L’édito du Junior : pourquoi ces pays se sont-ils retirés ?

Observez cette carte : voici les pays qui participent à l’Eurovision Junior 2023 à Nice.

Maintenant, faisons un saut dans le temps de dix ans. Et voici les pays qui participaient à l’Eurovision Junior 2013, à Kiev.

Impressionnant n’est-ce pas ? Les pays de l’ouest sont bien plus présents qu’ils ne l’étaient il y a dix ans, à l’inverse des pays de l’est. L’impression est renforcée de par la taille des pays de l’ouest en question. Au total, cinq pays seulement sont communs au deux éditions.

L’Eurovision adulte, auquel 50 pays toujours existants ont participé, compte cette année 35 participants confirmés. L’Eurovision junior a quand a lui vu 39 pays fouler sa scène (40 en comptant le pays de Galles), mais à l’arrivée, il n’ont jamais été plus de 20 simultanément (et heureusement pour la durée du show qui est sensé être suivi par des enfants).

L’Eurovision junior fait état d’un sacré turnover… Mais pourquoi tous ces pays qui ont participé par le passé n’ont pas continué ? Nous allons passer en revue dans cet article les raisons qui ont conduit au retrait des pays du concours Eurovision de la chanson Junior, la dernière fois qu’ils se sont retirés.

Raisons éthiques

Les pays nordiques créèrent les premiers un concours de chansons junior international, le Melodi Grand Prix Nordic en 2002, calqué sur le modèle de leurs sélections pour l’Eurovision. De ce fait, ce sont ces pays qui poussèrent à la création en 2003 du concours Eurovision de la chanson Junior, dont la première édition se déroula à Copenhague. Mais voilà, après seulement trois éditions, le Danemark décide de ce plus participer…. La raison ? La trop grosse pression exercée sur les jeunes artistes qui participent. Un peu étonnant, lorsque l’on sait qu’ils furent les précurseur du concours, et qu’il relancèrent le MGP Nordic dés l’année suivante. La Norvège fit de même, tandis que la Suède continua les deux compétitions.

Cette année en 2023, l’UER s’est montrée également préoccupée par la question de la pression à supporter des jeunes artistes, mais aussi du harcèlement qu’ils pouvaient subir. Un poste de responsable de la protection des artistes mineurs vient d’être créé en est occupé par Gert Kark… De quoi ramener les pays nordiques dans un futur plus ou moins proche ?

Raisons financières

C’est déjà la raison de retrait la plus courante à l’Eurovision adulte, une participation à l’Eurovision coûte de l’argent, et un concours junior génère habituellement moins d’audience que le concours adulte… Croatie, Grèce, Lettonie, Lituanie, Serbie et Suisse, tous ces pays ont avancé les raisons financières comme étant celles à l’origine de leur retrait.

Sachez tout de même que la Serbie s’est retirée cette année, un retour d’ici l’an prochain reste possible, à l’inverse des autres que l’on a plus vu depuis au moins une dizaine d’années, et dont la motivation s’est certainement estompée.

Bannissements

Vous pouvez être sûr que si les circonstances étaient différentes et qu’ils n’avaient pas étés exclus du concours, ils auraient souhaité continuer à participer… Nous parlons bien sûr de la Russie et la Biélorussie, chacun vainqueurs à deux reprises du concours junior. La Biélorussie était même le seul pays autre que les Pays-Bas à participer depuis sa création sans jamais avoir manqué une seule édition. Mais la chaîne biélorusse BTRC fut exclue de l’UER en juin 2021 suite à des actes commis par la chaîne dans le cadre de la « révolution des pantoufles » (comprenant désinformation ou aveux forcés de faux crimes). Et puis en 2022, la guerre en Ukraine éclate, et les pays participants au concours eurovision adulte appellent à l’exclusion de la Russie, qui se retirera de l’UER d’elle même.

Au vu du contexte politique actuel toujours plus tendu et du départ de l’UER de ces deux pays, leur retour dans les prochaines années à l’Eurovision adulte comme junior est invraisemblable.

Découragement face au Covid

L’Australie et le Pays de Galles participaient depuis quelques années au concours junior jusqu’en 2019, plus grosse édition du concours avec 20 pays participants….. Et puis vint le Covid-19. L‘Australie fut particulièrement stricte face à celui-ci, et annonça son retrait du concours junior. Le Pays de galles fit de même, ainsi que quelques autres. Depuis, l’Australie n’est pas revenue, et en fin de compte, et le Pays de Galles non plus, mais il a été plus ou moins remplacé par le Royaume-uni, de retour en 2022.

Mécontentement face aux règles

Après avoir participé trois années de suite, la Slovénie obtient son meilleur classement, une troisième place, en 2015. Et puis en 2016, de gros changements sont appliqués au concours junior : suppression de vote du public en 100% jury, ordre de passage créé quasi-entièrement par la organisateurs, un jury d’expert ajouté en bonus…. En mai, RtvSlo, déclare qu’elle ne reviendra pas au concours en raison de désaccord avec les règles, sans préciser lesquelles. On n’a pas revu la Slovénie à l’Eurovision Junior depuis.

Perte d’intérêt

Contrairement à l’Eurovision adulte où la Belgique alterne de diffuseur entre la RTBF (télé wallonne) et la VRT (télé flamande), à l’Eurovision junior, la RTBF a rapidement jeté l’éponge, car le concours ne rencontrait pas l’intérêt des spectateurs wallons.

Dés 2007, la VRT fut donc seule à tenir les rênes, et puis en 2013, elle décide de se retirer également, ayant d’autre projets d’émissions pour enfants… Et dira plus tard n’être tout simplement plus intéressé par l’Eurovision Junior, sans plus d’explication. Etrangement, la chaîne a tout de même organisé cette année là une émission calquée sur le modèle de leur sélection nationale habituelle.

La Belgique aura tout de même participé dix éditions de suite, ce qui est plus constant que de très nombreux pays.

Sûrement pour une autre raison que celle invoquée

L’Arménie, pays ennemi de l’Azerbaidjan, remporte le concours en 2021 et obtient le droit de l’accueillir sur son sol en 2022. Un membre de la délégation azérie répond que son pays participera sûrement, mais en fin de compte, l’Azerbaidjan n’apparaît pas sur la liste des pays participants. Une raison est évoquée plus tard : trop peu de candidats à The Voice Junior Azerbaidjan se sont manifestés pour participer à l’Eurovision en Arménie…

D’un coté, il est possible qu’effectivement, les jeunes azéris -ou leurs parents- n’eurent pas osé se lancer dans un concours dans le pays qui leur opposé, mais de l’autre, Itv avaient il réellement envisagé une participation ? Il est à noter que de toute manière, l’Azerbaïdjan n’a jamais été un participant constant à l’Eurovision Junior, n’ayant été présent que quatre fois en l’espace de 10 ans, et jamais plus de deux fois de suite.

Et les autres ?

Il reste de nombreux pays que nous n’avons pas encore cité dans cette liste : Bulgarie, Chypre, Israël, Kazakhstan, Monténégro, Roumanie, Saint-marin, Suède…. Aucun diffuseur de ces pays n’a expliqué son absence à l’édition qui allait suivre. Mais les raisons sont très certainement les mêmes que celles énumérées tout au long de cet article : concours peu rentable, éthique en désaccord avec celle d’un concours pour enfant… Et peut-être aussi des résultats décourageants. Une raison qui n’a pas été évoquée dans cette liste en revanche, ce sont les conflits entre pays, ce qui a conduit au retrait de l’Arménie en 2020, revenue depuis.

Malgré tout ces retraits, il reste quand même une chose à noter : depuis 20 ans que le concours existe, les pays participants ont toujours été au minimum douze, nombre qui permet un minimum de suspense au moment de l’attribution des points, et surtout d’avoir un minimum de concurrence à la victoire. Même si des pays se retirent, d’autres pointent le bout de leur nez, rendant la tenue de l’évènement possible. L’Eurovision Junior 2020 s’est même tenu malgré le Covid-19 ! Alors dites vous que le concours n’est pas spécialement menacé par un désintérêt général des diffuseur, et qu’un pays qui s’est retiré peut très bien réapparaître prochainement, tout comme des pays encore jamais participants peuvent faire une entrée surprise, à l’image de l’Estonie cette année.

Crédits images : Andres Putting pour l’UER, Wikipédia