Ce jeudi, aura lieu la finale de la sélection biélorusse pour Tel Aviv. Une finale pour le moins atypique, puisque que nos amis Biélorusses (nous pensons fort à eux) n’y auront point leur mot à dire. Ils se contenteront d’un simple rôle de spectateurs, le vainqueur étant désigné par le seul jury d’experts.

[Insérez ici une longue discussion sur l’opportunité d’organiser une sélection nationale télévisée sans permettre aux téléspectateurs d’y voter.]

Dans l’attente, confrontons nos réflexions sur ses dix finalistes.

LES LOREEN

Commençons par mon avis personnel sur la question. Bien entendu, cela n’est que mon opinion subjective. Si vous différez en la matière, exprimez-vous dans les commentaires.

Loreen a eu peur. Loreen a eu très peur. Un moment, elle s’est cru de retour en Moldavie. Sauf que… miracle !

Michael Soul – Humanize

Voilà qui laisse perplexe. Ni mauvais, ni enthousiasmant. Composition moderne et prometteuse. Refrain avec crescendo. Dépassé le deuxième couplet, fait du surplace. S’écoute sans déplaisir particulier, sans emballement du cœur non plus. Chanteur solide, très belle voix, impeccable prestation en direct. Et pourtant, agace, car très maniériste dans l’interprétation. Surjoue la souffrance. Ne serait pas un choix répréhensible en soi, mais nécessiterait beaucoup de travail pour dynamiser le morceau et contenir les épanchements émotionnels de Michael.

Zena – Like It

Proposition pop plus légère. Composition également dans l’air du temps, simple et aisément mémorisable. Zena, très bien. Prestation vocale sans faute. Proposition dynamique à bon potentiel. Reste tout de même répétitif et d’envergure limitée, malgré crescendo final. Aucun reproche à adresser à la composition, plutôt aux paroles, creuses et limitées. Aurait mérité un texte plus abouti, soit profond, soit humoristique. Autre choix envisageable qui nécessiterait un travail supplémentaire d’ici à mai pour égaler les meilleures propositions.

Eva Kogan – Run

Ballade meringuée comme l’on en écoute des centaines chaque année au fil des sélections nationales. Sans originalité aucune. Sans défaut rédhibitoire non plus. Juste une vieille recette éventée. Pas condamnable, ni sur un plan musical, ni sur un plan vocal. Car Eva, très bien dans les conditions du direct. De la voix, du coffre. Sauf que cela tourne au yaourt. Prononciation pâteuse et difficile de l’anglais, plombant ces trois minutes et déforçant une proposition trop classique et légèrement ennuyeuse.

Sebastian Roos – Never Getting Close

Faille temporelle musicale nous renvoyant droit dans les années 80. Ballade 100% saccharose écrite et composée par un auteur-interprète n’ayant plus écouté la radio depuis la chute du Mur de Berlin. Ringard et dépassé. Possible d’en rire, mais au troisième degré. Difficilement concevable que retenu pour une finale nationale… Sebastian, très bon chanteur. Excellente prestation en direct. Devrait tout de même se tenir informé des réalités de la musique actuelle. Choix à éviter, sous peine de ridicule et d’élimination sèche en demi-finale.

Alyona Gorbachova – Can We Dream

Autre ballade mélodramatique, comme déjà présentée et entendue des dizaines de fois à l’Eurovision. N’apporte rien de rien à la cause du Concours. Flirte ici avec l’académisme et le pompier. Encore une fois, déconnecté de la production musicale contemporaine. Alyona campe très bien la diva à voix emportée par l’émotion. Prestation vocale remarquable en direct. Suffisamment excentrique pour se faire aimer des Eurofans. Mériterait de représenter son pays un jour. Si possible avec une chanson intéressante, marquante, étonnante. Pas copié-collé lassant de morceaux antérieurs.

PROvokatsiya – Running Away From The Sun

Morceau dance agréable durant sa première seconde. Rentre dans le décor dès la deuxième. Composition pas inintéressante. Aurait mérité d’être remixé par professionnel. En revanche, paroles vagues et inaudibles, dévorées par l’excès d’auto-tune et une mauvaise balance. Irrite l’oreille en version studio. La fait saigner en direct. Prestation vocale amateur et guère à la hauteur des standards du Concours. Embarrassant et douloureux. À éviter à tout prix.

Aura – Čaravala

Ne comprends pas ce que vient faire dans sélection nationale du XXIe siècle. Vieille ballade d’époque soviétique. Pas atroce à l’oreille, mais terriblement datée. Impression d’écouter Radio Nostalgie Bélarus. Évite le ridicule, car interprétation professionnelle et remarquable d’Aura. Sait chanter, elle, au moins. Hélas, au service d’une chanson du passé. Interprète qui mériterait elle aussi de fouler la scène de l’Eurovision, mais avec proposition plus fraîche et plus actuelle. Choix à éviter, encore une fois.

Napoli – Let It Go

Oh Mon Dieu ! Quelle surprise ! Une ballade ! Cela faisait longtemps, tiens… Celle-ci, pas plus remarquable que les précédentes. S’écoute sans heurter les tympans, s’oublie tout aussi rapidement. Aucun intérêt notable, ni sur le plan musical, ni sur le plan émotionnel, encore moins sur le plan philosophique. Titre plutôt mal choisi, car en évoque un autre, nettement meilleur. Interprète très bien dans les conditions du direct, elle aussi. Mais où sont l’originalité, l’audace, le choc émotionnel ? Tous partis en Italie ? Suivant…

KeySi – No Love Lost

Jésus, Marie, Joseph… Encore une ballade… La sixième ! Celle-ci, plus moderne que les précédentes, toutefois. Composition plus proche du XXIe siècle. Pas inintéressant. KeySi très en direct. Très belle prestation vocale. Fait penser à Kasia Mos. En moins bien. Bref, meilleure du lot, mais pas Saint-Graal. Proposition molle du genou. Pourrait avoir du potentiel si remixée pour lui donner plus de punch. Avec très bonne mise en scène, pourrait s’en tirer à Tel Aviv. Choix risqué. Mieux vaudrait pour KeySi un retour l’an prochain avec une chanson plus percutante.

BLGN feat. Mirex – Champion

Au préalable, petite musique de circonstance :

Oui, alléluia ! Miracle de l’Eurovision ! Vous pensez que tout est perdu, l’invraisemblable se produit : une excellente chanson, enthousiasmante, mémorable, irrésistible, qui vous touche le cœur et l’esprit, qui vous emballe, qui vous emporte, qui fait vous danser sans plus vous arrêter et qui vient couronner en apothéose une Saison déjà chargée d’émotions. BLGN, meilleur que Gromee et Darude réunis. Mirex, du calibre de Cesár Sampson. Champion, susceptible de catapulter la Biélorussie en finale, vers des sommets insoupçonnés. Seigneur, où étaient-ils durant toutes ces années de disette musicale biélorusse ? LE choix à faire. LE seul à mes yeux et à mes oreilles. Le présentateur des auditions en a crié de bonheur et de surprise. Moi aussi !

Je n’attendais rien de cette sélection biélorusse. J’en ressors transfiguré. Champion est l’une des meilleures chansons que j’ai entendu cette Saison. Elle brille de mille feux, comme le plus beau des diamants égaré dans un seau à charbon. Si les jurés biélorusses s’avèrent des gens de bien et d’honnêtes professionnels, c’est elle qu’ils enverront à Tel Aviv. En comparaison, les autres concurrents ne valent pas tripette et condamneront la Biélorussie à l’élimination en demi-finale. BLGN et Mirex, en revanche, lui apporteront la reconnaissance eurovisionesque qui lui échappe perpétuellement. C’est beau, c’est dit.

LE SONDAGE

À votre tour à présent de vous exprimer ! Donnez-nous votre avis.

Sur ce, rendez-vous jeudi pour ce grand moment biélorusse !