À quelques heures du dénouement du Festival de Sanremo, Loreen a écouté avec la plus grande attention les titres du cru 2025 tout au long de cette semaine de marathon. Alors, verdict ?
Avis général
Sanremo… Ah Sanremo. Autant dire que la cité ligurienne n’usurpe pas son statut de plus grand festival d’Italie, et pour cause. Une nouvelle fois, c’est un grand cru qui nous est proposé sur la scène de l’Ariston, et ce n’est pas pour rien si le festival enregistre cette année de nouveaux records d’audience, pour certains inégalés depuis plus de trente ans, et particulièrement chez les jeunes générations, dont on n’attendrait pas forcément qu’un tel line up les accroche le long de cinq fois mille et une nuits sanrémasques. Car si Amadeus avait fait le choix d’un casting très pop l’année dernière, Carlo Conti et ses 29 protégés de l’année ont préféré renouer avec certaines traditions sanrémasques. Je parle ici de la sacro-sainte ballade, présente en force y compris chez les plus jeunes noms du casting, pourtant plus connus pour leur univers urbain. Pour le reste, si l’Italie semble avoir son large trio de favoris au titre, avec deux noms en embuscade, du côté de Loreen (alias Rémi – dites que vous ne pouvez pas vous lasser de moi…), les jeux semblent beaucoup plus ouverts sur le papier, tant pour la victoire que pour l’Eurovision. Trêve de bavardages, parce que vous allez avoir suffisamment de lecture par la suite : volare, cantare et surtout TUTTA L’ITALIA, TUTTA L’ITALIA, TUT-TA L’I-TA-LI-A !
Note : les avis et les commentaires ici exprimés n’engagent que la propre opinion de leur auteur, et ne reflètent en aucun cas l’avis général de la rédaction.
Achille Lauro – Incoscienti giovani
Vous connaissez la chanson : à chacune de ses participations à Sanremo, on attend Achille Lauro encore plus sulfureux que la fois précédente. S’il avait déjà donné des signes d’assagissement avec Domenica et ses choeurs gospel en 2022, ce fut pour mieux se rattraper sur la scène de l’Eurovision pour Saint-Marin. Cette année toutefois, Lauro semble s’être bel et bien rangé en nous proposant une élégante ballade dans laquelle il se met littéralement à nu et expose toute sa sensibilité au public. Quoi de plus décourant connaissant le personnage… et étonnant, cela fonctionne parfaitement. Avec Incoscienti giovani, Lauro livre une nouvelle version de lui-même, qu’il incarne avec sa classe habituelle. Rien de plus logique que de le voir parmi les favoris à la victoire.

Bresh – La tana del granchio
À rebours de son univers musical habituel, Bresh propose ici une ballade qui mélange les influences, des sonorités de guitare sèche aux influences pop-rock, en passant par une interprétation plutôt en voix de rap. Si l’ensemble sonne bien, voire très bien, il n’en demeure pas moins un classique du genre, sans doute trop classique pour parvenir à se démarquer suffisamment dans la longue playlist des 29 titres de Sanremo 2025. D’autant plus que, malgré le fait qu’il soit vraiment agréable à l’écoute, La tana del granchio se trouve concurrencé par des ballades plus impactantes dans le style.

Brunori Sas – L’albero delle noci
Sans surprise, Brunori Sas nous livre pour sa première participation à Sanremo un véritable titre de cantautore à l’italienne, et inutile de dire que L’albero delle noci coche parfaitement les cases du genre. Une proposition très initimiste, dans laquelle toute l’attention se focalise sur l’artiste et son interprétation. Voilà une chanson à texte douce, sensisible, poétique, naturaliste et authentique. Si Brunori Sas nous livre un pur moment de vérité musicale et que la chanson présente des qualités d’écriture évidentes, je dois avouer rester complètement sur le bord du chemin, n’étant pas le public cible de ce genre de propositions qui me laisse malheureusement de marbre, d’où une seule Loreen sévère. Objectivement, le titre vaut davantage, mais je n’y suis tout simplement pas réceptif et je ne pense pas que ce soit le meilleur choix à faire pour la victoire.

Clara – Febbre
Clara nous avait séduits l’année dernière avec le pétillant et solaire Diamanti Grezzi, qui continue d’enflammer ma playlist un an après. Revoilà la jeune artiste révélée par Sanremo Giovanni de retour avec Febbre, un titre électro pop urbaine dans la droite lignée de son cru 2024. On retrouve ici tous les ingrédients qui font le succès de l’artiste : rien de tel pour susciter la fièvre en nous. Mais si Febbre est un joli titre à la belle composition, cette dernière est un poil déconstruite et manque surtout d’accroche et d’entêtant. Une fois écoutée, la proposition a du mal à imprimer l’esprit et souffre de la comparaison avec Diamanti Grezzi (encore !), en dépit de ses qualités.

Coma_Cose – Cuoricini
On aime Coma_Cose dans l’équipe de Loreen. On aime cette indie-pop, douce-mère, mélancolique, minimaliste… Sauf qu’ici, le duo se fait plus enjoué et moins mélancolique que dans ses habitudes, justement. Un changement de cap qui leur sied à la perfection, d’autant que la rythmique joueuse de Cuoricini accroche bien l’oreille et reste très bien en tête. On retrouve d’ailleurs dans ce titre électro-pop aux sonorités vintage des années 70-80 l’esprit de La Rappresentante di Lista (« Con le mani, con le mani, con le mani… »), mais aussi un soupçon de Ricchi e Poveri dans le refrain. Conclusion ? C’est oui pour Sanremo, mais aussi pour l’Eurovision !

Elodie – Dimenticarsi alle 7
Qui, parmi les eurofans, ne rêve pas de voir enfin Elodie soulever le trophée de Sanremo et représenter l’Italie à l’Eurovision ? On retrouve pleinement l’esprit de son univers musical dans Dimenticarsi alle 7, à savoir une pop légère pleine d’atouts charme. Si la proposition n’est pas dénuée de qualités, il lui manque toutefois la fameuse et indispensable accroche poreilour impacter suffisamment l’oreille. Si le titre est de facture supérieure à Due, sa précédente contribution à Sanremo, force est de constater qu’une fois de plus, Elodie nous propose ses meilleurs titres en dehors du festival…

Fedez – Battito
Très attendu, le sulfureux rappeur ne déçoit pas avec son vrai rap bien dark, bien sombre et bien urbain, comme on l’attendait. Avec Battito, l’ex époux de Chiara Ferragni (et ex duo de Francesca Michielin à Sanremo 2021) tient un tube en puissance, qui cartonnera assurément dans les charts italiens à la sortie de Sanremo. Il n’y a pas à dire : l’excellence de la proposition en fait un sérieux candidat à la victoire, à condition que le jury de la salle de presse/web/TV (qui semble peu goûter à la personnalité et à l’artiste) ne le plombe pas de trop. De la production parfaitement calibrée à la dramaturgie maîtrisée du titre, en passant par son interprétation habitée, Fedez nous offre l’un de mes coups de coeur, si ce n’est mon coup de coeur de ce cru 2025.

Francesca Michielin – Fango in paradiso
Il suffit du timbre de voix unique, sensible et fragile de Francesca Michielin pour tout faire chavirer. Si l’eurostar, ancienne représentante italienne à l’Eurovision 2016, ne nous propose pas le titre le plus percutant du festival, sa jolie ballade (dans la droite lignée de Nessun grado di separazione en peut-être plus mature) me touche en plein coeur, et cela ne s’explique pas. Enfin, si, et plus précisément en neuf lettres. On l’appelle l’effet Francesca, et ce n’est pas pour rien que mon petit coeur a fondu à l’écoute de cette chanson émouvante, douce et amère à la fois, mais qui ne pèche certainement pas par excès de naïveté.

Francesco Gabbani – Viva la vita
Cinq ans après sa dernière participation à Sanremo, on retrouve une nouvelle fois Francesco Gabbani avec une ballade, loin de ses titres sémillants et malicieux qu’il nous propose habituellement (et qui lui ont valu sa première et seule victoire au festival en 2017). Évidemment, le charisme du Gabbani crooner fonctionne également à plein sur ce titre aux accents nostalgiques, mais que je trouve à personnel trop classico-classique. Si la ballade se retient plutôt bien à l’oreille, sa composition me semble trop simple et basique dans le style pour s’imposer face à des concurrentes plus percutantes et mieux écrites. Surtout que je préfère Gabbani dans son style musical habituel…

Gaia – Chiamo io, chiami tu
Drôlement sous-côtée, la proposition de la co-autrice du tube de l’été italien de 2024. Pourtant, Gaia reste ici fidèle à son univers pop urbain qui connaît un bel écho de l’autre-côté des Alpes. Chiamo io, chiami tu (dont la rythmique du refrain n’est pas sans évoquer Un ragazzo, una ragazza de The Kolors) séduit effectivement par son côté estival et latino, véritable atout charme de la proposition qui pourrait bien devenir l’un des tubes de l’année en Italie. Loreen/Rémi l’a, en tout cas, d’emblée ajouté à sa playlist italienne.

Giorgia – La cura per me
La grande favorite – et star en Italie – est au rendez-vous de Sanremo 2025, trente ans pile après sa première et unique victoire au festival à ce jour. La cura per me est une ballade typiquement italienne classico-classique, certes. Mais là n’est pas le véritable sujet, puisque le coeur de ce dernier se prénomme Giorgia. Quelle voix… Quelle interprète… L’artiste suffit à elle seule à sublimer ce titre élégant de par une interprétation somptueuse et d’une incroyable pureté. Nul besoin de s’époumoner pour être une diva populaire : voilà la marque d’une grande et Giorgia en est aujourd’hui la preuve vivante. Rien d’étonnant à la retrouver aujourd’hui en course pour la victoire, même si je reste interrogatif quand je me projette le titre sur la scène de l’Eurovision.

Irama – Lentamente
Dans la lignée de ses toutes dernières propositions à Sanremo, Irama nous propose une nouvelle ballade dont il sait en avoir le secret. Dans cette pure veine, Lentamente est un titre doté d’une belle efficacité et bien porté par son interprète, dont on gagnerait toutefois à entendre davantage la voix bien trop couverte par le vocodeur. Dommage, parce que cela retire un soupçon d’authenticité à cette très belle chanson, qu’il ne serait toutefois pas surprenant de retrouver dans le top 5 si, comme d’ordinaire, le public soutient massivement Irama, là où le jury de la salle de presse/TV/web et le jury radio sont d’ordinaire plus timorés à son sujet. Quoiqu’il en soit, on est une nouvelle fois séduit par le cru Irama.

Joan Thiele – Eco
On ne l’attendait pas, et voilà l’énorme coup de coeur de cette édition 2025 : Joan Thiele (prononcer « Ti-lé »), artiste indie qui nous propose ici un son évidemment indie-rock ô combien captivant et hypnotique, qui réveille en nous un feu ardent des plus chaleureux. On est séduit, envoûté, ensorcelé par cet Eco si anglo-saxon dans l’âme et dans le style, assurément une grande première dans le line up d’un festival d’ordinaire peu ouvert à ce style singulier sur la scène musicale italienne. La cowgirl Joan Thiele nous séduit, nous capture, nous attrape avec ses irrésistibles yeux revolver, qui achèvent de nous faire tomber sous le charme indescriptible de cette proposition saluée par la critique avant le festival. Puisse Sanremo 2025 mettre véritalement en lumière l’univers de cette artiste charismatique et puisse le public italien être réceptif à ce coup de foudre artistique majeur dans cette édition.

The Kolors – Tu con chi fai l’amore
Ici, on n’est guère objectif sur The Kolors tant on est fan de son inimitable Italodisco dont seule la péninsule a le secret. Cela tombe bien : c’est pile l’esprit qu’on retrouve dans Tu con chi fai l’amore, un soupçon d’accroche en moins sur le refrain. Qu’importe : c’est un tube en puissance que tient une nouvelle fois le groupe avec son délice disco pop à la rythmique vintage et entraînante, dont le pré-refrain n’est pas sans évoquer un certain Sinceramente… Avec un titre d’une telle qualité musicale, The Kolors aurait assurément sa place sur la scène de l’Eurovision, qu’il enflammerait de son charme à l’italienne.

Lucio Corsi – Volevo essere un duro
La première écoute de cette ballade indie pop à l’esprit britannique et aux sonorités vintage m’avait laissé perplexe – que dire de son classement dans le top 5 dès la première soirée ? C’était sans compter sur ce fameux « petit truc », ce quelque chose qui, néanmoins, vous fait craquer devant ce titre un tantinet surcôté. Est=ce que l’esprit seventies ? Sans nul doute. Mais c’est avant tout aux qualités d’interprète de Lucio Corsi que Volevo essere un duro doit son indéniable supplément d’âme.

Marcella Bella – Pelle diamante
Titre surprenant que ce Pelle diamante aux sonorités étonamment pop-rock, qui ne sont pas sans évoquer Pazza de Loredana Berté l’année dernière. À 72 ans, Marcella Bella (qui célèbre sa neuvième participation à Sanremo cette année) incarne avec force et puissance ce titre qui célèbre l’indépendance de la femme et dont je souscris évidemment complètement au message. Hélas, si l’énergie et la conviction sont au rendez-vous et font la plus grande impression, la composition et la production du titre sont beaucoup trop faibles pour tenir la concurrence en cette édition.

Massimo Ranieri – Tra le mani un cuore
Double fois consacré au rang d’eurostar, Massimo Ranieri est surtout une légende de la scène musicale italienne et du festival de Sanremo, où il participe pour la huitième fois en soixante ans de carrière. Quant à Tra le mani un cuore, c’est une belle ballade restée dans son jus qui nous est proposée ici, dont les sonorités dissonnent avec les standards actuels et ce qui est proposé en face. La proposition n’est pas de première fraîcheur, mais elle est portée par un grand monsieur dont le parcours et l’interprétation méritent inclinaison et respect, même si le titre est ce qu’il est.

Modà – Non ti dimentico
(Encore) une nouvelle ballade pop-rock pour Modà ! Même si Non ti dimentico reste une bonne proposition agréable à l’écoute, elle n’apporte aucune réelle plus-value au genre, puisque déjà vue et entendue des milliers de fois. Si le chanteur livre une interprétation habitée et que le titre bénéficie d’une belle composition (notamment les très jolis couplets au piano), l’ensemble ne se distingue pas vraiment dans l’océan de ballades sélectionné par Carlo Conti cette année. D’autres auraient pu faire la même il y a dix ou vingt ans, bien que le style reste tout à fait intemporel.

Noemi – Se t’innamori muori
Avec huit participations au compteur, Noemi s’inscrit déjà parmi les légendes de ce festival, dont elle pourrait trouver une solide place au Hall of Fame le jour où celui-ci sera créé. Avec sa voix rauque inimitable et reconnaissable parmi mille autres, celle que l’on associe souvent à Fiorella Mannoia nous livre sans surprise une nouvelle ballade, mais pas n’importe laquelle, puisqu’elle est signée Mahmood et Blanco. Là est le tour de force de Se t’innamori muori : celui d’imprimer la marque du duo tout en restant sincèrement Noemi. Et si l’artiste nous présentait là l’une de ses plus belles contributions à Sanremo ?

Olly – Balorda nostalgia
Attendait-on Olly dans une ballade aux sonorités de guitare sèche ? Objectivement, non. La proposition, qui n’est pas sans rappeler les sorties sanrémasques d’Irama, est assez classique de facture, même si l’interprète tient parfaitement son rôle de crooner italien. Balorda nostalgia est une valeur sûre, c’est certain, car le genre (doté d’un inimitable charme à l’italienne) fait toujours son effet. Après, en quoi se distingue t-elle particulièrement des autres ballades de la compétition ? N’y a t-il pas proposition plus marquante dans ce cru 2025 ? La question mérite d’être posée, à moins que l’envie de voir l’artiste sur d’autres terrains musicaux que celui-ci nous retire une part d’objectivité.

Rkomi – Il ritmo delle cose
Le rappeur passe actuellement aussi inaperçu que lors de sa première participation à Sanremo en 2022. Dommage, car Rkomi propose un titre pop-rap fort sympathique, dans la veine de son univers habituel. La ligne musicale des couplets au piano est fort intéressante et se marie très bien à la teinte urbaine de la proposition, qui séduira à coup sûr les fans du chanteur. Il ritmo delle cose a un véritable potentiel radio-friendly et il ne sera pas étonnant de voir le titre tutoyer le haut des charts en sortie de festival. Pour Sanremo toutefois, il manque un poil de percutant pour parvenir à émerger suffisamment dans le line up de l’édition 2025.

Rocco Hunt – Mille vote ancora
A rebours des sons très urbains – et parfois sombres – du moment dans le style, Rocco Hunt propose un rap solaire, lumineux, authentique, qui fleure bon l’air du sud de l’Italie et ses racines. Mille vote ancora est un titre agréable à l’écoute, non sans accents estivaux, des plus plaisants. Pour autant, il lui manque sans doute un soupçon de force de frappe musicale pour s’installer parmi les titres les plus compétitifs de l’édition.

Rose Villain – Fuorilegge
La Rose aux cheveux bleus est de retour avec un titre dans la lignée de l’univers de Click Boom. Là où la composition de ce dernier souffrait parfois de ressorts simplistes (surtout rapporté à la concurrence sanrémasque), Fuorilegge présente davantage d’intérêt sur le plan musical, les sonorités de ballade venant apporter leur touche à une identité assurément pop. Si le titre est sans doute un poil moins accrocheur et entêtant que l’inarrêtable Click Boom (devenu un tube en Italie), il n’en reste pas moins que Fuorilegge est une véritable réussite et, surtout, qu’il imprime bien l’esprit à l’issue de la première écoute. Il faut dire que le titre offre un très beau refrain dans son style.

Sarah Toscano – Amarcord
Pour sa première à Sanremo, la jeune protégée de Maria di Filippi (18 ans seulement !) propose un titre disco-pop d’une belle fraîcheur et très entraînant, donc certains accents ne sont pas sans évoquer Furore de Paola et Chiara en 2023. Un Amarcord (du nom du célèbre film de Fellini) doté d’un réel potentiel, qui augure de très belles promesses pour Sarah Toscano, qui était assez fébrile au moment de monter sur scène mardi en fin de soirée. Si elle est venue à Sanremo dans la position d’outsider, il n’en reste pas moins une proposition très accrocheuse et dotée d’une belle énergie, dont les sonorités à la fois vintage et modernes ne peuvent que nous faire craquer !

Serena Brancale – Anema e core
Pas le nom le plus connu de la sélection, Serena Brancale est la véritable surprise de cette édition, dans laquelle on est tombé sous le charme de son Anema e core, justement plein d’âme et de coeur. Il faut avouer que les sonorités carioca de son titre pop en langue barese ont de quoi vous faire irrésistiblement craquer, tant la proposition est attirante et aussi chaleureuse que l’esprit des Pouilles. Rythme caliente, teinte tropicale, charme inimitable de la langue… Ne cherchez plus : une star est née.

Simone Cristicchi – Quando sarai piccola
Et si on tenait le vainqueur de Sanremo 2025 ? Et si Cristicchi réalisait une Sobral samedi soir ? L’hypothèse n’est pas à exclure tant Quanda sarai piccola a bouleversé la cité ligurienne et l’Italie tout entière. Pour cause, puisque le cantautore nous livre ici une proposition d’une sensibilité et d’une poésie sans égales, au coeur de l’intime (le titre évoque sa mère atteinte de la maladie d’Alzheimer, qui redevient une enfant). Une chanson d’interprète bouleversante, qui percute en plein coeur, qui résonne en chacun d’entre nous, qui prend aux tripes si l’on saisit le sens des mots. Simone Cristicchi signe ici l’un des plus beaux textes, si ce n’est le plus beau, de cette édition. Je ne suis pas le public cible de base, mais il faut reconnaître ce qu’il est et s’incliner devant l’émotion et la talent. Une question toutefois : est-ce qu’une personne qui ne comprend pas l’italien – et donc le texte – serait susceptible d’être autant touchée ?

Shablo, Guè, Joshua et Tormento – La mia parola
Un « vieux » rap de « vieux » rappeurs : voilà l’effet que fait La mia parola à la première écoute, tant la ligne musicale du titre et son interprétation fleurent bon le rap de la génération 90. Certes, le côte solaire de la composition n’est pas désagréable à l’écoute : mais le titre de ce quatuor formé pour l’occasion souffre de réelles faiblesses musicales face à la force de la concurrence et, surtout, des propositions rap-pop qui résonnent beaucoup plus avec les sonorités contemporaines du moment.

Tony Effe – Damme ‘na mano
Le moins qu’on puisse dire, c’est que le rappeur nous livre ici une proposition déroutante eu égard à ses standards habituels ou à son Sesso e samba de l’été 2024. Si on reconnaît le charme de la voix chaleureuse et sussurante, on a de quoi être surpris par ce Damme ‘na mano à la fois vieillot (certains diraient nostalgique) et actuel, évocation de sonorités anciennes qui ne sont pas sans rappeler la légendaire bande originale du film Le Parrain ou de quelconque autre film de mafieux. Le tout mêlé à une interprétation plus moderne, le rendu me paraît assez dissonant eu égard à la personnalité artistique de Tony Effe, qu’on aurait aimé retrouver dans un son plus percutant, là où la chanson reste très linéaire et tend à passer inaperçu dans le line up.

Willie Peyote – Grazie ma no grazie
Il avait été l’un des chocs de l’édition 2021 avec Mai dire mai. De retour avec Grazie ma no grazie, Willie Peyote (et non Coyote, comme je suis tenté de l’écrire à chaque fois…) reste fidèle à sa ligne de conduite satirique et second degré, sans oublier les piques bien senties qui ponctuent le texte. À l’écoute, le titre – qui démarre sur des sonorités World Music avant de partir en rap simple – m’évoque d’ailleurs Euronero de Rambo Amadeus (inoubliable Monténégro 2012) (!) dans le rythme, mais en version Musica legerissima solaire et estivale. Ainsi, Grazie ma no grazie est une proposition sympathique, à laquelle il manque le percutant de Mai dire mai, mais dont le refrain reste néanmoins en tête.

Écoutez et réécoutez la playlist de Sanremo 2025 sur YouTube et sur Spotify.
Che conclusione ? Sara perchè Sanremo !
Tout est dit dans le titre. Après une première soirée qui m’avait laissé chaffouin (et fatigué par 4h30 de live tweet – puisqu’on vous dit que l’Eurovision est un sport olympique), l’écoute et la réécoute des titres et des prestations m’a très vite permis de renouer avec ce Sanremo 2025 de très belle facture. L’amateur de pop et de styles plus contemporains a eu de quoi être dérouté par le trop grand nombre de ballades, surtout à un temps où la scène musicale italienne est traversée par une vague de musiques urbaines qui cartonnent dans les charts. Comme on dit, il en faut pour tous les goûts, surtout que le Festival est censé réunir l’Italie toute entière devant son écran et l’unir par la musique (même si, au contraire de l’UER, la RAI a eu le bon goût de ne pas en faire son slogan publicitaire. Vous avez donc pu le constater : Loreen est globalement très enthousiaste, et pour dire vrai, certaines notes négatives ou minimales ont été apposées afin d’apporter de la nuance et de la hiérachie au bilan global, auquel l’inévitable subjectivité s’est mêlée à la recherche d’une objectivité la plus sincère possible. Quoiqu’il en soit, cela ne résoud en rien le dilemme initial : à qui profitera la victoire ?
Loreen/Rémi rejoint les observateurs italiens : le quinté de favoris n’usurpe en rien son statut : Giorgia, Simone Cristicchi, Olly, Fedez et Achille Lauro semblent les plus à même de l’emporter ce samedi soir vu les votes de la semaine. Mais ici, on ne peut se limiter à cette courte liste, qu’on serait fort tenté d’allonger à Joan Thiele, The Kolors ou Coma_Cose, même si leurs chances de victoire sont très faibles, voire inexistantes. Tant qu’à allonger la liste, on ne cracherait pas non plus sur une victoire d’Elodie (vraiment parce qu’on est fan, car le titre ne le vaut objectivement pas), Rose Villain, Gaia, Francesca Michielin ou encore Irama. Bref, la liste des propositions qui nous ont séduit est longue, et pas dit qu’on soit davantage fixé ce soir. Toutefois, si je devais me limiter à quelques noms, j’offrirais la victoire à Fedez, dont le titre m’a le plus percuté et me semble le plus résonner avec la scène musicale italienne actuelle, à Joan Thiele, pour laquelle on a eu un immense coup de coeur, ou à The Kolors, parce que ma déformation pop et musiques urbaines est telle qu’il est logique de retrouver ce trio parmi mes favoris. À ajouter deux noms, Achille Lauro, dont le nouveau visage beaucoup plus initime et sensible, et la grande Giorgia, légende de la musique italienne et somptueuse interprète, concluent la liste de mes favoris à la victoire.
Pour ce qui est de l’Eurovision – puisque le vainqueur de Sanremo se verra offrir la possibilité de représenter l’Italie à Bâle en mai prochain, ce n’est plus la même affaire, car certains des favoris ne sont pas les titres les plus euro-compatibles sur le papier. Voir Simone Cristicchi monter sur la scène du concours avec sa splendide chanson de cantautore serait une prise de risque sans noms, à laquelle les européens pourraient offrir aussi bien une Salvador Sobral qu’un flop des plus totaux pour peu qu’on ne saisisse pas le sens des mots (je pencherais sans doute pour la deuxième option). Idem pour Brunori Sas. Quant à Giorgia, elle nous offre ici une très belle ballade qu’elle transcende, mais très classique dans la forme, ce qui n’avait toutefois pas empêché Marco Mengoni d’atteindre la quatrième place de l’Eurovision dans la même situation. Pour le reste, il y a d’ailleurs beaucoup de ballades classico-classiques qui pourraient dissonner sur la scène du concours en 2025, mais on connaît l’appétence des européens pour le style très italien et, là aussi, il en faut pour tous les goûts. Quoiqu’il en soit, les valeurs les plus sûres pour le concours sembleraient inévitablement Fedez, The Kolors, Coma_Cose, Achille Lauro ou encore Irama. Pourquoi pas Gaia ou Rose Villain également, dont les styles de titres font écho aux tendances musicales du moment sur le continent.
Et vous, quel est votre favori à la victoire ? Répondez dans le sondage ci-dessous !
Rendez-vous ce soir à partir de 20h40 sur RAI Play et sur le compte X @EuroQuotidien aux côtés de Juliette (en première partie) et de Rémi (en seconde partie) pour suivre ensemble cette cinquième soirée finale du Festival de Sanremo 2025.









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