Dans quelques jours, Slimane et son équipe s’envoleront pour la Scandinavie, direction Malmö, Suède, pour l’Eurovision 2024. L’occasion de faire un point avec Alexandra Redde-Amiel, directrice des divertissements et des jeux de France Télévisions, et cheffe de délégation de la France à l’Eurovision.

EAQ – Quel est l’état d’esprit de la délégation à quelques jours du départ pour Malmö ?

Alexandra Redde-Amiel – On est super excité ! Maintenant on y est. On a envie de monter dans l’avion, de partir en Suède et on a hâte d’être là-bas.

La France a plutôt pour tradition d’envoyer des révélations à l’Eurovision (à de rares exceptions près), mais c’est aujourd’hui un artiste implanté et très populaire qui va nous représenter. Comment attire t-on une star comme Slimane dans l’aventure de l’Eurovision ?

La marque Eurovision grandit depuis quelques années maintenant. C’est vrai qu’elle gagne en puissance et en modernité. Il y a eu Amir en 2016, puis le beau palmarès de Barbara Pravi. Il y a aussi des artistes fans de l’Eurovision et Slimane en fait partie. Il regarde l’Eurovision depuis toujours et y participer faisait partie de ses rêves. On en a discuté, avec l’idée de le concrétiser quand il serait prêt et qu’il aurait le temps de le faire, et cela a été cette année.

Avec un artiste d’une telle envergure, qu’est-ce que cela change concrètement quant à l’accompagnement de la délégation ?

Beaucoup de choses. Ce qui est génial, c’est la présence d’une équipe autour de l’artiste, d’un management qui connaît par cœur Slimane et qui sait comment il fonctionne. Cela nous aide énormément pour pouvoir nous adapter à l’artiste et à avancer plus vite. Ensuite, c’est un professionnel, ce qui rend les choses beaucoup plus simples. Pour nous, c’est fantastique de pouvoir côtoyer et travailler avec un tel artiste.

Contrairement aux autres années, on a aussi un artiste engagé sur d’autres projets à côté de l’Eurovision, notamment une énorme tournée.

Plusieurs choses changent quand on a un artiste à la notoriété de Slimane. Le planning devient une horloge qu’on doit suivre, c’est-à-dire qu’on sait les moments où il est en tournée, en promotion, en campagne européenne … C’est un jeu d’équilibriste de faire en sorte qu’il n’arrive pas épuisé – parce qu’il a aussi le Cupidon Tour – et de bien préparer l’Eurovision à la fois. Mais tout se passe très bien avec Slimane. C’est un artiste extrêmement cadré et organisé, et son planning est parfaitement défini avec son équipe, ce qui nous permet de tout faire. .

Comment se déroulent justement les préparatifs de ces derniers jours ?

Les stand in rehearsals1 ont été réalisées dimanche dernier. Nous avons pu envoyer nos demandes de modifications à la SVT. À présent, nous sommes dans la dernière semaine avant le départ (la délégation française part à Malmö le 1er mai, N.D.L.R.) et nous essayons d’être dans le calme. Nous procédons aux derniers préparatifs quant à l’organisation, tout en réfléchissant aux petites adaptations que l’on pourrait avoir sur la scénographie. Quant à Slimane, c’est pour lui une semaine calme, où il se ressource avec ses proches avant la quinzaine du concours.

Le résultat de la stand-in rehearsal a t-il satisfait France Télévisions ?

C’est toujours très intéressant les stand-in, parce que cela nous permet de nous projeter dans ce que l’on souhaite et de voir s’il y a des éléments à adapter. Ce sont les fondations d’une prestation. Les fondations sont là, mais on s’est rendu compte qu’il y avait des détails à régler et on a procédé aux modifications que l’on voulait.

Peux-tu nous en dire davantage sur la scénographie ?

On vous laisse la surprise ! La scénographie a été réalisée par Zack Reece, le directeur artistique de l’artiste. Slimane a voulu créer un premier rendez-vous avec le public européen – je trouve la manière dont il le dit assez jolie d’ailleurs. Ce sera une véritable immersion dans un tableau à la fois simple et authentique. C’est ce que Slimane revendique être, c’est ce qu’il est et ce que sera donc le staging.

Mon amour reçoit un bel accueil de la part des français et des européens. La France est actuellement sixième des bookmakers. Comment appréhendez-vous cela ?

On protège beaucoup l’artiste de tout ce qu’il se passe à côté, justement pour ne pas s’emballer. Slimane veut faire la plus belle prestation afin de n’avoir aucun regret, et c’est le principal. Notre mission, c’est surtout de l’accompagner le mieux possible sur la scène pour qu’il vive pleinement cette prestation et après, la récompense, elle sera ou elle ne sera pas là. Mais Slimane reçoit beaucoup d’amour, à la fois des eurofans, de la communauté et de nombreuses personnes. Il se nourrit de tout cela pour se donner de la force, tout en restant très concentré.

47 ans que la France n’a pas remporté l’Eurovision. Qu’est-ce qu’il nous manque pour l’emporter selon toi ?

C’est difficile à dire. Avec Barbara, on a approché la victoire à vingt-cinq points. Peut-être que c’est cette petite étoile en plus qui nous permettrait justement d’atteindre les étoiles. Il y a 37 pays en lice, 26 au total qui vont être classés en finale. Je suis très heureuse de voir que l’Europe a envie de montrer sa culture et de défendre des beaux artistes. C’est positif que la concurrence soit au rendez-vous. Après, il n’y a pas d’équation pour la victoire. Il y a une grande part de talent et une part de chance.

En 2021, tu me disais développer de grandes ambitions pour l’Eurovision, avec l’idée d’implanter une marque. Trois ans après, vois-tu l’image du concours évoluer en France ?

C’est un travail sur le long court, mais l’Eurovision gagne en modernité et en puissance. On en entend de plus en plus parler en France. Dans mon rôle de directrice des divertissements et des jeux, et au-delà de celui de cheffe de délégation, j’essaie toujours de parler de l’Eurovision, afin de faire rayonner le concours toute l’année et pas seulement sur la période. Les chiffres de l’audience sociale montrent d’ailleurs une montée en puissance de l’Eurovision depuis 2017, et je pense que ce n’est pas terminé. J’essaie de mobilier le plus possible les français autour de l’Eurovision, comme le font la Suède et l’Italie, où c’est une religion. J’aimerais créer un Sanremo ou un Melodifestivalen à la française, ce qui permettrait de sacraliser l’Eurovision dans notre pays. Cela prendra du temps, mais on y travaille.

En préparation du 11 mai, quel dispositif France 2 a t-elle prévu en termes de programmation pour faire vivre l’Eurovision d’ici là ?

Comme d’habitude, la journée va être aux couleurs de l’Eurovision. Des bandes-annonces, des messages sur les réseaux sociaux, tout va être mis aux couleurs de l’Eurovision. De belles choses sont également en train de se préparer dans les médias pour qu’on parle du concours non-stop.

Certains télé-diffuseurs ont commencé à dévoiler publiquement des plans en cas de victoire. La France a t-elle déjà anticipé cela ?

Bien entendu, on réfléchit, parce que cela va tellement vite après une victoire, mais de là à dire qu’on va officialiser un plan, non. Où aller, ce qu’on ferait si on gagne un jour … Ce sont des éléments qu’on garde à l’esprit quand on évoque l’Eurovision.

Depuis quelques jours, on voit émerger des enjeux de sécurité autour du concours. En tant que délégation, comment appréhendez-vous le sujet avec l’UER ?

Le slogan United by Music est très fort. Aujourd’hui, on a confiance dans le dispositif de sécurité historique mis en place par la Suède et l’UER. On a conscience que cela va être une édition encore compliquée, bien sûr, mais nous avons des réunions très régulières afin de rassurer les délégations et nous expliquer les mesures proposées. Le dispositif mis en place à Malmö nous permet de nous sentir en sécurité.

Aux commentaires, Stéphane Bern et Laurence Boccolini sont de retour aux commandes, accompagnée cette année d’une nouvelle venue : Nicky Doll. Pourquoi ce choix ? Aura t-on la chance de voir un jour un défi Eurovision dans Drag Race France ?

C’est très intéressant de mélanger les communautés, celle de Drag Race et celle de l’Eurovision. C’est du grand spectacle, du grand art, comme j’aime le dire. Nicky Doll a un regard très européen et connaît très bien ce monde-là. Cette rencontre entre les deux programmes est un véritable crossover, une résonance qui permet de faire monter les deux programmes en puissance.

Capitaliser sur la participation de Slimane et succéder à un tel nom est un véritable défi. Appel à des artistes connus, sélection nationale, … Comment envisages-tu la sélection du prochain représentant français ?

On réfléchit aujourd’hui au retour d’une sélection nationale. Cela pourrait être d’autant plus intéressant après la participation de Slimane – dont on avait expliqué et justifié la sélection en interne. J’avais dit que la sélection nationale était juste mise entre parenthèses, et j’évoquais d’ailleurs tout à l’heure l’idée d’un Sanremo ou d’un Melodifestivalen à la française. Mais en parallèle, il y a aussi des artistes connus qui ont des envies d’Eurovision. Cela fait partie d’un ensemble de questions qu’il va falloir étudier avant de prendre une décision définitive.

Le dispositif de France Télévisions pour l’Eurovision 2024

Du 6 au 10 mai – tous les soirs à 20h40 sur France 2 : Basique avec toute l’actualité de Slimane
7 mai à 21h sur Culturebox/France 4 : demi-finale 1 de l’Eurovision 2024 commentée par Nicky Doll
9 mai à 21h sur Culturebox/France 4 : demi-finale 2 de l’Eurovision 2024 commentée par Nicky Doll
10 mai à 23h35 sur France 3 (disponible sur france.tv et rediffusé le 12 mai juste après la finale) : ABBA : Against The Odds,  un documentaire inédit né de l’initiative de l’UER à l’occasion des 50 ans de la victoire d’ABBA à l’Eurovision 
11 mai à 20h30 sur France 2 : Escapades à Malmö présenté par Stéphane Bern
11 mai à 21h sur France 2 : finale de l’Eurovision 2024 commentée par Stéphane Bern et Laurence Boccolini

Merci à Alexandra Redde-Amiel de nous avoir livré ses impressions à quelques jours de la première répétition de Slimane sur la scène de l’Eurovision 2024. Merci à Ludovic Hurel, responsable communication auprès de la direction de la communication des antennes et des programmes de France Télévisions.

Crédits photo : Jean Ranobrac

  1. Répétitions durant lesquelles un figurant prend la place de l’artiste pour tester le dispositif scénique ↩︎