… Et Brighton 1974 aussi. Mais comment cela peut-il être possible ? Et bien aujourd’hui nous allons parler d’un fait qui peut paraitre impossible : finir deux fois dernière du concours. Pour résumé voici la « nemesis » de Johnny Logan et Loreen. Et il s’agit de…
Anne-Karine Strøm
Anne-Karine Strøm est née le 15 octobre 1951 à Bøler, ville de 10 000 habitants dans la banlieue de Oslo. A l’age de 12 ans , elle remporte un concours de chant dans un restaurant fréquenté par la jeunesse Osloïte. Cette victoire lui permet d’enregistrer un disque et de participer à une émission de télévision. Quelques temps plus tard, elle intègre le groupe Beefeaters et l’orchestre de Finn Eriksen, tout en ayant en tête une carrière solo qu’elle voudrait internationale (elle adore chanter dans la langue italienne). Alors, après avoir sorti son 1er album en 1971, Drømmebilder (images de rêve), quoi de mieux que de tenter la sélection norvégienne pour le concours Eurovision.
Et l’Eurovision dans tout ça ?
Entre Anne-Karine et le Melodi Grand prix, c’est une grande histoire d’amour (c’est peu de le dire). Sa 1ère tentative pour représenter la Norvège a lieu en 1971. 18 concurrents sont annoncés. Parmi eux, Odd Børre gagnant de la sélection en 1968 et Inger Jacobsen élue en 1962. Le résultat est décidé par 14 jurés venus de sept régions différentes du pays. Contre toute attente, c’est l’une des plus jeunes candidates (mais pas le plus jeune, la benjamine n’ayant que… 10 ans !) Hanne Krogh, 15 ans qui a le droit de partir pour Dublin avec son titre Lykken er (Le bonheur c’est…). Celle-ci sera aussi une multi récidiviste de l’ESC puisqu’on la reverra en 1985 (édition qu’elle gagnera au sein du duo Bobbysocks) puis en 1991 (où elle terminera 17ème sur 22 avec le groupe Just4Fun). Quant à Anne-Karine, car c’est elle qui nous interesse, elle ne finit qu’à une petite 10ème place avec sa chanson Hør litt på meg (Ecoutez-moi).
En 1972, alors qu’un album avec l’orchestre de Finn Eriksen est publié, elle décide de retenter sa chance au MGP. Cette année le mode de sélection est comment dire… Étrange ! 5 chansons interprétées par 2 artistes différents avec une orchestration… Différente, elle aussi. Voilà donc Anne-Karine obligée de partager Håp (Espoir) avec une certaine Ellen Nikolaysen ! Et quelque chose me dit qu’elles seront toutes 2 appelées à se revoir ! Bref, l’espoir fait vivre et heureusement car cette ritournelle ne finira que 4ème et c’est le duo Grethe Kausland & Benny Borg qui partiront vers Edimbourg avec le titre Småting (Petites choses).
Les années se suivent et se ressemblent et en 1973 qui est présente au MGP ? Anne-Karine, bien sûr ! Mais cette fois-ci, elle n’est pas seule. Elle fait partie d’un quatuor nommé les Bendik Singers. 2 garçons, 2 filles (comme ABBA) et dont l’autre membre féminin est… Ellen Nikolaysen ! Comme on se retrouve ! Les modalités de la sélection norvégienne sont les mêmes que celles de l’année précédente. Et cette fois-ci, le destin sourit à notre star du jour ! La voilà ENFIN qui s’envole pour le grand concours Eurovision de la Chanson car Å for et spill (c’est juste un jeu) est élu par les membres du jury du pays. De plus, l’UER fait une fleur aux nations scandinaves car en 1973 (jusqu’en 1976) le choix de la langue est libre. Une occasion que la NRK (chaine publique de Norvège) ne va pas laisser passer. Å for et spill devient It’s just a game et en plus de l’anglais, on peut y entendre : du français, de l’espagnol, de l’italien, du néerlandais, de l’allemand, du gaélique, du serbo-croate, de l’hébreu, du finnois, du suédois et bien sûr du norvégien ! Pour résumé, toutes les langues des pays participants à la 18ème édition de l’ESC y sont ! Est-ce que cet appel du pied a fonctionné ? Et bien… OUI ! Les Bendik Singers intègrent le top 10 en prenant une belle 7ème place (sur 17). Pas mal !
Vous en voulez encore ? Car ce n’est clairement pas fini ! Nous sommes en 1974. Alors que 4 suédois vont déferler sur le monde à coups de notes pop/disco addictives, Anne-Karine et son mari Frode Thingnæs qui a composé Hvor er du ? (Où es-tu ? devenu plus tard The First Day of Love grâce au règlement de l’UER) s’envolent vers Brighton Ce qui signifie qu’elle a bien évidemment gagné le MGP avec une toute petite minuscule avance sur les 2ème et 3ème concurrentes (cette dernière n’étant autre que Ellen Nikolaysen, toujours elle. Ça en devient presque comique). Le choix de la chanson passe d’ailleurs assez mal aux yeux (et surtout aux oreilles) des norvégiens car le titre n’est pas un succès sur sa terre natale et les critiques pleuvent. The First Day of Love serait trop norvégo-norvégien et pas assez tourné vers l’international. A croire qu’ils avaient le nez fin car le soir du 6 avril 1974, le pays rejoint l’Allemagne, le Portugal et la Suisse (cf les lanternes rouges 1974) tout en bas du classement. Un joli camouflet !
Vous pensez que cet échec aurait mis un frein à son envie de participer au MGP ?… Et bien noooon ! Puisqu’on retrouve Anne-Karine dès l’année suivante. A croire que la scène norvégienne avait du mal à se renouveler. Mais le jury, peut-être lassé de voir la jeune chanteuse ne la classe que 4ème ! Et vous voulez savoir qui part en direction du pays voisin ? Et bien c’est Ellen Nikolaysen avec Det skulle ha vært sommer nå (devenu pour l’ESC Touch My Life (With Summer)). Comme je l’écrivais au-dessus, le renouvellement, tout ça…
Et là, vous vous dites « non mais c’est bon, Lolotte, il commence à être long ton article. Tu vas nous faire toutes les tentatives de AKS (appelons-la ainsi) au MGP ? ». Bon si je vous dis qu’elle revient en 1976, vous promettez de ne pas me taper, hein ? Lors de cette édition (qui sera la dernière à utiliser le format des 2 orchestrations différentes), on peut dire que la chanson défendue par notre sympathique scandinave n’a fait qu’une bouchée de la concurrence (elle obtient quasiment le double de points que son dauphin… Dont on reparlera, d’ailleurs !). Hélas, 2 mois plus tard, c’est un autre scénario qui se joue. Toujours accompagnée de son mari (et chef d’orchestre) et toute de doré vêtue dans le plus pure style disco propre à son époque, AKS s’avance sur scène. Et bien que Mata Hari soit un titre fort entrainant (je vous garantie qu’il est impossible de ne pas bouger la tête), cela n’entraine pas les jurys internationaux dans une folle farandole. Résultat : 7 points (3 des Pays-Bas et 4 du Portugal, on les remercie !) et… UNE DERNIERE PLACE !!! En terminant 2 fois à la dernière place Anne-Karine Strøm entre dans la légende du concours. Drôle de façon d’y entrer certes, mais au moins, on parle d’elle !
Et après l’Eurovision ?
Cette 2ème dernière place sonne toutefois le glas des participations de AKS au MGP (vous êtes rassurés, n’est-ce pas ?). Et même si elle publie 3 autres albums en solo (en 1978, 1982 et 1986) et fait des apparitions dans des cabarets c’est vers une toute autre carrière qu’elle se tourne au début des années 90. En effet, elle obtient son diplôme de journaliste, métier qu’elle exerce toujours à l’heure actuelle.
Après avoir vécu avec le compositeur Frode Thingnæs, Anne-Karine a épousé, à la fin des années 70, son compatriote le chanteur Ole Paus. Ils ont divorcé quelques années plus tard. Leur fils Marcus (qui est lui aussi auteur-compositeur) est né le 14 octobre 1979, la veille de l’anniversaire de sa mère.
En octobre prochain, Anne-Karine fêtera ses 74 ans.
A la semaine prochaine, pour une nouvelle lanterne rouge (qui sera beaucoup plus courte) !
Crédit photos : Lolotte pour l’EAQ et le site Genius
Crédit vidéos : chaines Youtube de : ESCNatcompJunkyard / sal / Schlagerparty / Georgios Symeonidis / Library Of Eurovision /
Je suis assez fasciné par la prestation de 1973 (Bendik singers – It’s just a game).
La construction musicale est « démente » et cela en fait une chanson jazzy quasiment inchantable tellement les lignes mélodiques s’entremêlent et obligent les voix à se répondre sans temps mort.
Par certains aspects, cela me rappelle la virtuosité des Manhattan Transfer. (Un cran en dessous cependant…)
Alors certes, ça ne sonne pas « Eurovision » mais le fait que ce genre de chanson atypique puisse être proposée me réjouit toujours profondément.
Cher Garfield,
On ne va pas se mentir. Il m’arrive de chantonner It’s just a game depuis que j’ai rédigé cet article. Titre mélodique et qui se retient !
A La Haye, les votants ont décidé qu’on hait l’artiste qui a fini déjà dernière d’une édition précédente et elle est indécollable d’Ellen NIKOLAYSEN.
Même si elle a fini dernière, il n’empêche que Mata-Hari a été une deuxième fois mentionnée parmi les chansons de l’Eurovision et je préfère nettement la chanson d’Efendi. Il est drôle aussi de constater que sur les pages aujourd’hui, il y a Ecoutez-moi, le sien et Répondez-moi de Gjon’s Tears. Personnellement, je me laisse envoûter par https://youtu.be/5UdiEAW7I0Q?si=X5diGVtZqsIneZlA
J’aime comme je l’ai déjà dit le mélange des langues et avec la chanson It’s just a game, je suis servie. Je comparerai cette chanson avec une autre chanson de l’Eurovision qui hélas a échoué en demi-finales : https://youtu.be/nTLAzDVu80E?si=-Bt8DVxdvQkKFOse.
Marie MYRIAM a été découverte dans le restaurant de ses parents par Jean-Paul CARA;
Ma chanson préférée de son répertoire est The first day of love et là, je pense au https://youtu.be/ESy_JHrT-d4?si=31t0W_8liSWJiLYd
J’espère qu’elle s’épanouit auprès de son second mari et de son fils qui peut-être tentera sa chance sur la NRK pour l’Eurovision comme journaliste : https://youtu.be/5ErXOZHOdwY?si=SYfGcgSUauQEyLrC
Ton article est brillant et teinté d’humour.
Chère Pauline,
Merci pour ton compliment. Je préfère la Mata-Hari de AKS que celle d’Efendi. Je n’aime pas le rythme de la chanson de cette dernière. Pour It’s just a game, c’est justement un jeu de reconnaître toutes les langues dans ce titre.
À la semaine prochaine !
Ton article est brillant et plein d’humour Lolotte ! AKS méritait toutes ces lignes mais pas ses deux lanternes rouges ! Certes, je ne l’aurais pas classée en haut du tableau mais son aventure à l’Eurovision est bien rude et trop sévère !
En revanche, le morceau de 1973 reste un bonheur absolu à mes oreilles.
Merci d’avoir retracé ce copieux parcours, plein de rebondissements. Quel destin encore !
Cher Phileurophage,
On ne va pas changer nos habitudes donc… Merci pour ton compliment ! Je vois que It’s just a game récolte tous les suffrages. Pas étonnée que cette contribution norvégienne ait terminé dans le top 10 ! Quant aux 2 titres de AKS en solo, autant The first Day of love ne me fait ni chaud ni froid autant Mata-Hari est un plaisir presque coupable !
– Ces deux lanternes es à mon sens. rouges à deux ans d’intervalle sont totalement immérité à mon sens.
– Contrairement à la grande majorité, je n’aime guère la chanson de 1973, et ma préférée entre les deux autres est celle de 1974, « The first day of love » et je préfère le « Mata Hari » azerbaïdjanais… Je crois que tu vas me maudire mais c’est moi et mes goûts si particuliers…
En 1974, les 3 lanternes rouges étaient 4. Voilà pourquoi Lolotte ne l’ a pas mise il y a 15 jours et fait un article spécial sur cette chanteuse détenant la place peu enviable de double lanterne rouge, la seule alors que nous avons 2 doubles vainqueurs. Dire qu’ en groupe, elle a terminé 7ème, un des meilleurs classements pour ce pays à l’ époque. La Scandinavie avait formé un bloc avec la Suède 5ème (classement qu’ elle a obtenu 10 fois), la Finlande 6ème (son meilleur classement jusqu’ à sa victoire en 2006 soit 33 ans, qui dit mieux pour améliorer son meilleur classement et de nombreux points commun avec 1962) et la Norvège 7ème. Ce groupe a squatté le concours de 1973 à 1976 dans l’ ordre en groupe, l’ année suivante, une des femmes représentante principale, les autres choristes, l’ autre femme l’ année suivante puis à nouveau celle de 1974 mais encore dernière. Anita Skörgan les a relayé l’ année suivante jusqu’ en 1983 avec une pause en 1980 car elle était représentante principale en 1977, 1979 et 1982 au piano en duo avec son mari représentant principal en 1978 dont elle était une choriste et la principale en 1983 et en 1981 pour Finn Kalvik mais 2 zéros pointé.
La chanson de 1976 est dans le bêtisier dans la séquence des looks.
La semaine prochaine, c’ est un pays plus habitué aux victoires qu’ aux lanternes rouges.