Samedi, c’était soir de fête en Suède pour la troisième série du Melodifestivalen ! Cette dernière serait-elle enfin l’occasion de sabrer le champagne après une première moitié de sélection décevante ? À voir avec Loreen/Rémi, ou Rémi/Loreen, c’est selon …

Spoiler : toujours pas de décollage en vue du côté de la sélection suédoise. Peut-être un léger mieux par rapport aux deux premières séries, et encore, ce serait vraiment faire excès d’optimisme (ou fermer les yeux) que d’affirmer telle ineptie. Le Melodifestivalen 2023 n’y échappera pas : cette édition est tout simplement l’une des plus faibles de l’histoire d’une sélection au hype encore intact il y a quelques années. Ça, c’était pour l’introduction. Le positif, c’est que la série 3 a au moins eu le mérite d’offrir des propositions de facture correcte au public de la Sparbanken Arena. Pas transcendantes : « correctes ». Une seule exception peut-être, fort perceptible dans les hurlements du public à l’annonce d’un duo de jeunes norvégiens … Mais à Loreen de juger.

Comme à son habitude, la production du Melodifestivalen n’a publié sur YouTube que les titres non qualifiés pour la finale. Les finalistes direct ne seront tous disponibles à l’écoute libre qu’à l’issue de la quatrième et dernière série. Toutefois, vous pouvez les découvrir via le replay de la série 33, sur SVT play.

Paul Rey – Royals

Prestation seulement disponible dans le replay de la série 3

Enfin un direk till final pour un Paul Rey plutôt habitué par le passé aux Andra Chansen ! Résultat d’un changement de style ? Peut-être. L’artiste délaisse ici ses influences soul et R&B pour une pop beaucoup plus énergique et dynamique, mais aussi conventionnelle. Si je devais résumer Royals en deux mots, ce serait sympathique et inoffensif. Dans le sens où si son aspect « hymne » le dote d’une petite efficacité à l’accroche toute relative, le titre résonne surtout comme une proposition guère novatrice en son genre et très formatée scandic pop dans le style. De quoi offrir trois minutes loin d’être désagréables, mais aussi pas très marquantes. Suffisamment toutefois pour passer directement le cap de cette série 3 sans trop d’encombres.

Casanovas – Så kommer känslorna tillbaka

Que dire sur la proposition de Casanovas si ce n’est qu’elle participe au traditionnel quota annuel « schläger-dansband » dont je suis tout sauf le public cible ? Qu’objectivement, elle a été vue, entendue, revue et réentendue au Melodifestivalen, mais il n’empêche : le charme opère souvent sur ce type de titre très kitschouille sur les bords, mais inscrites dans les cultures musicales scandinave et germanophone. Ce n’est pas de la plus grande fraîcheur dans le style, mais Så kommer känslorna tillbaka reste une contribution de bonne facture, dotée d’une petite efficacité à même de parler davantage à meilleure cible que moi.

Melanie Wehbe – For The Show

Disons le franchement  certes, For The Show est loin du chef d’oeuvre tant sa production et sa construction, simples pour ne pas dire simplistes, reposent sur un esprit déjà vu et revu au Melodifestivalen. Certes, Melanie Wehbe – essentiellement connue jusqu’à peu en tant qu’autrice-compositrice – n’est pas la meilleure vocaliste du plateau. Mais le titre, au demeurant agréable, propose un refrain très accrocheur, qui rentre immédiatement dans la tête pour ne plus en sortir. Surtout, il est porté par la fraîcheur de l’interprétation d’une Melanie au bonheur communicatif pour sa première au Mello. Elle est l’atout maître d’un titre qui, sans son interprète, perdrait beaucoup en intérêt.

Nordman – Släpp alla sorger

Le mythique groupe signe son grand retour en sélection avec un titre dans la droite lignée de l’identité pop-folk qui a fait leur succès. Släpp alla sorger n’est pas d’une folle originalité dans le thème, et résonne comme le cousin de précédentes propositions du Melodifestivalen. Peut-être toutefois un cousin mieux fichu que le reste de la famille, grâce à une composition et une production efficaces, qui rendent l’ensemble très plaisant Je n’en ferai peut-être pas mon pain quotidien, tout comme le maronnier est loin d’être révolutionnaire dans son genre, mais la chanson a au moins le mérite d’avoir une âme et une identité face à la déferlante de scandic pop insipide et formatée de cette édition.

Laurell – Sober

L’une des autrices-compositrices phares de l’Eurovision a l’art du mi-figure mi-raison. De sa plume peuvent aussi bien sortir du feu (She Got Me, Stones) que de l’eau froide (Bigger Than Us), voire un pétard mouillé (Sisters). Pour ses premiers pas au Mello en tant qu’interprète, c’est plutôt de l’une des deux dernières catégories que relève son Sober aux recettes mille et une fois exploitées, ré exploitées et sur exploitées, pour terminer ici en énième ressaucée d’un titre pop assez insipide. Les danseurs inexplicablement affublés de costumes d’ours brun assez hideux mis à part, l’euromonde a sans doute connu pire. Mais le bas du panier accueille à osier ouvert ce titre faible et oubliable, qui n’est n’ailleurs pas aidé par la prestation vocale plutôt assez désagréable de Laurell.


Ida-Lova – Låt hela stan se på

Pour un bon sommeil, rien de tel qu’une jolie berceuse. C’est en somme ce que nous propose ici Ida-Lova avec sa ballade suédo-suédoise, certes pas désagréable à l’écoute et qui a le mérite d’ajouter une dose de suédois à une setlist du Melfest essentiellement portée sur l’anglais. Délicatesse, douceur et fragilité sont les maîtres mots de cette proposition dont l’interprétation de la jeune artiste est à l’image parfaite. Mais malgré une tentative d’envolée finale, Låt hela stan se på est beaucoup trop plat et linéaire pour parvenir à accrocher le spectateur, qui sera d’autant plus tenté de sombrer dans les bras de Morphée comme ce fut mon cas. Ida-Lova sera toutefois une artiste à suivre dans les prochaines années.

Marcus & Martinus – Air

Prestation seulement disponible dans le replay de la série 3

Croisement entre Every Minute d’Eric Saade et Téléphone d’Elia dans l’esprit – mais en mieux, Air reprend tous les codes du scandic bop à haut potentiel eurovisionesque, et offre enfin à cette bien terne édition du Melodifestivalen un titre à la hauteur de la réputation ordinaire de la sélection suédoise. Air ne crie sans doute pas Winner Alert pour l’Eurovision et ne transpire pas d’une once d’originalité, mais c’est à ce jour le seul titre capable d’envisager un voyage serein à destination de Liverpool. C’est un ensemble plutôt bien produit que nous proposent Marcus & Martinus, qui portent ici un package titre-scéno de bonne facture, quand bien même on se doute qu’il n’y a pas que du 100 % bio dans une prestation vocale correcte.

Alors, Loreen, elle est contente ?

« Encéphalogramme plat sous le ciel de Lidköping ». Tel est le titre que donnerait Loreen à cet épisode si la production avait eu la décence de l’interroger sur le sujet. Si la série 3 était peut-être un soupçon moins somnifère que sa prédécesseure (quoique difficile de résister en la matière à la soporific song d’Ida-Lova …), rien de neuf sous les Tropiques quant à la qualité du global. Inutile pour le moment de réserver l’Avicii Arena : le compte n’y est toujours pas. Rien de catastrophique en somme samedi soir (si ce n’est Laurell et les ours bruns), mais pas de quoi sauteur au plafond de la Sparbanken Arena.

Néanmoins, la Suède aura pu enfin découvrir des candidats potentiels pour l’Eurovision : Marcus & Martinus. Extrêmement populaires en Scandinavie, les jumeaux norvégiens pourraient bien faire exploser les compteurs du vote par application chez les jeunes générations en finale. Le tout grâce à un Air au potentiel eurovisionesque facile et déjà exploité, mais garant d’une efficacité scandinave à toute épreuve. Au vu des forces en présence à ce jour, le duo serait en tout cas le seul capable de faire le voyage jusqu’à Liverpool et de s’en tirer sans trop de difficultés. Les vingt autres propositions peuvent, pendant ce temps, aller gentiment se rhabiller dans les vestiaires des hockeyeurs, et faire acte de figuration dans le public. Ce qui ne m’empêche pas d’attendre toutefois bien mieux d’une proposition suédoise pour l’Eurovision.

Faute de changement de cap majeur dans le line up et dans le style, le Melodifestivalen continuera son irrésistible descente sur la piste rouge. Les audiences fragilisées de cette édition (qui demeurent cependant à un niveau exceptionnel et inégalable de part d’audience, à même de faire rougir jusqu’à la planète Mars) sont d’ailleurs un indicateur à suivre au plus près. Un dernier espoir demeure toutefois en une série 4 apparemment jugée comme largement au-dessus des trois précédentes (selon ceux qui ont participé à la pré écoute), et dans laquelle figure la tant attendue et désirée Reine Loreen qui, selon les dires, nous prépare un retour de …

Wait, See, and Cross The Fingers !

Melodifestivalen 2023 : quelle prestation vous a le plus séduit samedi soir ?
39 votes
×

© SVT