2026 approche de plus en plus en ce 30 décembre 2025. En cette fin d’année, la rédaction vous dévoile chaque jour les titres qui ont le plus marqué les rédacteurs et rédactrices à l’Eurovision, aux sélections nationales et à l’Eurovision Junior et c’est aujourd’hui Juliette qui clôture la rubrique pour vous faire découvrir ses dix chansons marquantes de cette année. Bonne découverte !
En ce moment, ça va pas.
Enfin si.
Enfin non.
Enfin oui et non à la fois.
Est-ce que je suis heureuse ? Est-ce que les fêtes font du bien ? Est-ce que tout va comme je veux dans les projets que je mène hors-EAQ ? Oui, oui, absolument, et sans faux-semblants.
Est-ce que j’affronte aussi une véritable fatigue émotionnelle depuis octobre, lié au trop-plein causé par tout ce qui s’enchaîne dans ma vie (dans et hors de l’Euromonde) ? Oui. Oui aussi.
Est-ce que les récentes tensions autour de l’Eurovision m’ont mis un coup sur la tête? Oui. C’est inutile de le nier.
Même si j’accepte la situation tendue en me disant qu’après tout, c’est la musique qui compte et que je suis là pour découvrir des talents tout autour de l’Europe, la perspective d’un 2024 bis m’effraie particulièrement.
2024, l’année où on avait tous perdu notre lucidité et où l’impulsivité était de mise. L’année où tout le monde (même l’UER) réagissait de manière émotionnelle plus que factuelle tant tout le monde était à cran, dans un gigantesque effet tunnel. (C’est, en tout cas, toujours comme ça que j’ai ressenti des situations comme la disqualification de Joost).
2024, l’année où il fallait choisir un camp, « et si t’es neutre, t’es complice ! ».
2024, l’année où même live tweeter la finale était devenue une angoisse en soi.
2024, l’année où j’ai failli quitter l’Euromonde.
Et cette année encore, la question se pose. Et depuis octobre, novembre, décembre, je me débats dans un drôle d’océan de sentiments. Lassitude, déni, espoir ; quelques vagues de passion qui reviennent deci-delà, mais trop fugaces, trop éphémères.
Je crois que ça va mieux, et je retombe encore dans le gouffre.
C’est pour ça que j’ai tout lâché.
Pas par abandon.
Pas par paresse.
Par épuisement.
Parce que mon corps, mon coeur, mon âme ont crié STOP !
On appelle ça un meltdown. Un effondrement autistique. Ça arrive comme ça, ça ne prévient pas. Et ça peut durer une semaine comme deux mois.
Avant, je culpabilisais. Maintenant, je sais que cela fait partie de mon fonctionnement. Et j’essaye de m’en sortir, tout doucement.
Oui, j’ai tout laissé en plan, et cet article, au-delà d’un top, c’est mon mot d’excuse. Le mot d’excuse d’une rédactrice qui a toujours la passion, qui ne sait plus où elle en est, mais qui, sincèrement, voudrait aller mieux pour vous retrouver. Parce que je tiens trop à l’EAQ pour abandonner le navire en temps difficiles.
Oui, 2026 est incertain.
Mais qu’en est-il de 2025 ? De cette année qui s’achève ?
Je devrais faire un top 10. Je pourrais en faire un. Il y aurait de quoi dire. Car cette année fut riche en découvertes, en révélations. Mais je reviendrai toujours à l’essentiel, à une seule chanson qui résume tout 2025. Une chanson qui, à elle seule, me rappelle pourquoi je suis Eurofan à la base des bases.
Alors allons-y. Un top 10, et un roman pour le premier. Pavé César, ceux qui ne vont pas lire te saluent !
10 : Abor und Tynna – Baller (Allemagne)
Enfin de l’allemand! Enfin ! Après tant et tant d’années, mon grand rêve est enfin réalisé. Pas avec JEREMIAS (hélas), mais avec nul autre que le duo sur lequel j’avais misé pour l’Autriche au Quorovision 2024. Une immense fierté, récompensée par un beau succès pour la chanson, et une honorable place au classement. Gut gemacht!
9 : Joan Thiele – Echo (Sanremo, Italie)
Ne vous étonnez pas de voir Sanremo bien représenté, car cette édition 2025 m’a profondément marquée. Joan Thiele, c’est l’artiste que je n’imaginais pas retrouver ici, et qui a su s’illustrer à merveille avec ses airs de femme fatale sortie tout droit d’un western. Non, elle n’a pas été classée dans le top 10. Mais les gens l’oublient trop souvent : à Sanremo, la victoire, c’est déjà d’y être. Peu importe où l’on termine, cette semaine d’exposition au grand public sera forcément bénéfique aux artistes, du premier jusqu’au dernier. « Echo », en tout cas, a envoûté l’Aristone, et n’a plus quitté ma playlist.
8 : Te Escrivo en el cielo (Benidorm Fest, Espagne)
Aux antipodes du tapageur « Esa Diva », Lucas Bun m’avait émue aux larmes avec cette chanson bouleversante et mélodieuse. Un moment de grâce et de vulnérabilité qui aurait mérité d’aller à Bâle.
7 : Sarah Toscano – Amarcord (Sanremo, Italie)
De loin ma chanson la plus écoutée (après mon vainqueur, bien sûr) de ce Sanremo, ex aequo avec l’addictif « Cuoricini ». Je crois que ce qui me plaît le plus, c’est la mélodie. Surtout celle des pré-refrains, qui a un je ne sais quoi de classique. Un beau début pour Sarah, qui, je l’espère, reviendra.
6 : Gabri Ponte – Tutta l’Italia (Saint-Marin)
De la publicité à Saint-Marin, il n’y a qu’un pas, que « Tutta l’Italia » a allègrement franchi. Rien qu’à Sanremo le morceau était iconique en tant que jingle. En plein live tweet, c’était le signal de la pub, le signe qu’on pouvait prendre une petite pause dans la folie des interminables soirées. Et à l’Eurovision ? À la fois une satisfaction que l’Europe la découvre, et une petite déception parce que la mise en scène n’était pas du tout, du tout à la hauteur. Mais au moins, on a pu chanter « TUTTA L’ITALIA, HEY ! » à tue-tête de février à mai. Et ça, c’était beau.
5 : Astrid and the Scandals – Touché (EMA, Slovénie)
J’ai passé la saison à défendre l’EMA et à dire que c’était une bonne NF. Et de toutes les chansons présentes, c’est de loin celle que j’ai le plus écouté. Pas Eurovision-esque pour deux sous (et c’est ça qui me plaisait); un rock très anglais, un peu psychédélique, fait par plaisir plutôt que pour plaire. Et c’est ça qui m’emballait dans cette proposition décalée, audacieuse. Une belle découverte.
4 : Carson Coma – Daddy said no (Una Voce per San Marino, Saint-Marin)
UN SCANDALE, MESDAMES ET MESSIEURS !!! Quel manque de respect envers le meilleur groupe hongrois (allumni du Quorovision 2023). Voilà ce qui arrive quand on a 2212 chansons en compétition dans sa NF, on fait des mauvais choix et on laisse passer des PÉPITES ! Carson Coma en anglais, j’avais très peur du concept. Mais le résultat est magnifique. Théâtral. Comme avec « Touché », les paroles n’étaient pas Eurovision-esques du tout, et c’était ça que j’adorais. Une chanson sans concession, qui reste cohérente tout en partant dans tous les sens. Alors autant lui rendre justice, parce qu’à Saint-Marin on peut vite oublier des merveilles.
3 : Zoé Më – Voyage (Suisse)
En quelques mots : doux, sublime, gracieux, intemporel. On a besoin de plus de chansons de ce type (chers diffuseurs, ne vous laissez pas décourager par le 0 points au public, le télévote était faussé). Plus de calme et d’apaisement dans un monde qui part en vrille, mais aussi dans un concours où le tape-à-l’œil prime parfois trop sur la qualité musicale. Alors chers artistes, emmenez-nous plus souvent en voyage.
2 : Tautumeitas – Burman laimi » (Lettonie) / Katarsis – Tavo Akiz (Lituanie) / NAPA – Deslocado (Portugal) / Zipherblat – « Bird of prey » (Ukraine)
Impossible de les dissocier dans mon esprit. Je les appelle « les Quatre Fantastiques ». Je les écoute souvent l’une après l’autre. Alors dans ce top, je ne pouvais pas faire autrement. Il fallait qu’ils partagent la médaille d’argent.
Quatre groupes. Quatre pays. Quatre styles. Quatre ambiances.
Un choeur de femmes aux harmonies enchanteresses, mettant en valeur le folklore.
Un groupe de rock quasi-progressif, aux sonorités sombres et torturées.
Un groupe tout doux, au charme élégant, quasi-britannique, amenant par surprise leur mélancolie indie.
Un groupe nous faisant remonter dans le temps, à l’époque où les Beatles et Supertramp étaient rois.
Ils n’ont rien en commun, ou presque.
Ils ont tous chanté dans leur langue.
Ils se sont tous qualifiés en finale, même ceux qu’on n’attendait pas.
Et surtout, ni l’un, ni l’autre n’a fait de concession juste parce que c’était l’Eurovision. Tautumeitas sont restées fidèles à leur esthétique habituelle. Katarsis a apporté un rock pu.on entend jamais sur ce genre de scène. NAPA a surpris tout le monde avec une chanson qui ne ressemble à rien de ce qu’on entend au concours, devenant même viraux après-coup. Zipherblat ont envoyé une proposition que jamais l’Ukraine n’avait osé proposer.
Rien n’était formaté. Tout était authentique. Et je crois qu’à l’avenir, c’est vers ce genre d’artistes que je vais me tourner. Pas les interchangeables à qui on fait chanter des tubes pop qui auraient pu être écrits par n’importe qui. Non. Je veux les sincères. Ceux qui font passer leur univers AVANT les demandes des Eurofans. Ceux qui, même s’ils ne brillent pas dans les résultats, savent qu’ils sont restés fidèles à eux-mêmes jusqu’au bout. Je veux que l’Eurovision fasse tomber les barrières. Fini les clichés. Je veux qu’à l’Eurovision, on puisse tout envoyer, car la musique est belle dans sa diversité.
1 : Lucio Corsi – « Volevo Essere un duro » (Italie)
« Vivre la vie est un jeu d’enfant », me disait maman tandis que je tombais des arbres… »
Il est arrivé, le grand moment.
Celui d’aborder mon numéro 1.
Mon gagnant.
Celui qui m’a fait pleurer pendant quinze minutes après que le concours soit fini, alors que JJ entonnait de nouveau « Wasted Love ».
Celui qui voulait être un dur à cuire, mais a l’âme bien trop artistique pour complètement le devenir.
Mais revenons en arrière.
En 2018, je tombais dans le terrier de lapin de l’Eurovision, telle Alice, parce que « Ciao » de Malo’ avait su me toucher en plein coeur, et retourner toutes mes émotions d’une manière indescriptible. (Pour l’anecdote, je pleure toujours en l’entendant sept ans après, comme la première fois).
Depuis, il y a eu des coups de coeur, des coups de foudre. Il y a eu Didirri, Diodato, Victoria, Maro, Miguel Marôco, les Maneskin, Sam Ryder, Blanca Paloma, Joker Out, Barbara Pravi, Go_A, Lucas Bun…
Tous m’ont fait ressentir de grandes et belles émotions, mais nul n’avait su frapper aussi fort que Malo’.
Et il y est arrivé, en douceur. Lui. Lucio Corsi.
Tout a commencé en février. Lorsque je devais rédiger les portraits des artistes de SanRemo. Arrive le tour de Lucio Corsi, nouveau venu dans la bande dont je ne savais rien. Absolument rien.
En faisant mes recherches, deux mots me sautèrent aux yeux. Glam. Rock. C’est ainsi qu’on décrivait son style musical un peu partout. Ses projets m’intriguaient (surtout « Bestiario musicale », un album concept sur les animaux de la Maremma Grossetana. Des Fables de La Fontaine en musique, presque). Mais je me refusais à écouter la moindre chanson. Comme par intuition. Comme pour mieux laisser la magie de la première rencontre se produire. Mais je l’avais à l’oeil, ça c’était sûr !
Je vous remets mot pour mot ce que j’avais écrit sur le groupe de la rédaction juste avant qu’il n’entre en scène, ce fatal soir de février où mon coeur fut volé.
« Attention, voilà un artiste que je surveille parce qu’il a le potentiel d’être mon crush musical de la saison ».
Tu parles d’un crush… Une flèche en plein coeur, oui !
La foudre frappa aussitôt que résonnèrent les premières notes de « Volevo essere un duro ». C’était plus qu’un moment de pure poésie, plus qu’un conte de fées moderne comme l’avaient décrit la presse. C’était un moment hors du temps, une plongée dans les années 60, les Beatles ramenés à la vie, mais avec ce je ne sais quoi d’unique, de profondément Italien.
Il faut aussi savoir que Sanremo, je l’écoute à la radio. Alors je n’ai pas vu. Je n’ai pas vu son visage maquillé de blanc, comme un doux Pierrot. Je n’ai pas vu qu’il passait du piano à la guitare. Je n’ai pas vu qu’il y avait marqué « Andy » sous sa botte, comme dans Toy Story. Tout ça je ne l’ai appris qu’après, dans les retours des Eurofans et des journalistes.
Non, ce premier soir, c’est la musique seule qui m’a frappée.
J’avais le sentiment d’être seule à aimer ce titre, et je m’attendais à le rester (j’avais pris l’habitude avec ce genre de titres, que Fulminacci ou Manini avaient pu présenter les années précédentes).
Quelle ne fut pas ma joie de voir que, soir après soir, presse et public suivaient le mouvement. Que je n’étais pas la seule à être touchée en plein coeur. (Enfin, j’étais en accord avec les Italiens, parce que côté Eurofans, j’étais toujours très seule !).
Le coup de grâce vint avec la soirée des covers, et ce duo improbable sur le papier avec Topo Gigio (petite souris en mousse, véritable icône de la culture italienne des années 70), qui se transforme en un moment de magie, de fantaisie enfantine. On se serait crus dans un Disney. Un véritable voyage dans un autre monde, qui fait du bien dans des temps toujours plus troublés. Une des plus belles séquences de cette année au SanRemo. Que dis-je ? Une des plus belles séquences de toute la saison 2025. J’ai encore la larme à l’oeil à chaque fois que je la revisionne, tant elle déborde d’innocence retrouvée.
Lorsque Lucio arriva deuxième, j’étais ravie. C’était ma victoire personnelle, et j’étais prête à ce qu’Olly aille à Bâle. Bravo à lui, il avait gagné…
Et là, c’est le drame ! Olly qui hésite. Olly qui prend une semaine pour réfléchir, et qui me laisse le laps de temps parfait pour commettre une grave erreur : écouter les autres albums de Lucio Corsi.
Je me suis branchée sur Radio Mayday. J’ai embarqué dans un vaisseau spatial tourne-disque. J’ai rencontré le vent à Trieste, des insectes, un lièvre sur la lune, des aliens, une fille transparente, un garçon qui a disparu dans les airs après un tour en balançoire, et même l’esprit d’un chef indien au beau milieu d’un voyage en train.
L’univers de Lucio Corsi est profondément poétique, hors du temps, entre conte et surréalisme, entre l’elfe et l’extraterrestre, entre l’auteur-compositeur-interprète à la douceur folk et la rockstar déchaînée.
Au bout d’une semaine, c’était plié. C’était Lucio Corsi et personne d’autre, et si Olly acceptait, je crois que j’aurais été un peu déçue.
Quelle joie quand la nouvelle tomba. Olly aura bien le temps de revenir. Il est jeune, il est talentueux, l’Eurovision lui ouvrira bien ses portes un jour. Cette année, il fallait laisser briller un artiste. Un artiste qui vous entraîne avec lui dans son monde intérieur.
Je me suis beaucoup retrouvée dans cet aspect, moi qui écris des livres et qui prend plaisir à emmener mes lecteurs dans les mille tourbillons et folies de mon univers fantastique. Je crois que c’est pour ça, aussi, que je me suis tant attachée à Lucio Corsi. Parce qu’il ressemblait à un personnage que j’aurais pu écrire. Il aurait arpenté les rues de Greasper Town que ça ne m’aurait pas surprise !
« Volevo essere un duro », ce n’est pas seulement un titre qui évoque Bowie et les grands du glam rock des 70′s. C’est une ode à la vulnérabilité, à la normalité (Mais qu’est-ce que la normalité, au fond ?), aux failles, à la sensibilité trop souvent refoulée (surtout chez les hommes ; le symbole est donc d’autant plus fort), et aux peurs qu’il est inutile de fuir car elles nous forgent en tant qu’humain. C’est un message tellement profond, tellement philosophiques, tellement universel, et si important en ce moment, quand les nouvelles font froid dans le dos et que seule la violence semble se dessiner à l’horizon.
C’est ce que je m’évertuais à défendre pendant les mois qui ont suivi. Et croyez-moi bien que ça n’a pas été chose facile. Si j’avais quelques alliés, le discours général, c’était : « L’Italie va faire son pire classement, cette chanson est ennuyeuse et complètement hors-sujet par rapport à l’Eurovision ».
Non, « Volevo essere un duro » n’est pas un titre fait pour l’Eurovision, et justement ! C’est sa force !
Est-ce que l’Italie pensait « Eurovision » en envoyant Rafael Gualazzi?
Est-ce que l’Italie pensait Eurovision en envoyant Il Volo ? Mahmood ? Les Maneskin ?
Sans doute pas. Pour eux, l’Eurovision, c’est souvent juste un bonus. Une side quest après Sanremo. Un moyen d’être un peu plus connus à l’international, e basta !
Et pourtant, toutes ces chansons, si uniques, ont atteint de beaux résultats. Quelque chose me disait que ce drôle de garçon, semblant tout droit sorti d’un autre temps, avait ce petit je ne sais quoi qui toucherait plus d’un coeur, même avec la barrière de la langue.
En tout cas, il avait touché le mien, me donnant l’impression de vivre un véritable film en temps réel. (L’outsider que personne ne connaissait devenant une star par surprise, et partant représenter son pays de façon imprévue ! Même les Blues Brothers applaudiraient en hochant la tête !).
Mai est arrivé. Et avec lui, une petite révolution.
En plus de 25 ans, personne n’avait joué d’instrument en live. Personne n’avait pensé à … l’harmonica ! Que personne n’a besoin de brancher.
Enfin, un instrument a résonné sans playback. Et ça ne pouvait être que grâce à Lucio, en y réfléchissant avec le recul. Lui qui vit pour la musique et non pour la compétition.
Cette finale, je ne pourrai jamais, jamais l’oublier.
Il vous faut le contexte !
Nous sommes le 17 mai. Le lendemain, je dois partir assez tôt avec ma maman, car c’est le premier jour du rallye auquel nous participons ensemble. Ma sœur est aussi présente.
Ce soir-là, nous sommes dans une chambre d’hôtel, ma sœur et moi. La télé allumée. Je me suis dévouée à la dernière minute pour faire le live tweet de la finale, prenant le job au pied levé. (Live tweet qui est très vite parti en roue libre d’ailleurs, on aurait dit que j’étais plus italienne que française !).
Le running order m’angoissait. Passer entre l’explosive Erika et la puissante Justyna, c’était le meilleur moyen de se faire oublier, n’est-ce pas ? De se faire écraser par ces deux fortes personnalités scéniques ?
Et puis est venu le temps de sa performance. C’était comme à Sanremo, mais en mieux. Dès que ma sœur m’a décrit que la botte avec écris « Andy » dessus était de retour, une larme a coulé le long de ma joue. Encore un peu plus de larmes quand ma sœur a pu découvrir les paroles grâce aux sous-titres, et a dit : « Mais c’est magnifique ». Et quand l’harmonica a laissé entendre son timbre, là c’était fini. Une rivière de sanglots. J’étais tellement fière.
Puis le moment des résultats. Les 12 points qui s’enchaînent (et qui m’enthousiasmaient bien plus que ceux reçus par la France. Pardon Louane). Un superbe classement au jury.
Puis le télévote, ce télévote trop imprévisible (surtout en ce moment). Et Lucio Corsi reçoit 97 points !
10ème du télévote.
5ème au classement final.
Avec une chanson que personne ne voyait venir.
Le film n’aurait pas pu se finir autrement qu’avec une happy end.
Une fois la télé éteinte, ma sœur a dû me ramasser à la petite cuillère tant je pleurais. Pas de tristesse. De joie. De fierté. De soulagement.
5ème. Ce n’était même pas tant une question de classement. C’était une question de symbole. Oui, l’Europe est capable d’aimer des artistes atypiques, des chansons qui ne rentrent pas dans les clous. Oui, l’Europe a encore un cœur. Oui, l’Eurovision vaut encore la peine. Oui, on peut encore y trouver des talents, et les voir récompensés.
Comment voulez-vous dormir après une soirée pareille ?
Plus rien ne comptait. Même pas la 7ème place de la France avec seulement 50 points au télévote. Même pas la seconde place d’Israël qui a fait tant débat. Même pas la victoire de l’Autriche.
Moi, j’avais tout gagné.
Et au cours du rallye, quand les moments devenaient difficiles, je me répétais :
« Allez Juliette. Si Lucio Corsi a pu terminer cinquième alors que personne ne l’attendait, toi aussi tu peux le faire ».
Mon seul regret, c’est de ne jamais l’avoir interviewé. J’aurais eu mille questions à lui poser, je crois.
et de ne pouvoir aller le voir à Paris, parce que le concert tombe la veille d’un rallye. (Décidément, je commence à penser qu’il y a une étrange corrélation entre Lucio Corsi et mes rallyes ! C’est un complot !).
Alors voilà. Je sais. C’est un roman.
Je ne pense pas avoir écrit autant pour une première place depuis que nous faisons nos tops rétrospectifs.
Peut-être que je m’emporte, peut-être que c’est trop. Mais ce sont toutes les émotions que cette chanson et cet artiste m’ont fait ressentir.
Je n’ai jamais été aussi fière de donner un 10 sur 10 au CDC.
Un 10 sur 10 pour la qualité musicale. Un 10 sur 10 pour cet artiste qui n’était pas tant là pour l’Eurovision, pour la gloire ou le résultat, mais pour la musique et pour partager la sienne avec ceux qui savent l’écouter et garder leur âme d’enfant tout en ayant conscience du temps qui passent.
Je regarde l’Eurovision depuis sept ans. J’en ai vu des artistes. Des groupes et des chanteurs qui voulaient à tout prix être différents, se démarquer.
Lui n’a même pas eu besoin d’essayer. Il l’est. Il n’est nul autre que Lucio, et pour cette raison, il est mon gagnant cette année, et le numéro 1 de ce top. Très loin devant tous les autres. Grazie, Lucio. Grazie per la magia.
Comment conclure ce top ? Comment aborder cette année ?
Peut-être en se rappelant pourquoi nous sommes tous là. Désormais, je verrai autrement l’Eurovision. Je ne chercherai plus le meilleur résultat. Je chercherai l’artiste dont le parcours fera battre mon cœur, et qui prouvera qu’à l’Eurovision, on peut tout écouter.
Passez une belle année, et prenez soin de vous.
J’espère vous revenir bien vite.
Juliette.
La rédaction de l’EAQ vous remercie d’avoir suivi cette série de tops, qui sont le reflet de 2025. D’une année qui a emmené l’EAQ (et vous, chers lecteurs), vers mille horizons musicaux.
Nous vous souhaitons, de la part de toute l’équipe de l’Eurovision au Quotidien, de passer une merveilleuse année 2026. Et soyons tous, quoi qu’il arrive, unis par la musique.
Crédit photographique : Eurovision / Vidéos: YouTube









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