Ce samedi 20 avril, a donc eu lieu l’Eurovision Spain PreParty 2019. Voici les prestations compilées et accompagnées de mes commentaires personnels (qui comme d’habitude, n’engagent que moi).

Finlande – Darude & Sebastian Rejman – Look Away – première demi-finale

Un remix intéressant et le plaisir de réentendre Sandstorm. Souvenirs, souvenirs… Si vous saviez à quel point j’ai aimé cette chanson… Vingt ans déjà… Curieux anniversaire. Comme l’Eurovision a changé en deux décennies… La musique de Darude, moins. Nous dirons que son style est intemporel…

Pour en revenir à LA, elle ne ressort pas grandie de cette prestation vocale de Sebastian Rejman, flottant entre moyen et médiocre. Ça, le 14 mai, et c’est la porte direct. Les jurys, qui se croient souvent à The Voice, regarderont littéralement ailleurs. Quant à moi, je ne décrocherai pas mon téléphone.

Bizarre conclusion : la formule DJ+vocaliste ne passe point la rampe du Concours. Toutes les tentatives précédentes se sont soldées par des échecs et la Finlande devrait prendre la même direction, sauf miracle de dernière minute.

Israël – Kobi Marimi – Home – finale

Devinez à qui j’ai pensé durant ces trois minutes… Oui : à Shefita. D’accord, elle chantait moins bien que Kobi. D’accord, elle a été honteusement tirée et poussée jusqu’en finale de l’HaKoKhav Haba par le jury, au détriment d’autres candidats. D’accord, elle aurait été ingérable. Mais qu’est-ce qu’on aurait ri ! Elle, au moins, est drôle, piquante, déjantée, imprévisible et née pour la fête. Tout ce que Kobi n’est pas… En même temps, il n’aurait pu se choisir un Toy ou un Fuego 2.0. Cela n’aurait collé ni avec sa voix, ni avec sa personnalité… N’empêche que voilà : durant ces trois minutes, je m’ennuie et je pense à autre chose.

Il n’y a rien à reprocher à Kobi, qui est un chanteur merveilleux, à la voix superbe et à la carrière lyrique méritée. Nous sommes bien d’accord : sa victoire à la sélection israélienne était logique, car c’est lui qui, objectivement, chantait le mieux. Certes, certes, il n’aurait pu interpréter autre chose qu’une balade, son genre de prédilection. Mais enfin, il aurait au moins pu se lui dégoter un autre Made Of Stars ou un autre When We’re Old. Home est une chanson triste et ennuyante, plate et suscitant peu d’émotions. C’est d’un classicisme pompier à faire s’endormir les retraités allemands et les têtes blondes britanniques devant leur écran.

Donc, à mon humble avis, Israël devrait stagner dans les tréfonds du classement final, entre la 20e et la 26e place. Regrettable : le talent de Kobi est gâché à cause d’un morceau peu inspiré. Rendez-vous l’année prochaine !

Estonie – Victor Crone – Storm – première demi-finale

Là, par contre, je décrocherais bien mon téléphone. Victor signe une belle prestation vocale. Storm prend d’autres couleurs et une nouvelle vie dans ces conditions de concert. Avec ce soupçon plus râpeux et moins lisse qu’à l’Eesti Laul, je trouve que cela rend mieux.

Conclusion : l’on ne peut rien en conclure ! Paradoxe des paradoxes de cette première demi-finale : tout se décidera à l’instant X. Beaucoup de candidats nous ont offert des prestations divergentes, parfois médiocres, parfois excellentes. Il nous faudra donc les juger uniquement sur leurs trois minutes du 14 mai.

Danemark – Leonora – Love Is Forever – deuxième demi-finale

Ce bonnet, ce bonnet ! Il me fait penser à celui que portaient mes Playmobils gardes-côtes. Pas exactement une référence en matière de style… Soit. Revenons-en à l’essentiel : la prestation vocale. Qui, à nouveau, est loin d’être remarquable. Amélioration en fin de morceau, tout de même. Leonora prend toute cette séquence avec bonne humeur et légèreté. Tant mieux pour elle, qu’elle s’amuse et qu’elle en profite. Car le 16 mai venu…

Selon moi, ils sont une douzaine à mieux chanter qu’elle, à avoir une meilleure chanson que LIF et à être autrement plus affûtés. Le Danemark aura fort à faire et sa qualification me semble décidément improbable. Si cela pouvait servir d’électrochoc à la DR, car j’aimerais découvrir des propositions plus audacieuses et intéressantes de leur part. À bon entendeur…

Croatie – Roko – The Dream – deuxième demi-finale

Spontanément, j’ai envie de vous demander : qui a écrit ces paroles ? Mais nous savons très bien qui… À ce propos, si la télévision croate pouvait tenir Jacques éloigné de l’Eurovision, cela mettrait de joie et de l’espoir dans ma petite existence d’Eurofan…

Ceux qui ont suivi le Dora 2019 savent que Roko était assurément le meilleur chanteur de la sélection. Loin, très loin devant les autres. Du coup, les téléspectateurs et les jurés croates se sont crus à The Voice et l’ont porté en triomphe. De fait, Roko est un éblouissant vocaliste. Quelle voix ! Quel talent ! Quels poumons ! Il méritait de figurer sur la scène du Concours et il le prouve à nouveau ici, en délivrant une magistrale interprétation de son morceau.

Hélas, hélas, trois fois hélas, The Dream est une meringue si sucrée qu’elle filerait le diabète au premier lambda venu. Sa composition est, elle aussi, d’un classicisme pompier. Mais ce qui achève cette proposition, ce sont ces paroles idiotes : I dream of love / you dream of love / we all dream of love. On se croirait à un cours d’anglais pour débutants… Il ne manque plus que des temps primitifs, au hasard sing / sang / sung…

J’aurais trouvé plus intéressant et plus censé de présenter ce morceau dans sa version croate intégrale. Cela aurait eu plus d’élévation que cette version anglaise qui prête tant aux rires et aux sarcasmes. Là-dessus, qualification ou pas ? Si j’étais Suisse, je ne voterais pas pour la Croatie, trouvant cette proposition kitsch et indigeste. Et encore une fois, je vois douze autres propositions plus inspirées et intéressantes. Je pronostiquerais donc une élimination.

Allemagne – S!Sters – Sister – finale

Difficile d’être objectif quant à cette proposition… La finale de la sélection allemande m’aura marqué au fer rouge. J’y ai ressenti la plus vive et la plus cruelle déception de la Saison 2019. Si vous saviez à quel point j’aimais Surprise, Demons et Wear Your Love. J’étais tellement convaincu que l’une de ces trois-là l’emporterait, qu’il m’a fallu de longues minutes avant de réaliser qu’elles étaient passées à la trappe et que Sister l’avait emporté. Depuis, je n’en puis mais : je reste sur mes préconçus négatifs envers Laurita et Carlotta.

J’ai tort, car avec quelque recul, Sister est une bonne chanson, tout à fait dans l’air du temps avec son message féministe. Le concept de base est intéressant. En revanche, je suis moins convaincu par le méta-concept : les deux chanteuses sont sœurs au sens métaphorique et existentialiste. Bon courage pour expliquer cela en vingt secondes aux lambdas. Vous me direz : ils s’en fichent. Et vous auriez raison…

Le duo l’a prouvé à la dite finale allemande : il fonctionne en harmonie et complémentarité. Il l’a cependant prouvé à l’EiC : il ne fonctionne que dans certaines circonstances. Ici, Laurita la brune signe une belle prestation. Carlotta la blonde, elle, demeure flottante. Parfois au point, parfois point. Et l’ensemble se laisse emporter vers le criard, pour le plaisir d’élever la note. D’où une certaine lassitude auditive, une fois les deux minutes dépassées…

Au final, à titre personnel, je ne suis ni enthousiasmé, ni ébloui par notre duo. Sans pour autant être rebuté ou outré. Malheureusement, à l’Eurovision, l’indifférence est une terrible condamnation. Selon moi, l’Allemagne est passée à côté de très belles opportunités. La télévision publique n’est en rien à blâmer, sa sélection était somptueuse. Les téléspectateurs allemands, eux, n’auront que leurs larmes pour se consoler de leur choix étrange. Car, en l’état, je vois notre duo vivoter en compagnie d’Israël entre la 20e et la 25e place. À pleurer, vous dis-je…

Albanie – Jonida Maliqi – Ktheju tokës – deuxième demi-finale

Ouh la, Jonida ! Après un début magistral, notre Eurodiva albanaise manque quelques notes au moment d’aborder le refrain. Petit accident de parcours, aggravé par un micro sans doute peu habitué à tant de puissance vocale. La chanteuse ne signe pas ici sa meilleure prestation, mais conserve tout son potentiel artistique.

Quant au reste, Kt ne manque pas de dramaturgie et Jonida, d’attitude. Lors de la deuxième demi-finale, elle bénéficiera de son authenticité, étant la seule à proposer un morceau intégralement dans sa langue nationale. Elle sera aussi la seule dans son créneau musical « traditions revisitées porteuses d’un message fort ». A contrario, elle passera en Sergey et Keiino. Bref, si elle se qualifie se sera au point et une bonne surprise pour moi. À voir avec la mise en scène…

Grèce – Katerine Duska – Better Love – première demi-finale

Mon meilleur ami grec n’aime pas cette proposition 2019. Principal motif de ses récriminations : BL ne sonne pas grec. D’où ce débat intellectuel : qu’est-ce qui relève à proprement parler de la chanson grec ? Serait-ce des sonorités particulières ? L’emploi d’instruments typiques ? Des thèmes et des paroles spécifiques ? En ce qui me concerne, BL est bien grec : il s’agit d’un morceau écrit et composé par des auteurs grecs, interprété par une chanteuse grecque. Le fait que ce petit monde habite à Londres ne leur ôte en rien leur hellénité.

Mais vous voyez bien ce qui gêne mon meilleur ami : BL est assurément la chanson la plus internationale jamais proposée par la Grèce à l’Eurovision. Et je m’en réjouis, car elle illustre une autre facette de la création artistique hellénophone actuelle. BL est un excellent morceau, porté par une chanteuse à l’univers affirmé. Il tranche avec les « hellénades » et les « bouzoukeries » précédentes et c’est tant mieux. L’ERT était tombée dans une impasse, elle en sort brillamment avec ce choix atypique et censé.

Katerine a une voix tout aussi atypique, ce qui renforce l’intérêt du morceau. La chanteuse nous signe ici une prestation vocale réussie, bien meilleure qu’à Amsterdam. Elle abuse un brin de la neige carbonique, artifice superflu, tant ces trois minutes se tiennent seules et retiennent l’attention. L’ERT nous annonce une mise en scène inspirée du vidéoclip. Cela permettra assurément à la Grèce de se qualifier pour la finale.

À titre personnel, j’enverrai quelques votes à Katerine, car elle fait partie de mes favorites de cette édition 2019. Et j’espère qu’à l’avenir, l’ERT nous présentera d’autres artistes de sa trempe, au confluent des genres musicaux contemporains.

Norvège – Keiino – Spirit In The Sky – deuxième dem-finale

Le poussin disco est passé au rose. Notre trio norvégien enchaîne concerts et parties. Cela fait du bien, ces artistes motivés par leur participation au Concours. Tom, Alexandra et Fred délivrent une autre prestation globalement réussie. L’énergie et la bonne humeur y sont. Quelques fausses notes cependant. Rien qui ne pourra se corriger à Tel Aviv. SITS conserve le potentiel pour atteindre une dixième place en finale.

Reste la question toujours en suspens de la mise en scène. Réponse dans moins de trois semaines, avec l’espoir qu’elle soit réussie et audacieuse. C’est assurément l’une de celles que je guetterai avec le plus d’impatience lors des répétitions.

Royaume-Uni – Michael Rice – Bigger Than Us – finale

L’on pourrait écrire un essai sur le destin des chansons refusées au Melodifestivalen. Puis un autre sur celles refusées à l’Eurovision You Decide. L’an dernier, Nobody But You (relevant de la seconde catégorie) avait terminée troisième en finale. Et Higher Ground (relevant de la première), neuvième. Quelle moralité tirer de cela ? D’une part, que les sélectionneurs ne sont pas infaillibles, même pas Christer Björkman. D’autre part, qu’un arrangement et une interprétation particulière peuvent transfigurer une maquette inerte.

Hélas, je doute que BTU suive le chemin de NBY ou de HG. Son arrangement sirupeux nous renvoie au mitan des années 2000 et la fossilise dans un passé eurovisionesque révolu. En 2005, le Royaume-Uni aurait pu tirer son épingle du jeu. En 2019, c’est LA cause perdue de cet Eurovision. À pleurer quand on songe au talent de Michael, quand on écoute cette nouvelle prestation brillante et quand on réfléchit au potentiel de ce chanteur. D’autant plus à pleurer que son mauvais classement prévisible entravera sa carrière ultérieure.

Islande – Hatari – Hatrid mun sigra – première demi-finale

Avec la Grèce et la Suisse, l’Islande était un autre pays dans l’impasse eurovisionesque. Comme ses deux camarades d’infortune, l’île atlantique se réinvente avec brio et audace, nous offrant la proposition la plus décoiffante de cette édition 2019 et de son histoire au Concours. Premier point positif : Hatari ne laisse personne indifférent. Le groupe suscite à la fois l’enthousiasme et l’abomination. C’est exactement ce qu’il fallait, les dernières propositions islandaises ayant causé une vaste indifférence. Autre point positif : ces trois minutes sont diablement marquantes. Impossible de les oublier, même une heure plus tard, au moment de voter. Toujours positif : il s’agit d’une proposition artistique cohérente, innovante et crédible. Il est appréciable que le Concours accueille et présente des genres musicaux moins reconnus du grand public.

Quant à Hatari, ils sont impayables et professionnels, excellente combinaison. Ils nous offrent ici une autre prestation mémorable et réussie de bout en bout. Hms est, de son côté, une chanson imparable et captivante. Pour toutes ces raisons, je vois l’Islande se qualifier avec raison. En finale, sa progression devrait être entravée par le nombre de personnes hermétiques à ses atours. Il me semble douteux que les jurés russes, les retraités maltais et les mères de famille azerbaïdjanaises votent en masse pour cette proposition. Je verrais donc nos amis islandais graviter autour de la dixième place, un résultat magnifique après quatre éliminations consécutives…

Belgique – Eliot – Wake Up – première demi-finale

Voici une autre proposition dont il me tarde de découvrir la mise en scène. Celle proposée à The Voice, la semaine dernière, n’était que peu convaincante. Mais l’on voit que le poing levé sera sans doute le marqueur des trois minutes belges à Tel Aviv. Intéressant si le public dans le Convention Center suit et crée un effet visuel communicatif.

Notre ami Eliot, quant à lui, apparaît de plus en plus à l’aise sur scène. Il trouve ses marques et devrait toucher les spectateurs, le 14 mai prochain. WU demeure une autre proposition belge réussie. Les étoiles semblent donc alignées pour une qualification. En ce qui me concerne, je n’en demande pas plus. Toute place finale supérieure à la quinzième sera du pur bonus à mes yeux. Encore une fois, la RTBF ressortira avec honneur et bonheur de cette nouvelle participation. Si seulement, il pouvait en être de même pour la VRT l’an prochain…

Espagne – Miki – La venda – finale

Miki joue à domicile et remporte un triomphe mérité. Il réussit cette nouvelle prestation en direct. Il mérite d’ailleurs la médaille de la constance, car il nous a toujours offert des interprétations réussies. Au passage, l’on aura rarement vu un concurrent espagnol aussi investi dans son rôle. Plaisir et bonheur. Finalement, Maria a bien fait de rentrer chez elle.

Lv est une proposition musicale à écouter au premier degré, sans arrière-pensée. Il s’agit là de trois minutes joyeuses et festives, qui rassureront les lambdas. Ici, par contre, je vois bien les jurés russes, les retraités maltais et les mères de famille azerbaïdjanaises sautiller sur leurs fauteuils et canapés et voter en conséquence. Le résultat final me semble difficile à pronostiquer complètement. Je dirais entre une dixième et une quinzième place, car la concurrence reste rude malgré tout.

Saint-Marin – Serhat – Say Na Na Na – première demi-finale

Serhat s’impose comme une autre légende eurovisionesque, à l’égal de Valentina Monetta. Je ne lui jetterai pas la pierre à titre personnel, car j’admets la joie et le plaisir qu’éprouve un artiste à participer à l’Eurovision. De sa première participation, Serhat a conservé un excellent souvenir. Je comprends donc qu’il a voulu revivre ces instants magiques. Je ne blâmerai pas non plus la SMRTV. Sa participation renouvelée et son engagement constant forcent l’admiration. Sa délégation a raison quant au fond : l’Eurovision est l’une des rares occasions offertes à la Sérénissime République de faire parler d’elle.

Le malheur est que prise entre un budget microscopique et une surdité musicale persistante, SMRTV s’égare entre fausses bonnes idées et accidents industriels. 2018 relevait de la seconde catégorie. 2019, de la première. Rappeler Serhat était, selon moi, une fausse bonne idée. Le chanteur turc est complètement hors du coup, sur les plans musicaux et artistiques. Il le prouve ici, avec ce SNNN, plaisir tellement coupable que, même moi, j’éprouve de la honte à l’aimer. Conséquence navrante : Saint-Marin se retrouve embarqué dans une autre galère eurovisionesque, rappelant son époque « Ralph Siegel » (qui, je le parie, n’a pas encore dit son dernier mot).

Mais enfin, avec une bonne dose de second degré, d’humour, de clins d’œil et de sourires en coin, appuyés par une belle mise en scène, SNNN aurait pu trouver son public. Hélas, Serhat nous rappelle ici qu’il est un piètre interprète. Il massacre sa chanson et laisse peu d’espoir quant à l’issue de cette participation 2019. À l’entendre, je me repens intensément d’avoir voté pour lui à « Votre Eurovision ». C’est tellement douloureux que je n’ai point eu le courage d’écouter ces trois minutes jusqu’au bout… Et dire qu’il conclura la première demi-finale… Ah ça, les lambdas vont encore rester sur une belle impression de l’Eurovision…

Arménie – Srbuk – Walking Out – deuxième demi-finale

Voilà une autre de mes déceptions majeures de cette édition 2019. Lors de l’annonce de sa sélection, je m’étais enflammé pour Srbuk. J’étais convaincu qu’elle serait une sérieuse concurrente pour la victoire finale. J’avais partiellement raison (tout de même…) : l’Arménienne est une interprète majeure et une artiste complète. Même quand la technique lui fait défaut, elle s’en sort à merveille. Dommage ceci dit que son tempérament de feu s’exprime aussi visiblement sur scène, devant ses fans. Avec un dose de sang-froid et d’élégance, elle se serait mieux sortie de ce chausse-trappe.

Bref, j’attendais beaucoup de son morceau. Sans doute trop. WO est une bonne chanson, bien construite, bien produite, permettant à Srbuk de déployer ses vastes capacités vocales. Le morceau suscite l’intérêt dans son entame, le refrain laisse hélas l’auditeur sur sa faim. Au final, nous récoltons d’une proposition musicalement timide. J’ai donc été déçu, m’attendant à un autre Half A Goddess. C’est suffisamment bien pour atteindre la finale, y compris dans une série compétitive. Mais ce n’est pas suffisamment marquant que pour se hisser tout en haut du tableau, le 18 mai venu.

L’Arménie retombe dans ses travers habituels : opter pour des morceaux intrinsèquement bons, mais pas assez mémorables et épiques. Il leur manque toujours un petit quelque chose en plus qui leur permettrait de se démarquer. Espérons qu’ils trouvent bientôt LA formule gagnante.

Lituanie – Jurij Veklenko – Run With The Lions – deuxième demi-finale

Notre ami Jurij accomplit ici une autre prestation vocale impeccable et maîtrisée. Nous n’avons pas perdu au change, question interprète. Reste à savoir si RWTL se démarquera entre Chameleon et Scream, puis parmi toutes ces autres excellentes propositions de la deuxième demi-finale. En ce qui me concerne, j’aimerais bien, car cette proposition lituanienne me parle beaucoup. Hélas, au vu des différents sondages et paris, cela fleure le sapin pour Jurij. Son éventuelle élimination me laissera inconsolable, mais je trouverais motif à me réjouir malgré tout, car elle ouvrirait la porte toute grande à un retour de Monika Marija l’an prochain. Oui, à l’Eurovision, l’on se console toujours d’une manière ou d’une autre…

République Tchèque – Lake Malawi – Friend Of A Friend – première demi-finale

Eh bien, je me repens de ne pas leur avoir attribué plus de points à la demi-finale de « Votre Eurovision », car décidément, en direct, FOAF retient mieux l’attention. Albert demeure dans la constance heureuse et réalise une nouvelle prestation vocale réussie. L’ensemble est réussi et la République Tchèque n’aura pas à rougir, le 14 mai venu. Certes, c’est un cran en-dessous du LTM de Mikolas Josef, mais cela mériterait bien une place en finale.

Géorgie – Oto Nemsadze – Keep On Going – première demi-finale

Voilà qui me laisse perplexe… Je vois bien le chemin qu’ont voulu emprunter Oto et la GPB. Chemin qui s’apparente à un calvaire métaphorique, au sens figuré, mais qui transparaît sur le plan littéral. Oto accentue son physique inquiétant, pour mieux exsuder une souffrance que l’on imagine ressentie et sincère. Du coup, il ressemble à un Christ descendu de la croix, ce qui n’engage guère la belle humeur et l’affection du téléspectateur. J’éprouve quant à moi un effet de recul préjudiciable.

Cela n’enlève rien à l’immense talent d’Oto. Sa prestation vocale est ici digne des plus grands. Sa voix grave cause merveille et se joue avec une déconcertante facilité des exigences de KOG. Le morceau en lui-même est un bloc sombre et dense, très bien réalisé dans son genre, mais qui, à mon avis, laissera bon nombre de lambdas et d’Eurofans sur le bord de la route. KOG ne suscite ni adhésion, ni emballement immédiat. À première audition, j’ai d’ailleurs pensé : pourquoi tant de souffrance ? Et comme souffrance et Eurovision font rarement bon ménage, mon pronostic s’avère pessimiste quant aux chances de qualification de la Géorgie.

À titre personnel, je ne voterai pas pour Oto. Rien de personnel, mais cette première demi-finale comporte au moins dix autres chansons qui me parlent et m’enchantent plus que ce Vendredi Saint musical. Au passage, je trouve cela plutôt idiot de donner des titres anglais à des morceaux en langue nationale. Autant assumer jusqu’au bout le parti pris, quitte à rajouter un sous-titre. Bref, rendez-vous l’an prochain pour la Géorgie qui glisse insensiblement vers la malheureuse catégorie des pays dans l’impasse eurovisionesque…

Roumanie – Ester Peony – On A Sunday – deuxième demi-finale

L’Eurodrame de la sélection nationale roumaine m’aura causé des émotions contraires. Comme beaucoup d’entre vous, j’aurais volontiers jeté des poireaux pourris aux responsables de la TVR pour nous avoir pondu un règlement aussi absurde et aliénant. Mais je n’en aurais pas fait autant avec les jurés désignés, quoi qu’il y ait matière à débattre de leur choix : un représentant de Wiwibloggs, certes. Deux, c’était trop. Je pense néanmoins qu’ils ont joué honnêtement leur rôle. Je leur suis au final reconnaissant d’avoir retenu Ester, une artiste crédible, ayant composé sa chanson elle-même et élargissant le spectre musical des propositions roumaines.

Ester le démontre encore une fois : elle est une excellente chanteuse. Elle vit intensément sa chanson, elle y croit, elle la porte avec brio, ingrédients propres à une prestation réussie. Je suis plus réservé quant à OAS. Il s’agit d’un autre bon morceau, dont je trouve le potentiel non totalement exprimé. Les couplets me plaisent beaucoup, mais le refrain tombe dans l’ornière de la linéarité. Je reste donc, à titre personnel, sur une certaine insatisfaction.

Là-dessus, quid de la mise en scène, élément crucial et dont nous n’avons encore aucune idée ? Celle de la finale roumaine était ratée. À creuser, tout comme la question des costumes de scène. Ester enchaîne les audaces stylistiques, souvent à tort. Ce costume-ici demeure le plus affreux qu’elle nous ait proposé jusqu’ici. Quant à ses chances de qualification, elles me semblent réalistes, car il s’agit d’une proposition fraîche, moderne et convaincante, en rupture avec les précédentes tentatives roumaines, une excellente chose en soi. En finale, Ester devrait graviter autour de la quinzième place, sans démériter et uniquement parce que la concurrence sera trop rude pour OAS.

Pologne – Tulia – Fire Of Love – première demi-finale

Pour citer une nouvelle fois Daniela Simons : « pas pour moi ». Non, décidément, FOL n’est pas pour moi. Ce morceau ne me rebute, ni ne m’horrifie. C’est pire encore : il me laisse tout froid, avec ma fameuse moue dubitative au bord des lèvres. Je l’ai déjà dit : nos représentantes polonaises sont d’excellentes interprètes et de belles découvertes musicales. Je suis d’ailleurs heureux que certains d’entre vous éprouvent tant d’émotions positives à leur écoute. J’aimerais qu’il en soit autant pour moi… Le 14 mai venu, elles trouveront leur public. Sera-t-il suffisamment nombreux que pour leur offrir la qualification ? Personnellement, j’en doute. Mais qui sait ?

Moldavie – Anna Odobescu – Stay – deuxième demi-finale

Ce n’est plus une chanson, c’est une usine à clichés musicaux. Et dire que c’était le meilleur choix possible pour nos amis Moldaves… Stay est une meringue intersidérale dont le seul mérite est d’avoir été moins mauvaise que ses jumelles de l’OMPE 2019. En 2000, cette balade n’osant rien aurait été acceptable. En 2019, elle n’interpelle personne. Certes, cette proposition n’est point honteuse ou ridicule. Plutôt datée et sans intérêt.

Selon moi, la Moldavie restera donc enchaînée à sa demi-finale. Ce qui est musicalement logique. Et personnellement tristounet pour cette pauvre Anna, qui chante magnifiquement bien et qui aurait mérité meilleure chanson pour enfin trouver la gloire eurovisionesque. Je lui souhaite de revenir dès l’an prochain, avec une proposition plus actuelle, plus à la page et mieux à même de mettre sa remarquable voix en évidence.

Monténégro – D mol – Heaven – première demi-finale

Un Eurovision ne peut être réussi s’il ne comporte au moins une chanson que vous abhorrez, une chanson dont la seule première note vous hérisse les poils de colère, une chanson que vous poursuivrez de vos foudres jusqu’au tomber de rideau, une chanson que vous vous glorifierez de placer en lanterne rouge de votre classement personnel, loin derrière les autres. Soyez heureux : mon Eurovision 2019 est réussi, car j’abomine Heaven, qui prend ainsi la succession de Viszlat nyar, Yodel It! et autres Color Of Your Life. D’ailleurs, je retrouve beaucoup de cette dernière dans Heaven et cela me ramène en 2016 où j’avais tant haï la chanson de Michal Szpak. Ah, que de bons mauvais souvenirs…

Heaven est à mes oreilles, mauvais, mauvais, mauvais, la pire proposition de cette édition 2019, un fléau musical, une calamité eurovisionesque. Qu’il se soit trouvé des personnes pour élire ce truc-machin me dépasse et me stupéfie. Bon sang de bois, qu’ont trouvé les Monténégrins à cette petite horreur ? Et qui diable peut encore écrire et composer des vieilleries pareilles en 2019 ? Et plus grave encore : qui pense que cela convient pour l’Eurovision ? Assurément quelqu’un qui n’a plus regardé le Concours depuis vingt ans…

Et encore, j’aurais pu faire montre d’indulgence et offrir ma dernière place et mes malédictions à The Dream, si cela était convenablement chanté. Mais même pas ! Autant Roko est impérial, autant D mol est indigne. Ces jeunes gens sont des amateurs égarés. Vocalement, ils n’ont pas le niveau. Cela s’entendait clairement à la finale monténégrine, d’où ma colère et ma stupéfaction décuplées de les voir gagner. Cela s’entend clairement ici. Ils devraient se faire rembourser leurs cours de chant. Individuellement, cela n’est pas à niveau. Ensemble, cela n’est point du tout en harmonie.

Alors merci la RTCG pour la mission de service public, mais l’an prochain, par pitié, rappelez Zeljko. Il nous compose toujours la même chanson, mais au moins, c’est toujours la même bonne chanson. Sur ce, j’attends patiemment mon moment de Schadefreunde : les voir terminer à la dernière place de cette première demi-finale.

Conclusion

L’ESP prend une ampleur réjouissante et devient un autre événement incontournable de la période intermédiaire. Je m’en félicité, car elle est décidément une preparty réussie, à l’ambiance joyeuse et aux retombées fort positives. Notez que je suis en faveur de la multiplication de ces euroconcerts. Je rejoins certains d’entre vous : il faudrait en organiser un en Francophonie, cela permettrait à l’Eurovision d’accroître encore sa popularité dans nos trois pays participants.

Concernant cette édition 2019, Serhat et D mol (ce nom, ce nom !) ont clairement signé les prestations les moins réussies. Mais concentrons-nous sur le meilleur. Voici mon classement personnel :

  • Médaille de bronze : Katerine Duska. La chanteuse grecque se rachète en trois minutes et se positionne en meilleure de la classe. Avec une mise en scène stylisée et intelligente, elle redorera le blason de la Grèce à l’Eurovision, après cinq années perdues ;
  • Médaille d’argent : Miki. Plus pour lui, qui est irrésistible, magnétique et électrisant que pour Lv, chanson honnête et primesautière, mais sans intérêt majeur. Lui aussi redonnera des couleurs à une Espagne en déroute et lui évitera les classements infamants de ces quatre dernières années. Avec l’espoir que la RTVE en tire des leçons pour l’avenir ;
  • Médaille d’or : Hatari. Qui d’autre ? Ils sont géniaux et je les adore ! Même sur une petite scène, sans artifice, sans effets spéciaux, sans décor, ni accessoires, ils s’imposent magistralement. J’aimerais que les diffuseurs participants me giflent plus souvent de cette façon. Idem quant à mon analyse : ils permettront à l’Islande de se refaire une santé eurovisionesque et de revenir dans la course. Avec à nouveau l’espoir d’un meilleur futur eurovisionesque pour la RÚV.

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