qui m’a découvert. Cela m’a coûté beaucoup d’argent, de temps, c’était dur psychologiquement, et ça m’a un petit peu pourri la vie. On me parle toujours de L’Eurovision et ça devient parfois ennuyant. Imaginez que j’aille à l’Eurovision et que je finisse seizième ou vingt-cinquième, ma carrière serait fichue. Je préfère être comme je suis, j’ai gagné avec panache et fierté, et c’est bien ainsi (rires).

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L’actualité de l’artiste :

Sandra Kim continue de se produire régulièrement dans le cadre de concerts et de galas dédiés au concours de l’Eurovision, ainsi que lors de sélections nationales. Elle a notamment participé à Het Grote Songfestivalfeet organisé au Ziggo Dome d’Amsterdam en décembre 2019 aux côtés de très nombreuses eurostars parmi lesquelles Marie Myriam, Dana International, Anne-Marie David, Corinne Hermès, ou encore Eleni Foureira et Mahmood.

Son dernier album, Make Up, est sorti en 2011.

Un immense merci à Sandra Kim d’avoir accepté de partager une nouvelle fois son expérience de l’Eurovision avec nous.

Crédits photographiques : page Facebook officielle de l’artiste (avec son aimable autorisation)