Lanterne rouge : dernier d’une course sportive et, de manière générale, de toute compétition ou classement.
Est ce un hasard si ce nouveau feuilleton qui va se poursuivre tout l’été débute au moment où le Tour de France bat son plein ? Si il est de coutume de fêter le vainqueur (ce qui est normal), une place est toujours faite au dernier de la Grande boucle. Car, bien que finissant au fond du classement , il aura fait le même trajet, connu la même souffrance (et même pire) que le gagnant. Et concernant l’Eurovision, me direz-vous ? Et bien, pas un mot sur celles et ceux qui auront connu la même scène, le même trac que nos heureux vainqueurs (dont vous connaissez, j’en suis sûre les noms par cœur). Réparons cet affront en nous penchant sur chaque malheureux loser et comme le chantait une grande philosophe québécoise (qui, veinarde, a gagné, elle et qui en cette année 2024 a trouvé son successeur.e) :
« Les dernier seront les premiers »
Une nouvelle saison qui s’ouvre sur une édition assez particulière. En effet l’année précédente avait vu un fait peu commun. Quatre pays avait gagné l’Eurovision. Un tirage au sort eu lieu afin de déterminer qui de l’Espagne, le Royaume Uni, la France et les Pays-Bas organiserait le concours 1970. C’est le dernier pays sus-cité qui remporta la timbale. Mais, ce n’est pas tout. Cette 1ère édition se déroula avec un nombre restreint de pays. La Finlande, la Suède, la Norvège, l’Autriche et le Portugal décidèrent de ne pas participer afin de protester contre les résultats de 1969 et le règlement en vigueur. Mais trêve de bavardage, intéressons-nous à notre star du jour. Il s’agit de…
David Alexandre Winter
Ce nom ne vous est pas inconnu ? C’est normal et nous en reparlerons plus tard ! De son vrai nom Lion Kleerekoper, il est né le 4 avril 1943 à Amsterdam. Sa vie commence par un drame car le très jeune Lion et sa famille sont déportés dans différents camps de concentration. Il ne doit sa survit que grâce à la protection des déportés (et sera d’ailleurs, un des rares enfants à avoir réchapper aux atrocités). A la fin de la guerre et après des recherches, la famille Kleerekoper est enfin réunie. Celle-ci est diamantaire et c’est ainsi que le jeune garçon suit le destin familiale en apprenant à tailler les fameuses pierres précieuses. Mais au sortir de l’adolescence, Lion a des envies de voir le monde. Il part un an pour les États-Unis, puis Israël et la Turquie avant un retour aux Pays-Bas où il devient animateur radio et DJ. C’est au même moment que son vrai 1er contact avec le monde de la musique se fait. Entre 1966 et 1968, il devient le chanteur et leader d’un groupe appelé les « Daddy’s Act » et dont le 1er enregistrement est la reprise du titre des Beatles, Eight days a week. Il enregistre ensuite deux titres en néerlandais, part pour Londres quelques temps mais…
… C’est à Paris que vient finalement le succès. Lion (qui se faisait aussi appeler johnny Van Dooren quand il était DJ) devient David Alexandre Winter grâce à Leo Missir, producteur de Riviera Record, maison de production affiliée au géant Barclay. Nous sommes en 1969 et la chanson Oh lady Mary devient un énorme tube. Plus de un million de 45 tours (oui je sais le terme ne nous rajeunit pas !) sont vendus en cette année érotique. Un titre qui n’est pas sans rappeler le style Tom Jones en vogue dans les sixties !
Le single sera numéro 1 en France pendant 9 semaines et sera aussi un succès en Europe. Numéro 1 en Belgique. Numéro 2 en Allemagne (de l’ouest), Numéro 4 en Italie et enfin dans le top 5 en Espagne et surtout aux Pays-Bas, pays natal de l’artiste. Ce triomphe continental donne des idées à certains car se profile l’année 1970…
Et l’Eurovision dans tout ça ?
Qui dit 1970 dit nouvelle décennie pour le concours. Et quoi de mieux pour la débuter que de choisir un artiste au succès tout récent et qui en plus est né dans la ville-hôte ! C’est ainsi que les dirigeants de RTL optent pour le jeune néerlandais en espérant bien surfer sur la vague du hit Lady Mary. Charge au compositeur Yves de Vriendt et au célèbre parolier Eddy Marnay (au CV gargantuesque et auteur de Un jour, un enfant qui permit à Frida Boccara de remporter le concours l’année précédente) de s’occuper du projet. C’est ainsi que né je suis tombé du ciel. Et si il y en a un qui est tombé… Bien bas, c’est bien David Alexandre !
Car arrive le 21 mars (1er jour du printemps… Du moins à l’époque), jour de finale de notre concours musical préféré ! Fort se son triomphe récent, DAW (appelons-le ainsi) sent que le trophée ne peut lui échapper. Il passe en 8ème position juste après Mary Hopkin (filleule artistique des Beatles et qui, elle aussi, a connu la célébrité) et juste avant une mégastar en devenir : Julio Iglesias.
La légende veut que, fort de son potentiel, DAW impose en cette nuit hollandaise, le silence pendant le processus de vote. Mal lui en a prit car c’est l’irlandaise Dana (pas Internationale, l’autre) qui remonte sur la scène de la RAI Amsterdam Complex. Mais double affront pour le représentant luxembourgeois en plus de finir dernier, il repart avec 0 point dans sa valise (et les quolibets de ses camarades de promotion dont un certain Henri Dès) ! Un fait unique pour le duché (encore actuel, à l’heure où j’écris ses lignes). Cette histoire inspira Thierry de La Fontaine, arrière arrière arrière arrière arrière arrière petit fils du célèbre Jean :
« Parfois, il faut savoir raison et modestie gardées
Et garder sa bouche fermée »
Et après l’Eurovision ?
Bien que Je suis tombé du ciel eut été un échec eurovisionesque, le 45 tours se vend fort bien (850 000 exemplaires tout de même). DAW continue sa carrière aussi bien dans la langue de Molière que celle de Goethe, de Dante et de Cervantès. Dans la foulée du concours, il épouse Catherine Fefeu, un mannequin. Ils ont deux enfants ; Mickael en 1972 et Ophélie en 1974. Et oui Ophélie Winter. Notre Ophélaï superstar des années 90. On se rappelle tous de Dieu m’a donné la foi, Tu es le feu qui m’attise et Shame on U !
Mais entre 1975 et 1980, lassé et épuisé d’une vie de concerts et de succès, DAW quitte la France et sa famille (Ophélie lui en voudra énormément d’ailleurs, on peut la comprendre) pour s’installer aux États-Unis. Il emménage plus précisément près de Boston dans un ferme où il fait construire un studio d’enregistrement. Car même retiré du monde de la chanson, le virus de la musique ne l’a pas complètement quitté. Il se remarie, devient à nouveau père et pour arrondir les fins de mois devient vendeur de voitures. En 1993, on lui détecte une tumeur sur une de ses cordes vocales qui sera opérée avec succès. En 2004, il enregistre un titre qui lui tient à cœur et qui raconte les premières années de sa vie.
En 2010, il intègre la troupe de Ages tendres et Têtes de bois. Celle-ci joue à guichets fermés. Pour finir, il enregistre (à Nashville dans le Tennessee) un dernier album de style country en 2014.
David Alexandre Winter a fêté ses 81 ans le 4 avril dernier.
A la semaine prochaine pour une nouvelle lanterne !
Crédit photo : Lolotte pour l’EAQ
Crédit vidéos : chaine Youtube de : Phlippe Poulain/Schlagerparty/100% chanson française/ et de David Alexandre Winter en personne !
– Très heureux de retrouver cette rubrique où je redécouvre des informations ou je les apprends carrément. Et puis faire honneur à des lanternes rouges ce n’est pas courant mais très respectueux.
– DAW ne méritait pas cette lanterne rouge mais malgré sa notoriété du moment, il n’aurait pas mérité mieux q’un milieu de classement.
Il jouait presque à domicile puisqu’ il représentait le Luxembourg dans sa ville natale. Il ne vaut mieux pas qu’ Ophélie Winter se vante d’ avoir un père ayant participer à l’ eurovision.
En 1970, j’ aimais surtout la Yougoslavie (dans la carte postale, il y avait un train à vapeur en gare de Lublijana), l’ Irlande (la gagnante), l’ Allemagne, l’ Espagne et le Royaume-Uni. J’ ai établi mon top 10 habituel. Sauf la France,j’ ai ignoré cette chanson.
On ne va pas se mentir. C’est très très compliqué entre Ophélie et son père !
Tout d’abord, tout comme Pauline je me réjouis de retrouver cette rubrique ! Quelle joie !
Avec tout le respect que j’ai pour DAW, cette lanterne rouge m’a toujours semblé méritée. Rien n’est bon dans ce morceau loin, très loin de mon Top 3 cette année-là : l’Irlande, le merveilleux et regretté Guy Bonnet et la cultissime Katja Ebstein.
Merci pour ton commentaire Phil ! Ça m’encourage pour continuer cette rubrique qui me tient à cœur !
Je me réjouis du retour de cette rubrique. C’est marrant que j’emploie ce mot en 1970, puisque RETOUR est mon titre préféré de cette édition. Comme je l’ai dit à ZIPO, j’aimais aussi les chansons de JEAN VALLEE, de Mary HOPKIN et j’ajoute aussi celle de Gianni MORANDI qui est devenu une grande star en Italie. Maman m’avait dit qu’elle appréciait celle de Julio IGLESIAS,
Mais Tombé du ciel ne me plaît pas. Peut-être chante-t’il trop fort ? Je suis plus triste pour Raymond LEFEBVRE que pour lui.
Je préfère https://youtu.be/AJ5Dp-_QFQ8?si=lgF1GiJA1XlkEi3x.
De ce fait, L’étoile du berger me plaît davantage.
Ophélie WINTER a échoué aux Victoires de la Musique.
Chère Pauline,
Bien vu pour le lien avec la chanson de Jacques Higelin. Je n’ai pas pu m’empêcher d’y faire référence ! A la semaine prochaine !