En cette quinzaine spéciale Eurovision France, place ce matin à la première interview de l’un des candidat·es en lice pour représenter notre pays au concours en mai prochain. Pour inaugurer cette série, voici Cyprien Zeni, qui défendra le titre Ma famille.

EAQ – Qu’est-ce que cela te fait de te retouver dans cette aventure Eurovision France ?

Cyprien Zeni – C’est juste incroyable, parce que je ne m’y attendais pas du tout ! Quand mon manager m’a proposé de le faire, je pensais que l’Eurovision n’était pas pour moi, car je la mettais sur un piédestal. Je me disais que je n’étais pas aussi bon que les chanteurs qui y avaient participé,  que je n’allais pas y arriver. C’est assez inattendu, je suis à la fois très heureux et très impressionné. J’espère que cela va bien se passer.

Ta maison de disques t’a encouragé à y participer ?

Quand ils ont écouté Ma famille, ils m’ont suggéré de la proposer pour l’Eurovision et je me suis dit « What ? Allez, c’est parti ! ». Qui ne tente rien n’a rien, alors je me suis presque lancé dans l’aventure sur un coup de tête, et désormais m’y voici !

Tu disais mettre le concours sur un piédestal. Quel rapport as-tu justement avec l’Eurovision ?

C’est un programme que j’ai regardé pendant quelques années, puis je m’en suis détaché lorsque j’ai commencé ma carrière, parce que je n’avais plus le temps de regarder la télévision, tout simplement. Je m’y suis remis depuis Amir. Ce qu’il se passe pour les représentants français est hyper cool. Je trouve toujours cela très enrichissant et nourrissant de voir les propositions des autres pays, leurs styles, leurs univers. Certains pays jouent la carte du traditionnel, d’autres celle de la modernité, encore d’autres celle de la pop … J’aime beaucoup cela. J’essaie de m’en inspirer et de voir ce qu’il est possible de faire avec tout ce que je vois autour de moi.

Des artistes ou des chansons t’ont-ils particulièrement marqué ?

Duncan Laurence m’a profondément touché. Barbara Pravi, qui a offert une prestation incroyable qui dégageait beaucoup d’émotion. Je trouvais qu’elle n’avait tellement aucun rapport avec les autres que sa proposition m’a touché. Je me suis beaucoup ambiancé sur Mata Hari, pour l’Azerbaïdjan. L’Ukraine m’a également interpellée l’année dernière. Je trouvais leur proposition singulière. Et pour cette édition, je trouve la chanson de Mahmood et Bianco très intéressante. Sans oublier Gjon’s Tears, que je suivais déjà depuis The Voice, et dont la chanson m’a vraiment ému.

Tu évoques The Voice, dont tu as été finaliste en 2021. Que t’a apporté cette expérience ?

Cela m’a beaucoup apporté dans ma manière de percevoir mon univers et ma volonté de préciser le cap de mon aventure musicale. Cela a changé ma vision de ma musique, et j’en suis heureux, parce que sans cette émission, je n’aurais par exemple pas concouru à Eurovision France. Je n’aurais pas fait tout ça. Cette expérience m’a ouvert les yeux sur la direction musicale que je devais prendre. Cela change également la vie dans la sens où je dédie ma vie à la musique, c’est mon gagne-pain depuis quatre ans désormais, et mon quotidien a depuis changé. J’ai rencontré tellement de personnes formidables – certaines moins, mais c’est normal ! –  et puis la famille The Voice, l’équipe technique. Ce sont des amours, des personnes très bienveillantes envers lesquelles je suis reconnaissant de m’avoir permis de vivre tout ça. Et j’ai hâte de vivre encore plein de choses ! Cette aventure Eurovision France va également beaucoup m’apporter, et j’en apprends, sur moi-même, sur ce que je suis capable de faire, sur ce qu’il faut faire aussi, sur ce que la télévision peut engranger comme engouement et comme investissement … Quand on participe à The Voice, la direction artistique est entre les mains d’un tiers alors qu’ici, nous sommes les propres maîtres de ce qu’il va se passer sur le plateau. On est à l’affût de tout ce qu’il se passe, les danseurs, les costumes, les visuels, je trouve cela intense et j’ai vraiment hâte de commencer les répétitions ! Je ne sais pas si je vis ma meilleure vie, mais c’est une belle aventure que je suis impatient de partager avec vous. J’espère que ma proposition va plaire, que les gens vont pouvoir danser sur ma chanson et en même temps que mon message sur la famille résonne dans le cœur des gens.

Comment décrirais-tu d’ailleurs Ma famille ?

Cette chanson est un petit voyage que j’ai envie de proposer au public à travers mon histoire. Elle évoque cette période de ma vie où j’ai quitté mon île natale, la Réunion, pour entreprendre une nouvelle aventure en France métropolitaine et faire mes études de musique à l’Université de Toulouse. Tout simplement pour faire ma vie en tant qu’homme, en tant qu’adulte. Cela a été un déchirement de quitter tout ce que j’ai connu pendant vingt ans pour l’inconnu, rencontrer de nouvelles personnes, fonder mon foyer – je n’aurais jamais cru que cela se passerait à Toulouse ! Tout ce qu’il s’est passé depuis maintenant huit ans m’a fait grandir, rendu joyeux, comblé de bonheur. C’est ce qui fait que je suis qui je suis aujourd’hui. Dans cette chanson, je veux juste rendre hommage à cette famille qui m’a vu naître, qui m’a vu grandir, à celle que je me suis construite à Toulouse et à tous ceux qui me soutiennent – ma famille, mes amis, ceux qui me suivent depuis The Voice et qui sont à fond derrière moi, les réunionnais, les métropolitains … On est en quelque sorte une grande famille. On se retrouve sous le même drapeau lorsque l’équipe de France remporte la Coupe du Monde ou participe aux Jeux Olympiques, et ce qu’il se passe ici est un peu semblable. On concourt pour être le représentant de la France à l’Eurovision, alors soyons tous sous le même drapeau et choisissions notre représentant. Qui que ce soit, on en sera fier. J’ai envie de m’amuser, d’essayer d’emporter toute ma famille avec ma chanson et qu’on entre dans la danse. Qu’on pleure aussi, parce que la famille peut également nous manquer. Elle est toujours présente, même dans les moments où on ne s’y attend pas et c’est incroyable à quel point elle peut être vectrice de force et un moyen de se relever. C’est d’une puissance incommensurable. Personne ne peut nous l’enlever, et c’est pour cela que je chante cette chanson.

C’est un titre assez solaire et lumineux : je suppose que c’était une évidence de partir dans cette direction musicale là eu égard à ton message ?

Oui, et en même temps pas vraiment. J’aurais pu choisir un autre style, parce qu’il y a tellement de styles musicaux qui me plaisent, mais partir dans ce style-là était presque naturel, comme un réflexe, parce que j’écoute beaucoup de musique afro en ce moment.

Quelles sont tes influences musicales ?

Ça part de la soul, du gospel, de la musique réunionnaise, de la musique africaine – afro-pop, afro-beat, … – à tout ce que j’ai pu écouter à la radio – pop, variété, chanson française. Du Jean-Jacques Goldman, du Maître Gims, du Jérémy Frérot, mais aussi du Bruno Mars, du Michael Jackson. J’ai toujours écouté vraiment de tout. J’essaie de m’imprégner de tout ce que j’ai pu écouter,  de tout ce que j’ai pu apprendre des univers dans lesquels je suis allé.

Il y a quelques incursions de créole réunionnais dans ton titre. Peux-tu nous parler des choeurs par exemple ?

Il y a une phrase dans cette langue. Les chœurs ne relèvent pas forcément du créole réunionnais. C’est un cri du cœur, scandé, qui peut être tribal. Il peut être bulgare ou africain comme il peut être français. Il résonne différemment en chacun. Ce n’est pas forcément connoté de quelque part : ce peut être de partout. Ce genre de chant se retrouve par exemple en Afrique du sud, dans les pays scandinaves et ailleurs.

Comment comptes-tu faire vivre Ma famille sur scène ?

J’ai envie de personnifier la famille comme on le fait dans les diverses mythologies. J’aime l’idée de la personnification et de faire une allégorie, une divinité. J’ai envie de sacraliser la famille et de mettre du mouvement autour, de sorte que je puisse raconter mon histoire de manière imagée, à travers un tableau qui me ressemble. Je vais essayer de mettre beaucoup de lumières et un peu de soleil de la Réunion … et du sud de la France !

Quels ont tes projets après ce titre ?

J’ai un album en projet, sur lequel je travaille tranquillement avec mon équipe. On va essayer de proposer quelque chose qui soit au plus près de cet univers-là. J’ai envie d’y mettre plein de facettes et de couleurs. La participation à Eurovision France va être une première pierre à l’édifice. Ce n’est que le début de l’aventure, et j’espère qu’elle va continuer.

Pourquoi as-tu envie de porter les couleurs de la France à l’Eurovision ?

Plus les jours avancent, et plus ma volonté d’aller au bout de cette aventure est grande. On représente tous une facette, une couleur de la France. J’ai envie de rendre fière cette autre facette de la France, et même la France, la francophonie entière. C’est important dans cette période-là, rendue difficile par la crise sanitaire. On a besoin de se réunir sous un même drapeau, de fédérer le plus possible et pourquoi pas autour de la musique. Je serais ravi qu’une chanson comme Ma famille, qui prône l’idéal de la famille, puisse emmener tout le monde et qu’on soit tous là à danser sur la même chanson, quelque soit nos origines. Si ce n’est pas la mienne, ce n’est pas grave tant qu’on continue de s’amuser sur la même chanson. Soyons au rendez-vous !

Un grand merci à Cyprien Zeni d’avoir accepté cette interview pour L’Eurovision au Quotidien. Rendez-vous samedi 5 mars prochain dès 21h10 pour le découvrir en direct sur France 2 aux côtés des 11 autres candidat·es d’Eurovision France, c’est vous qui décidez !

Merci également à Isidora de Made of Music Records pour l’organisation de cette interview.

Crédits photographiques : page Facebook officielle de Cyprien Zeni