Le 26 décembre dernier, la TVR dévoilait les 60 morceaux qui concourront dans le cadre de sa sélection nationale pour Lisbonne. En bon petit soldat de l’Eurovision, je les ai tous écoutés. C’était long, mais moins long que les 36.000 candidats de la plateforme 1 In 360

Dans l’attente de cette Selectia Nationala 2018 voici donc un premier classement personnel (et donc, subjectif et partial) des forces musicales en présence, histoire de vous guider dans le dédale de ce barnum roumain. Si vous divergez d’opinion, exprimez-vous dans les commentaires !

D’emblée, une première réflexion : lorsque l’on décide d’organiser une sélection babylonienne qui traversera tout le pays et qui comptera soixante participants, mieux vaut s’assurer au préalable d’avoir soixante chansons intéressantes. Ce n’est pas le cas ici. L’on sent que la TVR a d’abord décidé du concept, avant de racler les fonds de tiroir musicaux. Certains artistes et leurs morceaux ont été retenus, faute de mieux. Cela se sent, cela s’entend.

Attention, tout de même : rien de rédhibitoirement mauvais ou de scandaleusement ridicule. Pas de Dorel Giurgiu au menu. Juste quelques chansons molles du genou et quelques interprètes amateurs.

Six morceaux up-tempo

Instinctivement, le lambda attend de la Roumanie, un morceau dansant et festif, trois minutes de légèreté et de fête. Dans cette perspective, s’il fallait choisir six propositions mémorables à première écoute, je dirais :

  • Serena – Safari, le meilleur de la production roumaine actuelle, un morceau taillé pour la compétition, fait pour les radios pop en recherche de nouveautés ;
  • Miruna Diaconescu – Run For You, un saxophone et tout est dit. Inspiré par les grands succès internationaux de la pop roumaine et bien tourné ;
  • Jukebox & Bella Santiago – Auzi cum bate, des interprètes chevronnés, de la passion, un son affuté, des paroles en roumain, de redoutables concurrents en perspective ;
  • Meriem – End The Battle,  une chanson pétillante et sautillante, un refrain facile et mémorable, trois minutes de pop hispanisante, à point pour le soleil de mai ;
  • Carolina – Reach Out For The Stars, très très eurovisionesque, un morceau mêlant pop et flûte traditionnelle, une recette éprouvée à maintes reprises ;
  • Alexia & Matei – Walking On Water, un duo complice et bourré d’énergie, une formule qui a fonctionné à merveille en 2017, mais cette fois avec un morceau pop.

Six ballades

Il ne peut y avoir de bonne sélection roumaine sans un contingent de ballades pulmonaires et meringuées. S’il fallait retenir six propositions plus émouvantes et plus abouties, je dirais :

  • Teodora Dinu – Fly, simple et moderne, convaincante et marquante, la ballade eurovisionesque dans sa meilleure acception ;
  • Elena Hasna – Revival, une composition et une progression très classiques, un changement de clé typique, déjà entendu, mais très bien emballé et produit ;
  • Denisa Trofin – Tears, très belle voix, très belle instrumentation, cuivres et tout, et tout, pour un morceau qui évoque les génériques de James Bond ;
  • The Humans – Goodbye, une belle ballade rock qui ravira les amateurs du genre et qui se démarquera des productions sucrées et larmoyantes ;
  • Claudia Andas – The One, une voix rauque, une proposition plus jazz, un instrumental au piano et beaucoup de simplicité et d’authenticité, loin des clichés habituels ;
  • Xandra – Try, cela fleure bon la meringue, mais la voix, le coffre, la puissance et la richesse du timbre de Xandra sauve l’ensemble du naufrage et le porte au sommet.

Reste un mystère : que vient faire Alex Florea dans cette galère ? L’année dernière, il nous rappait un morceau de yodel. Cette année, il nous propose une suédoiserie impersonnelle et stérétotypée au possible.  J’ai dû manquer un épisode. Ce n’est pas mauvais, c’est juste sans audace, ni originalité…

Six propositions involontairement drôles

Et s’il fallait en rire ? Alors, je retiendrais ces six chansons qui ont suscité en moi un certain degré d’hilarité :

Vous le notez : la compétition est faussée. Les artistes professionnels, portés par leur maison de disques et des auteurs internationaux, partent avantagés. Les autres feront de la figuration. À ce propos, n’auriez-vous rien remarqué ? Ne manquerait-il pas un nom à cette liste ?

Nous arrivons à la conclusion de cet article et de cette première écoute. Une nouvelle fois, oubliez tout ce que vous venez de lire et d’entendre. Oubliez Serena, Miruna, Xandra, Alex, Mihai, Teodora, Elena et les autres. Ne retenez que Feli. Voilà mon opinion finale : cette Selectia Nationala est musicalement sans objet. Arrêtez tout et envoyez directement Feli à Lisbonne. Son Bona de iubit surclasse de loin les cinq-neuf autres chansons. C’est moderne, c’est dansant, c’est joyeux, c’est irrésistible, c’est tout ce que l’on attend de la Roumanie, c’est tout ce dont l’Eurovision a besoin.

Feli est une star montante dans son pays, elle mériterait de devenir une star européenne, dans la foulée d’Inna et d’Alexandra Stan. Vous la réécouterez sur la plateforme de la TVR et la jugerez sur cette prestation en direct :

Selon moi, tout y est. Avec ces trois minutes-là, la Roumanie se hissera à nouveau en haut du tableau final (certainement parmi les dix premiers) et le succès commercial sera au rendez-vous. Il se produira même un miracle inouï : j’aimerais une chanson roumaine de l’Eurovision. Ce qui n’arrive jamais (exception faite de Paula et Ovi). Bref, #TeamFeli, comme disent les jeunes d’aujourd’hui…

Sur ce, rendez-vous tout bientôt sur votre site eurovisionesque préféré pour suivre cette sélection roumaine 2018 !