La rédaction poursuit sa présentation de la promotion artistique 2025 de notre cher concours. Aujourd’hui, on s’arrête en Italie, dans un coin de Toscane, pour partir à la rencontre de celui qu’on n’attendait pas, le surprenant Lucio Corsi.

Qui est-il ?

Qui est Lucio Corsi ? C’est la question que s’est posée la moitié de l’Italie (voire les trois quarts !) lorsque les artistes du Festival de Sanremo furent annoncés en décembre. (Le quart restant, c’étaient les mélomanes fans de cantautore et d’artistes émergents, qui à présent disent fièrement qu’ils connaissaient sa musique avant que sa popularité n’explose !). Si son ascension fut soudaine et sa participation au festival semblait venir un peu de nulle part, Lucio Corsi n’est pourtant pas un inconnu, et encore moins un petit nouveau inexpérimenté.

Né en 1993 dans la province de Grosseto en Toscane (une terre natale à laquelle il est extrêmement attaché), c’est à partir de 2011 qu’il se lance activement dans la musique, qui l’a toujours suivi depuis son enfance. C’est en 2014 que paraît son tout premier projet, l’EP de cinq titres Vetulonia Dakar. Il sera suivi en 2015 par Altalena Boy, un autre EP lui aussi composé de cinq titres.
Les deux se verront plus tard fusionnés en un album, baptisé sobrement Altalena Boy / Vetulonia Dakar. Mais c’est en 2017 que naît ce que l’auteur-compositeur-interprète considère comme son véritable premier album en bonne et due forme, Bestiario Musicale.
Un album concept de huit titres, où chaque morceau est consacré à un animal de la maremma grossetana, sous forme d’une fable douce et onirique. La chouette, le lièvre, la huppe, le porc-épic… Chacun compose ce délicat décor et raconte son histoire sur des arrangements folk que Nick Drake n’aurait pas renié ! Trois ans plus tard, apparaît Cosa Faremo da Grandi, deuxième opus où cohabitent la folk et des influences plus pop et rock. On y retrouve quelques titres emblématiques de sa discographie, comme Freccia Bianca et l’éponyme Cosa Faremo da grandi. Mais la pandémie et le confinement l’empêchent de défendre le disque sur scène. Qu’à cela ne tienne. Lucio Corsi se tourne à nouveau vers ses instruments, et compose. En 2023, paraît son troisième album, La Gente che sogna, dans lequel le musicien opère un virage nettement plus inspiré du glam-rock des années 60 et 70, de Bowie à T. Rex.

En 2024, Lucio Corsi participe à la série Vita da Carlo, de Carlo Verdone (un acteur et réalisateur assez respecté en Italie, de ce que j’ai compris). L’artiste joue son propre rôle dans la saison 3 de cette fiction semi-autobiographique, où Carlo Verdone imagine cette fois-ci être le directeur artistique du Festival de Sanremo, et va prendre sous son aile le musicien toscan, en qui il voit un grand potentiel. Un rôle prophétique, puisque ce fut un autre Carlo (Conti, cette fois), qui annonça sa participation à la 75ème édition du Festival. Et cette fois-ci, c’était bel et bien la réalité. La suite, vous la connaissez. Une apparition plus que remarquée avec Volevo essere un duro, un engouement de la presse et du public, une cover en duo avec Topo Gigio (marionnette iconique de la télé des années 70 et de l’enfance de nombreux italiens) qui en fit rêver plus d’un, et une deuxième place à quelques points d’Olly.
Ce dernier, ne souhaitant pas reporter sa tournée de mai dans les plus grandes salles d’Italie, renonça au ticket pour Bâle, et c’est
À l’heure où j’écris ces lignes, il est en tournée à travers les principales grandes villes d’Italie, pour promouvoir Volevo essere un duro, son quatrième album sorti le 21 mars dernier. Un opus dans lequel le focus a été mis sur l’enfance, l’amitié, et les souvenirs réels ou inventés.

Côté univers, celui de Lucio Corsi est particulier, unique. Il oscille entre folk et rock, entre pop et indie, entre le conte de fée et le surréalisme. Ses influences sont variées. Randy Newman (auteur-compositeur-interprète surtout connu pour son travail dans le cinéma, notamment sur la bande-originale des films Toy Story), David Bowie, Lou Reed, T. Rex, Joni Mitchell, le film The Blues Brothers (et sa bande-originale absolument fantastique, si vous me permettez ce moment de subjectivité), mais aussi Paolo Conte, Ivan Graziani, Vasco Rossi, Rino Gaetano et les plus grands noms du cantautore italien en général. Multi-instrumentiste (vous ne le verrez jamais trop loin d’une guitare, d’un piano ou d’un harmonica), il se distingue en live par son énergie débordante, sa présence scénique et ce paradoxe, cette dualité entre douceur poétique et charisme magnétique. Bref : un artiste bien plus chevronné qu’on pourrait le penser au premier abord, arrivé dans l’euromonde un peu par hasard, et qui risque bien de se distinguer en mai.

Lucio Corsi en chansons

Radio Mayday : plus Beatlesien, tu meurs ! Le titre introductif de l’album La Gente che sogna, un morceau follement brit-pop.

La Lepre : Et si des astronautes en mission pour la lune se rendaient compte qu’un lièvre était arrivé avant eux ? C’est la drôle d’histoire que raconte ce titre tout en délicatesse.

Magia Nera : Avec Volevo essere un duro, on pourrait croire que Lucio Corsi est un artiste plutôt mélancolique. C’est mal connaître son univers ! La preuve avec ce Magia Nera diablement entraînant, fait pour la scène et les moments de pure folie en concert !

Sa chanson pour l’Eurovision

C’est avec Volevo essere un duro que Lucio Corsi défendra les couleurs italiennes cette année. Un titre intemporel aux sonorités somme toute très anglaises (mais en ne perdant pas non plus ce qui fait le charme de l’identité musicale italienne). Un morceau où piano, guitare électrique, cordes et même cuivres se marient à merveille, pour raconter l’histoire de ce garçon qui voulait être un dur, une machine, un roc, avant de réaliser qu’il est inutile de fuir ses propres peurs, et qu’au fond, il n’est nul autre que Lucio. Une ode à la vulnérabilité et à la fragilité humaine, avec l’un des plus jolis textes de cette année. (Quoi ? On m’a demandé de faire un portrait, pas d’être objective !). Le tout auréolé d’un clip qui prend des allures de mini court-métrage, sous la caméra de Tomaso Ottomano (véritable frère d’armes avec qui l’artiste a même co-écrit le morceau).

Volevo essere un duro

Volevo essere un duro
Che non gli importa del futuro
Un robot
Un lottatore di sumo
Uno spaccino in fuga da un cane lupo
Alla stazione di Bolo
Una gallina dalle uova d’oro

Però non sono nessuno
Non sono nato con la faccia da duro
Ho anche paura del buio
Se faccio a botte le prendo
Così mi truccano gli occhi di nero
Ma non ho mai perso tempo
È lui che mi ha lasciato indietro

Vivere la vita
È un gioco da ragazzi
Me lo diceva mamma ed io
Cadevo giù dagli alberi
Quanto è duro il mondo
Per quelli normali
Che hanno poco amore intorno
O troppo sole negli occhiali

Volevo essere un duro
Che non gli importa del futuro no
Un robot
Medaglia d’oro di sputo
Lo scippatore che t’aspetta nel buio
Il Re di Porta Portese
La gazza ladra che ti ruba la fede

Vivere la vita
È un gioco da ragazzi
Me lo diceva mamma ed io
Cadevo giù dagli alberi
Quanto è duro il mondo
Per quelli normali
Che hanno poco amore intorno
O troppo sole negli occhiali

Volevo essere un duro
Però non sono nessuno
Cintura bianca di Judo
Invece che una stella uno starnuto

I girasoli con gli occhiali mi hanno detto
“Stai attento alla luce”
E che le lune senza buche
Sono fregature
E che in fondo è inutile fuggire
Dalle tue paure

Vivere la vita è un gioco da ragazzi
Lo, Lo volevo essere un duro
Però non sono nessuno
Non sono altro che Lucio
Non sono altro che Lucio

Traduction

Je voulais être un dur à cuire
Qui ne se soucie pas de l’avenir
Un robot
Un lutteur de sumo
Un dealer en fuite face à un chien-loup
A la gare de Bologne
Une poule qui pond des œufs d’or

Mais je ne suis personne
Je ne suis pas né avec un visage de dur à cuire
J’ai même peur du noir
Si je me bats, je suis battu.
Alors ils peignent mes yeux en noir
Mais je n’ai jamais perdu de temps
C’est le temps qui m’a laissé derrière

Vivre la vie est un jeu d’enfant
C’est ce que ma mère avait l’habitude de me dire
Quand je tombais des arbres
Que le monde est dur
Pour les gens ordinaires
Qui ont peu d’amour autour d’eux
Ou trop de soleil dans leurs lunettes

Je voulais être un dur à cuire
Qui ne se soucie pas de l’avenir
Un robot
Un médaillé d’or du crachat
L’agresseur qui vous attend dans le noir
Le roi de Porta Portese
La pie qui vole votre alliance

« Vivre la vie est un jeu d’enfant
C’est ce que me disait ma mère
Quand je tombais des arbres
Que le monde est dur
Pour les gens ordinaires
Qui ont peu d’amour autour d’eux
Ou trop de soleil dans leurs lunettes

Je voulais être un dur à cuire
Mais je ne suis personne
Une ceinture blanche de judo
Au lieu d’une étoile, juste un éternuement

Les tournesols avec des lunettes de soleil m’ont dit
« Méfie-toi de la lumière »
Et que les lunes sans cratères
Ne sont que des escroqueries
Et qu’en fin de compte, il ne sert à rien de fuir
A fuir ses peurs

« Vivre la vie est un jeu d’enfant »
Je voulais être un dur à cuire
Mais je ne suis personne
Je ne suis rien d’autre que Lucio
Je ne suis rien d’autre que Lucio

Qu’en pensent nos lecteurs ?

Eh bien nos lecteurs, ils étaient pour le moins surpris ! C’est si rare qu’un gagnant de Sanremo refuse l’opportunité immense que représente l’Eurovision. Ça n’était pas arrivé depuis Stadio en 2016. D’autant plus que Lucio Corsi n’était pas le profil attendu (les eurofans étaient surpris de sa deuxième place, eux qui auraient plutôt imaginé Giorgia ou Fedez à sa place). En résulte donc des réactions plus ou moins contrastées.

Manatane : « C’est un coup dur pour l’Italie je pense. Bien que je n’étais pas ultra fan non plus de la chanson d’Olly, il y avait tout de même les ingrédients qui fonctionnent pour faire un top 10 habituel pour l’Italie. Là, avec Lucio Corsi, un bon classement me semble beaucoup plus aléatoire. »

Will : « C’est une jolie chanson, la mélodie est agréable, mais ce n’est probablement pas une chanson capable de gagner le concours. Néanmoins l’Italie est toujours très appréciée donc elle devrait faire un classement autour des 8/12e places ? »

Max99 : « J’aimais beaucoup la chanson d’Olly que j’imaginais déjà très bien sur la scène du concours, du coup je suis assez déçu, mais il faut respecter sa décision. J’espère juste qu’il ne va pas le regretter et qu’il aura une autre occasion de participer à l’Eurovision. Malheureusement pour moi, la chanson finalement sélectionnée n’est pas à mon goût. Je n’adhère pas à ce genre de musique, assez datée, que mes parents ou mes grands pourraient écouter. À vrai dire, je trouve cette proposition assez ennuyeuse. À voir le score que Lucio pourra obtenir en mai, mais je doute que l’Italie réalise un de ces meilleurs résultats … »

Picasso : « Ce n’est certes pas la meilleure chanson que l’Italie a envoyé au Concours, mais elle est de qualité et largement supérieure à ce que certains pays nous proposent cette année. J’aime bien… Fera certainement un meilleur résultat que ce que les fans envisagent. Ces derniers y prêteront peu d’intérêt vu qu’il ne remplit aucune des cases : ce n’est pas une diva, ce n’est pas le beau gosse de l’édition, ce n’est pas un bop, il n’y a pas de chorégraphie… »

PDB : « Magnifique ! Une issue à la Salvador Sobral pourrait être envisageable, en tout cas, il a tout pour. »

Et voilà. Vous savez tout ou presque sur l’atypique et artistique représentant italien. Demain, on file en Irlande, où l’on est passés d’une sorcière à une chienne astronaute en un clin d’œil !