C’est la surprise du week-end pascal ! Mercredi dernier, juste après la conférence de presse de France 2, L’Eurovision au Quotidien a eu la chance de rencontrer nos représentant·es français·es à l’Eurovision 2022. C’est avec sympathie qu’Alexis, Marine, Sterenn Diridollou et Sterenn Le Guillou ont répondu à nos questions dans les locaux de Warner Music France. Lennerien ker voici Alvan & Ahez en interview !

Propos recueillis par Kris et Rémi

EAQ – Quel est votre état d’esprit à quelques semaines du concours ?

Alexis – On a beaucoup de choses à travailler.

Sterenn LG – On est surtout très content d’être là. C’est une expérience absolument incroyable ! L’euphorie dans laquelle on se trouve, l’adrénaline, l’effervescence, … On pourrait trouver plein de mots et de synonymes pour qualifier cela. On est plongé dedans et ça y est, on commence un peu à réaliser un mois après. On est à mi-chemin entre le prime d’Eurovision France et la finale à Turin, donc c’est chouette. On est pris dans le tourbillon, on rencontre plein de gens, on a fait les pré parties, on s’entraîne, on prépare tout pour le grand show.

Alexis – On est hyper fatigué et on ne se plaint même pas, c’est vous dire à quel point on est content !

Du jour au lendemain, vous accédez à une médiatisation assez soudaine. Comment le vivez-vous ?

Sterenn D. – On le vit plutôt bien.

Marine – Comme le disait Sterenn, on est porté par cette effervescence et on est très curieux de nature, de découvrir tout ce monde de l’Eurovision. C’est une grande famille, notamment la famille des eurofans, qu’on découvre et dont on apprécie le soutien et la force. Le fait de rencontrer les autres candidats, ce sont aussi des échanges humains, un partage entre artistes, mais aussi entre les artistes et le public. C’est vraiment quelque chose qu’on aime par-dessus tout. Cela nous rappelle aussi pourquoi on fait ce métier.

Alexis – C’est une aventure humaine vraiment incroyable. On a beaucoup de chance.

Vous défendez Fulenn, une proposition atypique et singulière. Comment appréhendez-vous les réactions des eurofans par rapport au titre ?

Marine – Elles sont plutôt positives. Il y a un peu de tout, évidemment …

Et comment gérez-vous les critiques ?

Marine – On essaie de ne pas trop les regarder, parce que cela peut vite nous prendre la tête. On essaie plutôt de se concentrer sur le soutien qu’on nous apporte. Après, tous les goûts sont dans la nature, il y en a forcément à qui cela ne plaît pas, tant pis, j’ai envie de dire ! On est dans un univers artistique où les goûts de chacun ne se discutent pas, et puis il y a tellement de propositions que tout le monde peut y trouver son compte. Et si ce n’est pas la proposition française, ce sera celle d’un autre pays. Cela nous va bien aussi.

Alexis – C’est normal. Ce qui compte le plus, c’est d’avoir fait Fulenn avec le cœur. On l’a fait comme des enfants insouciants. On n’a pas trop conscientisé le process, on a vraiment fait ce qu’on voulait faire. C’est pour cela que s’il y a des gens à qui cela ne plaît pas, j’ai envie de les inviter à se diriger vers quelque chose qui leur plaît.

Sterenn LG – Quand on fait de la musique, on sait qu’on ne peut pas plaire à tout le monde. On n’a pas non plus tant de commentaires « haineux » que cela. Je ne passe pas mon temps sur les réseaux à tout lire, mais il y a toujours des gens pour nous défendre derrière aussi. On ne s’attendait pas à autant de soutien et d’engouement autour de cette chanson.

Surtout que vous gagnez largement Eurovision France, vous êtes aux portes du top 10 des bookmakers à quelques semaines du concours … Il y a de quoi être mis en confiance.

Alexis – Je ne regarde pas du tout. Je n’en ai pas le temps, et puis, si on a voulu la faire comme on l’a fait, ce n’est pas maintenant qu’on va modifier la chanson. Elle est sortie telle quelle, et si elle ne plaît pas, c’est ainsi.

Sterenn LG – Maintenant, on trace notre route jusqu’à la finale.

Vous avez souvent évoqué les origines du projet Alvan & Ahez. Vous, les filles, avez plutôt l’habitude de fonctionner en groupe. De ton côté, Alexis, tu évolues plutôt en solo. Comment fonctionnez-vous ?

Alexis – J’ai aussi fait le choix de travailler avec Ahez, parce qu’à la base, ce n’était pas un groupe construit. Quand on s’est rencontré dans un bar avec Marine, j’avais déjà réalisé un morceau qui était la genèse de Fulenn. J’avais essayé de sampler la voix de mon arrière-grand-mère qui chantait en breton. Je voulais vraiment du breton, parce que je ne l’avais encore jamais fait. J’aime les sonorités musiques du monde, et je les utilise beaucoup. Au lieu d’aller chercher du côté du Japon ou de l’Inde, j’ai voulu cette fois regarder ce qui se faisait à côté de chez moi. On s’est donc rencontré dans le bar et très vite, cela a été assez logique de parler de musique. Marine m’a dit qu’elle chantait en breton avec ses potes et j’ai trouvé cela incroyable ! Je lui explique alors que je suis sur un projet de chanson et que leurs voix à toutes les trois pourraient coller. Elles ont écouté la chanson, elle leur a plu et Marine a écrit en deux jours des paroles magnifiques, et on a tout enregistré chez moi.

Comme le disait Alexandra Redde-Amiel en ouverture de la conférence de presse, Fulenn dépasse la musique. C’est aussi l’expression de la culture bretonne et la représentation de la diversité culturelle de la France. Quel a été l’accueil de Fulenn en Bretagne ? Et quelles ont été les réactions quant à la perspective de voir la culture bretonne sur la scène de l’Eurovision plus de vingt-cinq ans après Dan Ar Braz ?

Marine – On a observé beaucoup de soutien. En Bretagne, « fierté » est le mot qui revient souvent. Cela nous touche particulièrement que nos proches et les gens qui nous ont vu grandir – et fait grandir en quelque sorte aussi – nous accompagnent et nous encouragent. Dans le milieu musical, on a été très soutenu par des chanteuses et des chanteurs qui nous ont accompagné tout au long de notre voyage musical. Cela nous a particulièrement touché, y compris d’autres artistes comme Alan Stivell, Dan Ar Braz lui-même, Clarisse Lavanant, Nolwenn Leroy … On a eu des soutiens d’un peu partout.

Alexis – Jean-Louis Brossard également, le grand patron des Transmusicales.

Marine – Glenn Jegou, le patron de Yaouank, Krismenn, un rappeur breton.

Sterenn LG – Des politiques aussi … On pourrait citer beaucoup de monde !

Marine – La liste est non exhaustive.

Alexis – Quand on commence à citer tout le monde, on se dit que cela fait pas mal de monde !

Marine – C’est très symbolique pour nous. On est heureux de ce soutien-là.

Sterenn LG – Le breton nous est très cher, c’est notre langue de cœur. En l’ayant appris à l’école, puisqu’on était scolarisé dans des écoles Diwan, on est très content de pouvoir montrer aux enfants qui apprennent aujourd’hui le breton que c’est une langue qui n’existe pas qu’à l’école. Elle existe au-delà de ses murs, de leur commune, de leur département, de leur région. Voir cette langue avoir une place à la télé est appréciable.

Alexis – Des gens nous ont dit qu’on leur avait donné envie d’apprendre le breton. C’est magnifique !

Sterenn LG – C’est une grande victoire !

Alexis – L’esthétique de la langue est très belle. Moi qui ne parle pas du tout le breton, quand les filles parlaient le breton entre elles au début ou quand je les ai entendues chanter en breton, j’ai trouvé cela très beau.

D’anciens participants à l’Eurovision vous ont-ils donné des conseils ? Avez-vous eu des contacts avec Barbara Pravi par exemple ?

Alexis – Avant de monter sur scène le soir du prime le 5 mars, elle est passée voir les artistes et nous a souhaité bonne chance en nous faisant un gros câlin. Je me suis dit qu’elle était cool (rires).

Sterenn LG – Elle nous a aussi envoyé un message de félicitations.

Alexis – C’est adorable.

Alexis, tu vas sortir un premier EP la veille de la finale du concours. Peux-tu nous en dire quelques mots ?

Alexis – Sans vouloir spoiler, il y aura pas mal de titres électro-world music un peu dans la veine de Fulenn. Je me suis cassé la tête pour qu’il y ait une cohérence entre les morceaux. Il y a aura des chansons en anglais, en espagnol, un titre en alvanien, un langage primitif que j’ai inventé (rires d’Ahez).

Sterenn LG – Il est jaloux de ne pas parler breton (rires).

Alexis – Il y a aura plein de surprises, mais je suis en tout cas très fier de vous présenter ce premier album.

Ahez, quels sont les projets après l’Eurovision ?

Sterenn D. – Retourner travailler (rires).

Sterenn LG – Là on se concentre surtout sur l’Eurovision.

Marine – On aimerait bien entendu faire perdurer notre trio. Pour l’instant, notre priorité est d’abord l’Eurovision, et pour la suite, Sterenn Dirodollou ira retrouver les scènes de Fest Noz et son travail. Nous allons retrouver nos scènes habituelles et vous faire partager très rapidement les projets d’Ahez.

Quant à la suite de votre aventure commune, qu’en est-il dans vos esprits ?

Alexis – Pour l’instant, on n’en parle pas, parce qu’on est focus sur ce qu’on a à faire. Pour ma part, j’avais l’opportunité de faire mon album en même temps – ce qui explique pourquoi je suis dans un tel état de fatigue.

Sterenn LG – Sale tête (rires).

Alexis – On se concentre vraiment sur le concours, et au-delà de ça, humainement on s’entend hyper bien. On continue de bosser, on fait les pré parties, on passe des moments ensemble, même sans parler de musique. C’est cool.

Alexis, qu’est-ce que cela fait d’être courtisé par la moitié de l’euromonde ?

(Rires du groupe)

Alexis – Tu sais quoi ? On m’a comparé à Chris Evans – je suis donc très flatté d’être Captain America. On m’a comparé à Liam Hemsworth, beau garçon aussi.

Sterenn LG – Ah ouais ? Mais pas du tout !

Marine – Je ne trouve pas non plus ! (Rires)

Alexis – Elles ont le seum !

Sterenn LG – Ah non ! On est très contente.

Marine – Nous c’est Tigrou. Parce qu’il a des rayures et qu’il saute partout.

Alexis – Je suis plus un loup qu’un tigre. Mais pour revenir à la question, je suis très flatté. Je suis très content. J’ai pu en rencontrer quelques-uns sur les pré parties, on a pas mal discuté, ils m’ont dit la même chose, on a rigolé et puis, c’est cool.

Barbara Pravi a fini deuxième à Rotterdam l’année dernière. La France est sur une très belle dynamique à l’Eurovision Junior. Avez-vous la pression quant à votre futur résultat à Turin ?

Marine – On essaie de ne pas trop y penser. On essaie de garder la même énergie qu’on a depuis toujours et de se souvenir pourquoi on est là. On est là de par notre passion commune pour la musique, le chant, le partage avec le public sur scène, … On va se focaliser surtout sur l’instant présent et le jour de la finale à Turin. On est très honoré de marcher dans les pas de Barbara Pravi. On apprécie énormément cette artiste et on est très fier du score qu’elle a réalisé l’année dernière à Turin avec sa magnifique composition, Voilà.

Alexis – Ça nous met quand même un peu la pression, parce que deuxième …

Vous ne vous connaissiez pas il y a encore quelques mois, l’important n’est-il pas de prendre du plaisir ?

Sterenn LG – Carrément !

Alexis – On a déjà gagné quelque part.

Sterenn LG – Complètement.

Alexis – On s’entend bien, on n’était pas obligé et on est devenu potes. Fulenn, c’est la BO de notre rencontre. L’histoire est belle.

Sterenn LG – Et puis c’est une expérience incroyable. Dans tous les cas, on est gagnant. On racontera cela à nos petits-enfants après (rires). C’est une grande victoire dans tous les cas. C’est pour cela qu’il n’y a pas tant de pression du classement. On se met beaucoup de pression pour faire quelque chose de bien et pour être satisfait de ce qu’on va proposer, parce que ça nous tient vraiment à cœur. On veut vraiment s’amuser sur cette scène, transmettre cette énergie-là au public qui nous la renvoie, jouer au ping-pong avec lui … On a vraiment trop hâte.

Si vous deviez résumer cette aventure en un seul mot en breton ?

Marine – Entan

Sterenn D. – … Ha taras

Marine – Entan, c’est un mot de la chanson qui veut dire à la fois la passion et l’effervescence.

Alvan – Moi, je dirais Yec’hed mat, c’est le seul mot que je connais. Cela veut dire « santé ». C’est la célébration, tu vois. (Rires)

Marine – Tan de’i, aussi (note de la rédaction : allons-y, en breton).


Un immense merci à Alvan & Ahez pour avoir très aimablement répondu à nos questions malgré un emploi du temps surchargé et la fatigue accumulée. Rendez-vous est pris la samedi 14 mai à Turin afin de vibrer sur l’enivrant rythme de Fulenn !

Merci également à Ludovic Hurel – responsable communication et presse de la délégation, pour l’organisation de cette interview.


P.S. : avant de vous quitter, Alvan & Ahez ont un petit message pour vous, lecteurs de L’Eurovision au Quotidien.

© Thomas Braut | FTV