Il va falloir attendre encore 246 jours avant que nos rétines impriment à tout jamais les images du 59ème Concours Eurovision de la Chanson. Et heureusement qu’il reste encore 246 jours, car le projet maintenant en place, un dur labeur attend nos organisateurs danois. Nous sommes au point de départ de la route qui va nous mener à Copenhague 2014. Comme j’ai aimé le dire l’année dernière pour Malmö, elle sera longue et parfois semé d’embûches. Mais quoiqu’il va se passer durant ces 8 mois de préparation, gageons que DR sera fin prête en mai pour nous éblouir et nous faire vivre une compétition exaltante.

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Une modernité toute relative

Après le Parc Tivoli en 1964 et le méga Parken en 2001, c’est donc le B&W Hallerne, situé sur la presqu’île de Refshaleøen, qui sera le théâtre du plus grand concours de chansons au monde. Le B&W Hallerne est constitué de deux grands entrepôts. C’est l’entrepôt B (le plus grand bien sûr) qui servira pour les spectacles.

Et le travail ne va pas manquer aux danois. Car pour l’instant, le décor est plus propice à une enquête glauque de Sarah Lund pour la série The Killing qu’à un spectacle de variété international. Les deux halles sont quasi à l’abandon et l’emplacement prévu pour la scène est occupé par de gros containers.

La réfection des Halles est aussi une opportunité pour Copenhague d’avoir une salle de spectacle pour le futur. Pas étonnant donc que la ville contribue au projet en y injectant 40 millions de couronnes danoises.

bw1Du côté des organisateurs, on s’excite. DR veut faire de Refshaleøen une île Eurovision où ils pourront accueillir fans, journalistes et délégations. Une petite île alors. Car tout de même, le prochain Concours Eurovision sera l’un des plus « petits » depuis bien longtemps. Nous avions râlé l’année dernière car le Malmö Arena ne pouvait contenir que 15.000 spectateurs. Ici, nous serons entre 7 et 10.000 à pouvoir suivre le spectacle sur place (tout dépendra de la grandeur de la scène). C’est peu si l’on compare avec les autres années. Mais en même temps, cela s’inscrit dans la volonté de l’UER de faire un spectacle d’envergure plus modeste. A noter qu’un concours au Boxen d’Herning aurait permis à 5.000 fans supplémentaires de faire le déplacement.

A DR, on se prépare. Lors d’une conférence de presse, on annonce une volonté de moderniser le Concours, en y respectant toutes les traditions qui ont fait la gloire du show. Une déclaration qui prête à sourire. D’abord parce modernisme et tradition ne vont pas souvent de pair, et ensuite parce que l’Eurovision… ben c’est l’Eurovision, quoi !

Combien de fois a-t-on entendu, au fil des années, les prétendus souhaits de vouloir moderniser le Concours ? Mais la question est : techniquement parlant, l’Eurovision n’est-elle pas déjà au top de la modernité ? Chaque année, les organisateurs rivalisent d’effets spéciaux en tout genre et de nouveautés technologiques. S’il faut moderniser l’Eurovision, ne serait-ce pas plutôt au niveau des chansons. En demandant expressément aux diffuseurs d’Europe d’envoyer autres choses que des mélodies sirupeuses ou des bluettes qui ravis les seuls oreilles de nos grands-parents ? Parce qu’il faut bien l’avouer, lorsqu’on nous dit que l’Eurovision c’est ringard, c’est surtout des chansons dont on parle.

Encore que bien des progrès ont été fait sur ce sujet et l’on retrouve maintenant pas mal de chansons musicalement en phase avec notre époque.

bw3Moderniser l’Eurovision doit se faire d’une façon collégiale. Les pays doivent arrêter de privilégier des numéros visuels désuets pour se consacrer mieux à la chanson. Ne pas chercher à déployer les grands moyens sur scène parce qu’une chanson est, justement, trop moyenne. Interdisons les boules à facettes, les cages à verre et d’improbables autres gimmicks pour se concentrer sur ce qui devrait être l’essence même de ce concours : la chanson. C’est un peu comme ça que je verrais une nouvelle ère moderne pour l’Eurovision.

Moderniser l’Eurovision, cela pourrait se faire aussi en changeant radicalement le système de vote, devenu obsolète depuis qu’une quarantaine de pays participent. Car chaque année, impossible d’avoir un suspense. On sait dès la première partie du vote qui va gagner.

Bref, pour moderniser le Concours, trois mots d’ordre pour DR : « Emotions, proximité, fête ». D’accord, sauf que c’est à peu près les mêmes ingrédients que l’on retrouve chaque année.

On veut aussi supprimer les cartes postales pour les remplacer par un portrait des artistes. Belle initiative qui pourrait effectivement être intéressante. Pas sûr cependant qu’on puisse y voir une quelconque modernisation.

Mais je pense que l’Eurovision ne pourra jamais se moderniser au niveau du spectacle car il faudrait pour cela tout changer, de la présentation au système de vote. Or il y a dans l’Eurovision des traditions bien trop ancrées et, sans ces traditions qui nous sont chères, notre concours risque de perdre toute sa saveur.

Finalement, le 10 mai au soir, nous verrons un Eurovision comme les autres. Ni plus moderne, ni moins kitsch. Et c’est bien ça qui nous réjouira.

Le gâteau de la discorde

Les danois ont un caractère bien trempé ! Et à Herning, autant vous dire que la pilule est plutôt amère pour les habitants de la ville qui se voyaient déjà sous les feux de la rampe au printemps prochain.

Et la révolte gronde. Un boulanger d’Herning a même confectionné des gâteaux de protestation contre DR. Il avoue que l’idée n’est pas venue de lui, mais des vendeuses qui, le lundi fatidique où la télévision danoise a annoncé son choix, ont parlé à de nombreux clients de la boulangerie. Ceux-ci se disaient très déçus.

Les gâteaux, avec le nom de la télévision barré d’un trait rouge, ont été mis en vente dès le lendemain « du jour où tout a basculé ». L’histoire ne nous dit pas s’ils ont eu du succès.

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