JEUDI 11 MARS

Comme annoncé, le représentant nord-macédonien, Vasil Garvanliev a présenté Here I Stand, la chanson qu’il interprétera à Rotterdam, en mai prochain. La voici :

Here I Stand a été co-écrit par Vasil, avec Borče Kuzmanovski et Davor Jordanovski.

MERCREDI 17 MARS

Vive controverse sur le front nord-macédonien depuis la présentation de Here I Stand, au point que la télévision publique nord-macédonienne s’est fendue d’un communiqué particulier :

https://twitter.com/esc_macedonia/status/1371926166605602822?s=20

La MRT a donc réuni une commission interne, afin d’analyser la situation et de déterminer le devenir de sa participation à l’Eurovision 2021. En cause : le première version de la vidéo de Here I Stand et la révélation de la double nationalité de Vasil Garvanliev.

Rétroacte : le vidéoclip de Here I Stand a été filmé à la Galerie Nationale Daut Pashin Amam à Skopje. Y apparaissait brièvement une œuvre de l’artiste Žaneta Vangeli, évoquant les couleurs du drapeau bulgare :

Aussitôt, de vives critiques ont été émises en Macédoine du Nord contre cette représentation supposée du drapeau bulgare. Si vives que le vidéoclip a été édité, de sorte à ne plus la montrer, et que Vasil a présenté des excuses publiques :

Chers tous,

Bien qu’avec la vidéo pour l’Eurovision, je ne voulais rien montrer d’autre que de la musique et de l’art, je suis vraiment désolé pour la mauvaise interprétation du travail de notre célèbre artiste Žaneta Vangeli. Aucune personne impliquée dans la réalisation de la vidéo, ni aucun représentant de l’institution mentionnée n’est intervenu intentionnellement dans la production artistique de la Galerie nationale Daut Pashin Amam. La galerie elle-même a déclaré que l’œuvre était exposée de cette manière depuis plusieurs années. Afin d’éviter des implications négatives supplémentaires et une fausse représentation de cette œuvre d’art, nous avons décidé de supprimer les images qui y font référence. Merci pour le grand soutien que vous me donnez ces jours-ci. Croyez en mon intention sincère.

Je chante et représente la Macédoine et le drapeau macédonien depuis plus de 20 ans et cela restera ainsi.

Je vous aime,
Vasil

La controverse n’a cependant pas cessé. Au contraire : ayant découvert que Vasil, né à Strumica, à l’est du pays, possédait également la nationalité bulgare, les critiques et les commentaires haineux ont déferlé sur la MRT et le chanteur. Des pétitions ont été lancées appelant à son retrait et à l’élection d’un nouveau représentant. Politiciens et citoyens nord-macédoniens ont pris la parole dans les médias et sur les réseaux sociaux, certains contre, certains pour. Les Eurofans s’en sont alors mêlés, soutenant Vasil et lançant des pétitions pour son maintien.

Prise dans la tourmente, la MRT a donc décidé de confier le choix finale à une commission. Celle-ci est chargée d’évaluer et d’analyser les différentes réactions, de prendre en considération les obligations du diffuseur dans le cadre de l’UER et du Concours et finalement, de décider de la participation nord-macédonienne à cet Eurovision 2021.

Vasil, de son côté, a publié une vidéo, dans laquelle il remercie ses soutiens :

MARDI 23 MARS

La controverse est terminée. La MRT a confirmé que Vasil Garvanliev la représenterait bien à l’Eurovision 2021. Le chanteur s’en est aussitôt réjoui :

https://twitter.com/esc_macedonia/status/1374376781722001421?s=20
https://twitter.com/VGarvanliev/status/1374375978781188096?s=20

MERCREDI 5 MAI

Vasil a accordé ce weekend une interview au magazine britannique Attitude. Il y est revenu sur son parcours personnel et musical, ainsi que sur sa participation à l’Eurovision.

Vasil a donc fui la Macédoine avec sa famille à la fin des années 90, pour échapper à la guerre du Kosovo. Ils se sont installés aux États-Unis, mais en ont été expulsés en 2004. Vasil a alors vécu entre l’Italie, le Royaume-Uni et le Canada où il s’installe jusqu’en 2018 et son retour en Macédoine du Nord.

Vasil détaille les difficultés auxquelles il a été confronté à son arrivée aux États-Unis, à commencer par l’ostracisme et le harcèlement dont il a été victime durant son parcours scolaire. Son expulsion du territoire américain a été un autre moment traumatique.

Vasil revient également sur son parcours en tant qu’homosexuel. Il est l’une des premières personnalités nord-macédonienne à avoir révélé publiquement son homosexualité. Sa famille proche et ses meilleurs amis étaient au courant depuis ses seize ans et l’avaient accepté facilement. En revanche, en Macédoine du Nord, parmi sa famille élargie, il devait taire cette vérité. En effet, le pays n’a dépénalisé l’homosexualité qu’en 1996. La première marche des fiertés n’y a été organisée qu’en 2019. Et ce n’est qu’en 2020 qu’une loi anti-discriminatoire a été adoptée.

Jusqu’ici Vasil n’avait donc pu vivre librement qu’en dehors de son pays natal. À chaque retour en Macédoine du Nord, il avait l’impression d’endosser un masque et un rôle et de perdre sa liberté. Il a alors considéré que c’était de sa responsabilité en tant qu’artiste et figure médiatique de dire la vérité à ce sujet et de montrer l’exemple. Il a toujours été soutenu dans ses démarches par sa mère, une personnalité plus ouverte et moderne que les autres.

Vasil est également revenu sur les attaques personnelles dont il a fait l’objet cette année, révélant que durant deux semaines, il n’a pu quitter son domicile. Il recevait chaque jour des centaines de messages haineux et homophobes, une véritable attaque concertée selon ses termes. La vague s’est calmée, mais des insultes lui sont toujours adressées au quotidien via Internet et les réseaux sociaux.

Tout cela, loin de l’affaiblir, l’a rendu plus déterminé encore à lutter contre l’homophobie et à devenir un ambassadeur de la cause LGBT dans les Balkans. Il remercie tous ses contempteurs, car ils l’ont rendu plus fort encore. Il se sent désormais un vainqueur, quel que soit son résultat à l’Eurovision. Chanter Here I Stand sur la scène de l’Ahoy sera une libération pour lui et, il l’espère, une source d’inspiration pour les autres.

(avec la collaboration de Sakis)

Crédits photographiques – UER