Quelle soirée, mes aïeux, quelle soirée ! Elle a bien failli se terminer aux urgences pour moi, tant mon coeur aura frôlé l’attaque. Ce nouveau système de vote est décidément diabolique ! Jusqu’au bout, il m’aura fait douter du vainqueur et plongé dans l’incompréhension et la stupéfaction les plus totales. Au point de me priver d’une grande partie du plaisir causé par cette soirée mémorable et de me laisser sonné sur mon canapé. Je n’ose imaginer ce qu’ont dû ressentir les malheureux candidats sur place… Le pauvre Cesár et la malheureuse Eleni… Y croire encore et voir leurs espoirs réduits en miettes à l’ultime seconde…

Pensons à l’histoire : cette finale et son dénouement resteront gravés à jamais au panthéon des moments cultes du Concours. Et dans le mien aussi. Bien que j’ai eu l’impression de regarder une autre soirée que la plupart des téléspectateurs européens. Distortion fatale due à ma trop grande connaissance des chansons, des concurrents et des mises en scène. Voilà un point devenu frappant au fil des ans : je suis tellement éclairé que je ne vois plus l’évidence ! Je suis désormais incapable de discerner l’immédiateté et la spontanéité du Concours, trop occupé que je suis à analyser et décortiquer chaque prestation. Sans compter mes préjugés personnels et les mille-et-unes anecdotes collectées durant la Saison, qui finissent par encombrer mon esprit et entraver mon jugement.

Mais soyez rassurés : nous avons passé ensemble, à Bruxelles, une excellente soirée devant notre télévision. Cela devient un lieu commun (et vous vous en apercevrez en examinant notre classement) : nous étions à rebours de bien des goûts. Fatal, notre échantillon étant limité et peu représentatif des 200 millions de personnes ayant regardé cette finale 2018. Nous étions six, toujours les mêmes, cette fois réunis à Laeken, commune du nord de Bruxelles, jouxtant à la fois Jette et Vilvorde. Voici donc le compte rendu de notre soirée. Faites attention : ne sont exprimées ici que des opinions personnelles. Point de faits, ni de prescriptions !

Nous revoilà devant la VRT, histoire d’éviter toute coupure publicitaire et commentaires superflus. Peter Van de Veire s’est montré excellent, comme à son habitude. Bref ! Te Deum et nous voilà repartis pour Lisbonne, avec encore et toujours cette vidéo d’introduction vue et revue mardi et jeudi.

Ce numéro d’ouverture nous aura laissés froids comme des morues sorties de l’océan. Décidément, le fado, pas notre truc. Ennui vague et pieux du salon. Moi aussi, je m’ennuie. Tout le monde regrette 2016, Måns et Petra. Eux, nous auraient emballés avec numéro parodique et humoristique. Souvenirs émus de Måns nu derrière une peluche… On se ressert de pastéis de nata. Les meilleures de Bruxelles : elles viennent de chez Garcia, la référence en la matière. Conseil personnel : allez-y tôt !

Apparition des Beatbombers ranime l’intérêt. Annonce du défilé des nations. Plus que temps… Parade plus réussie que celle de l’an dernier. Mais un cran en-dessous de 2016, LA référence en la matière. Devient le gimmick de la soirée : à chaque apparition de Madame Monsieur à l’écran, salon balance son bras vers l’écran en chantant « Mercy, mercy,… » Très efficace et déjà culte. Mikolas Josef et Eleni Foureira les plus applaudis chez nous. Jessica Mauboy suscite plus gros fou rire, en perspective d’une prestation mythique. Premier sarcasme de Peter, à l’apparition de Cláudia : « Elle chante à propos d’un jardin. » Ce qui ne rend pas hommage au morceau, mais est d’un humour ravageur, surtout en néerlandais dans le texte.

Entrée en scène des présentatrices. Salon de nouveau unanime : Filomena vole la vedette aux autres.

Ukraine

Caméra flotte sur le cercueil de Mélovin. Salon rit un peu. Ne comprend pas le personnage. S’interroge sur la lentille. Mais attend avec impatience le cercueil-piano-escalier. Seule chose que nous attendons, à vrai dire. Tout le monde d’accord : chanson banale. Arrivée au refrain, a consommé tous ses effets. D’où la nécessité du feu d’escalier, pour meubler et distraire. Salon s’interroge : et s’il ne s’allumait pas ? Imagine que Mélovin, en excellent professionnel, poursuivrait comme si de rien n’était. Mon sentiment final : beaucoup d’esbrouffe, peu de contenu musical. Mais très bien pour ouvrir le spectacle.

Espagne

Baiser de la mort pour Espagne. Deuxième place tuera les maigres chances de nos tourtereaux. Incrédulité du salon : mise en scène sans relief, vêtements de vieux et prestation vocale d’Alfred ratée. Comprends instanténement qu’Espagne partie pour le fond du classement. Immense gâchis. Doigt pointé vers la délégation espagnole. Avait un excellent concept, bonne opportunité, comme Allemagne. Mais ruinés toutes leurs chances. On dirait deux quadragénaires participant à l’Eurovision 78. Salon finit par en rire, tellement c’est kitsch et amateur. Moi, très grosse envie de mettre des claques aux responsables de la TVE. N’apprendront-ils jamais de leurs erreurs ? Et même pas de bisou final ! Remboursez !

Slovénie

Changement bienvenu. Lea, au sommet. Remet de l’ambiance dans le salon. Chacun s’essaie à prononcer « hvala ». Peu y parvienne. Salon unanime : meilleur encore qu’en demi-finale. D’accord : encore mieux poli, fini, léché. Meilleure proposition de la Slovénie depuis Maraaya. Devrait persister dans cette voie pop avant-gardiste. Très réussi. Interruption de la musique, aussi. Mieux amené, plus prenant qu’en demi. Salon appréciateur. Moi, espère que Lea sera récompensée.

Lituanie

Re-changement d’ambiance. Émotion étreint à la gorge les plus sentimentaux. Ieva bouleversante. Message passe très bien. Mise en scène toujours aussi réussie. Petites larmes aux yeux. Trois minutes de grâce. Doutais de sa présence en finale, mais rétrospectivement, était nécessaire. L’une des propositions lituaniennes les plus mémorables et l’une de mes préférées. Me réjouis déjà du prochain Eurovizijos atranka. Salon emporté par poésie. Attend avec impatience arrivée du mari. Cris de ravissement et d’émotion. Ieva a touché nos coeurs. Envie d’aimer le monde entier, à commencer par la Lituanie.

Autriche

Cesár encore plus impressionnant qu’en demi-finale. Salon le reconnaît : soufflant. Une des mes chansons préférées, un de mes concurrents favoris. Bref, suis aux anges. Me balance sur ma chaise. Salon finit par être emporté. Angles de caméra et visuel supérieurs à demi-finale, aussi. Cesár communique mieux, plus intense, plus dynamique. Prestation parfaite à mes yeux. Salon toujours pas convaincu par son costume de scène. Me demande à quel point cela influencera les téléspectateurs. Fasciné : Autriche devenue un des piliers du Concours.

Estonie

Encore une qui met tout le monde d’accord. Salon silencieux, guette chaque note d’Elina. Encore une fois, meilleure qu’en demi-finale. Atteint la perfection. Fascine, captive. Plus aucune plaisanterie tendancieuse sur la robe. Salon apprécie la voix de cristal et le rendu vocal irréel. Tout le monde pas convaincu par opportunité du morceau. Mais estime qu’Elina renversante. Visuel comparé à Reine des Neiges. Salon peine à croire que projection soit aussi chère. Retour du silence pour les notes finales. Curieux de voir ce que les téléspectateurs en ont pensé…

Norvège

D’une ambiance à l’autre… Après la solennité de La Forza, voici la décontraction de THYWAS. Moi, trouve Alexander encore affaibli. Pas là à 100%. Salon ne voit rien de particulier. Est emporté par efficacité de la chanson, charisme d’Alexander et bonne humeur irrésistible de l’ensemble. Moi, fais de la résistante : toute petite chansonnette, répétitive et cousue de fil blanc. Fini malgré tout par me trémousser sur ma chaise, à l’unisson des autres. Vois mal la Norvège l’emporter. Mais salon ravi. Première preuve majeure de mon aveuglement : ma mémoire me rappelle que je préférais d’autres morceaux au MGP et que la victoire d’Alexander m’a déçu. M’empêche donc de voir les aspects positifs de sa prestation. Bon pour une psychothérapie eurovisionesque…

Portugal

Rapide explication du message de la chanson, avant que salon ne plonge dans les tréfonds de l’ennui. Comprend en deux secondes que morceau dans la perspective d’Amor pelos dois. Cris d’exaspération. Explique que tous morceaux de la sélection portugaise se ressemblaient et que celui-ci était encore le plus moderne. Incompréhension totale. Salon demande si morceau finit par décoller. Non. Maudit le Portugal. Soulagement intense quand morceau terminé.

Petit intermède depuis la green room. Elina stupéfie à nouveau de par la facilité déconcertante avec laquelle elle produit des notes parfaites. Jaloux quand même…

Royaume-Uni

Salon reçoit bien SuRie. Ne la reconnaît pas de 2015, bien entendu. Mais la trouve engageante. Morceau dynamique, plutôt avis favorable. Moi, persiste : excellente chanteuse, mais chanson pas à son niveau. Et puis soudain, le drame. Sursaute violemment sur ma chaise. Un inconnu a bondi sur scène et volé son micro à SuRie. Salon tétanisé, ne comprend pas ce qui se passe. Moi, sous le choc. Outré, indigné, consterné pour pauvre SuRie. Des mois, des années qu’elle attend cela et tout est fracassé par un crétin. Que fait la sécurité ? Production poursuit vaille que vaille en filmant le public. SuRie, magistrale, reprend son micro et son morceau. Soudain animée d’une rage épique. Atteint son moment de gloire. Salon soufflé par son courage. S’envole dans les cotations et obtient une bien meilleure note qu’initialement prévu. Moi, convaincu qu’elle va re-chanter. Serais très surpris qu’elle refuse proposition de la production. Salon comprend. Me dis que la délégation britannique va jouer la compassion. Pas idiot. N’empêche que prestation demeura incomplète pour éternité… Très en colère contre individu. Pense à présent que SuRie doit revenir l’an prochain, avec meilleur morceau. Du style Nobody But You. À condition, bien entendu, que les « experts » mandatés par la BBC soit capable de distinguer un bon morceau d’un autre… Pas certain…

Salon tente de reprendre ses esprits. Production aussi. Retour dans la green room. Filomena meuble avec brio.

Serbie

Salon dans l’incompréhension la plus totale : comment cette chanson a-t-elle pu se qualifier ? Ne fonctionne en rien. Professeur Moustache attire toute l’attention et fait rire. Le reste est accueilli dans l’indifférence la plus totale. M’ennuie profondément. N’en retiendrais effectivement que Professeur Moustache. Vois la double peine se profiler à l’horizon : la télévision serbe va reconduire la formule l’an prochain. Promet déjà…

Allemagne

Salon attentif. S’interroge sur projections. Explique qu’il a ramené son écran lui-même. Salon à nouveau attentif. Moi, surpris. Positivement surpris : visuel très prenant. Michael très ému. Message passe à merveille. Salon s’interroge à nouveau : photos de lui et de son père ? Peut-être dans le tas, mais pas toutes. Salon ému. Belle chanson. Pas soufflant, mais beau et bien interprété. Visuel de mieux en mieux. Sublime à merveille prestation de Michael. Vraiment surpris par résultat final. Impeccable. Devrait faire mouche et éviter à l’Allemagne une fin de classement. La délégation allemande semble revenir à ses esprits.

Albanie

Salon se souvient à nouveau de Noël à Tirana. Que de chemin parcouru, que de semaines écoulées… Mais toujours pas convaincu par Mall. Réactions molles, tièdes. Oui, Eugent chante bien. Non, chanson n’emballe personne. Conversations dérivent. Plus personne n’écoute. Moi, m’accroche.  Repense à Manjola Nallbani. M’aurais fait plus rire… Eugent conclut dans l’indifférence générale.

France

Ah ! Ah ! Salon très attentif ! Peter fait de l’humour en les rebaptisant « Madame et Croque-Monsieur ». Moi, trouve début très bon. Salon trouve que France Télévisions devrait se faire rembourser par Jean-Paul Gaultier, car résultat vestimentaire pas convaincant. Reconnaît que Mercy, bonne chanson, bien marquante. Certains font de la résistance, finissent par baisser la garde. Salon se prépare et fait geste de la main en criant en choeur « Mercy, mercy,… » Moi, pris d’un doute. Ai longtemps pensé qu’ils l’emporteraient facilement. Ne sais plus quoi en penser, ni à quel saint me vouer. Très beau final d’une très belle prestation. Manque un indéfinissable je-ne-sais-quoi. Salon pense pas que France l’emportera. Pronostique une bonne place. Moi, dans le brouillard le plus total.

République Tchèque

Brouillard se dissipe aussitôt. Salon et moi reconquis dès la première note. Mikolas est impérial. LTM est la chanson la plus marquante de celles entendues. Tout le monde d’accord : meilleure jusqu’ici. Premier vainqueur concédé par salon. Plusieurs prêts à voter pour République Tchèque. Moi, convaincu que Mikolas s’envolera jusqu’au podium. Excellente prestation. Salon apprécie beaucoup hommage aux années 90. Impression d’être de retour devant MTV. Bon vieux temps… Mikolas nous refait ses pirouettes. Surprise et prestation se concluant par applaudissements nourris du salon, les premiers de la soirée. Moi, veux voter pour Mikolas. Demeurera l’un de mes meilleurs souvenirs d’Eurovision.

Danemark

Retour des Vikings. Salon pas convaincu. Trouve Rasmussen meilleur qu’en demi-finale. Mais manque d’une dureté, d’une âpre virilité demandée par le morceau. Assez posé et gentillet. Moi, trouve que tout ça, très Melodifestivalen du temps jadis. Cliché. Chorégraphie pas impressionnante pour un sou. Salon de moins en moins intéressé. Arrive la neige. Dirait du sucre en poudre. Tout petit blizzard. Idée idiote qui déforce le tableau. Rasmussen chante avec cheveux dans le visage. Salon pressé d’en finir. Moi, aussi.

Australie

Mythique, mais pour toutes les mauvaises raisons… Jessica entre de plain-pied dans notre panthéon amical pour cette prestation complètement ratée. Robe affreuse qui la boudine, coiffure maladroite, néons trop chers payés, chorégraphie de débutante, fausses notes à répétition et mise en scène à côté de la plaque… Mythique, mythique. Salon plié en deux de rire. Moi, catastrophé : résultat final désastreux à l’écran. Pas professionel du tout ! Envie de clouer Sacha Jean-Baptiste au pilori. Salon se gausse que délégation australienne ait payé scénographe pour pareil résultat. Impression persistante que Jessica n’a pas compris où elle mettait les pieds. Concours télévisé, chérie, pas concert à Sidney. Peut-être que salon a raison : autant en rire…

Finlande

Salon en très bonne disposition envers Saara. A beaucoup aimé son numéro en demi-finale. Moi, ravi : meilleure vocalement que jamais. Visuellement chargé, ne manque plus que lanceurs de couteaux. Mais au moins, pas l’occasion de s’ennuyer. Salon aime Monsters. Trois bonnes minutes eurovisionesques à prendre au second degré. Finlande devrait l’envoyer chaque année. Finit dans les bras de ses danseurs. Suis le seul à applaudir, ne boude pas mon plaisir. Saara m’aurait fait rire et rêver. Ne peut en dire autant de bien des concurrents…

Bulgarie

Salon décidé : très bonne chanson, mais mal incarnée. Trop de monde sur scène. Moi, d’accord : aurait été encore meilleur si porté par un seul interprète. Très bon moment d’Eurovision. Nostalgie de l’an dernier. Salon unanime : Kristian aurait dû gagner. Excellent jeu des caméras. Zhana concentre les critiques sur elle. Personne ne comprend le besoin de cet accoutrement, de cette perruque, de ce maquillage violent. La rend plus vulgaire qu’elle n’est dans la réalité. Belle idée pour Halloween. Conversation dérive : ne serait-ce pas plus drôle de se déguiser en Jessica Mauboy ? Tout le monde d’accord. Bulgarie parmi les meilleurs, mais ne réitérera pas l’exploit de 2017.

Moldavie

Sympathie, drôlerie, bonne humeur qui conquièrent le salon. Préférée de l’un d’entre nous. Tout le monde se balance en rythme sur son canapé. Contagieux et irrésistible. Salon plongé dans atmosphère festive. Eurovision comme on l’aime. D’accord : pas chanson du siècle. Mais mise en scène faisant mouche à chaque reprise. Salon apprécie ce dérivatif pour ce qu’il est : trois minutes de sourires sans arrière-pensées. Ne pense pas que la Moldavie finira sur le podium, plutôt parmi les dix premiers. Déjà exploit en soi.

Suède

Certains très impatients et très émoustillés à la perspective de Benjamin et de son pantalon satiné. Prestation à la hauteur des attentes. Salon adore, se balance en cadence, s’émerveille des jeux de lumière et de caméras. Mise en scène au cordeau, Suède décidément imbattable sur ce plan. Salon trouve qu’aussi bien que l’an dernier. Morceau plaît à tous et se hisse en haut des classements personnels. Moi, suis aux anges. Décidément l’une de mes chansons préférées de cette édition 2018. L’écouterais encore longtemps et en garderais un excellent souvenir. Persuadé que Benjamin sera parmi les cinq premiers. Trois minutes se concluant par applaudissements généraux, pour la deuxième fois de la soirée.

Hongrie

Ah non ! Non ! Me bouche les oreilles. Salon pas d’accord : oui, rock dur, mais très bon dans son genre. Ne peux pas, ne peux pas. Attends avec impatience fin des trois minutes pour en être définitivement débarrassé. Vivement l’an prochain. Salon persiste : excellente chanson. Plus réservé sur prestation vocale d’Örs, trop forcée selon eux. Sanctionne lourdement Hongrie dans ma notation. Suis tout de même suivi par deux autres personnes, pas convaincues par un sou. Sommes finalement divisé en deux camps. Pas surpris : proposition clivante par nature. Seigneur ! Long, trois minutes que l’on n’aime pas… Et dire que devrais me farcir l’intégrale AWS quand serais en Enfer… Donne envie de se comporter comme un saint d’ici-là…

Israël

Ne sais vraiment plus quoi en penser. Était censée être la favorite, puis le vent a tourné. Pourrait-elle inverser la tendance et l’emporter ? Dubitatif. Très dubitatif. Morceau me laissant indifférent. Chanteuse sympathique. Prestation pas si enthousiasmante. Ne vois pas le rapport entre le thème japonais et le message féministe. Salon me suit : bon morceau, bonne interprétation, mise en scène un peu floue, pas l’étoffe d’un vainqueur. L’un d’entre nous abomine complètement ces trois minutes. Trouve cela insupportable au dernier degré. Moi, reste dans le flou. Pas si mémorable, tout de même. Peter Van de Veire pointe un élément intéressant : depuis le matin, délégation israélienne envahit les réseaux sociaux de publicité et d’appels au vote. Moi, ne crois plus trop en la victoire. Plus convaincu que jamais que ce sera Chypre. Salon aussi.

Pays-Bas

Salon se re-balance de concert. Apprécie beaucoup morceau et plus encore Waylon, sa voix, son interprétation. Excellent moment d’Eurovision pour tout le monde. Manteau léopard finit par être accepté, fait partie du personnage, fantasque et bling. Hélas, salon refroidi par chorégraphie idiote des danseurs. Jugée non seulement inutile, mais nuisible au bel ensemble. Waylon se suffit à lui-même. Fait l’amour à la caméra. Salon unanime : prestation vocale de très haut niveau. Chanteur majeur.

Irlande

Changement de ton, pour ballade romantique. Belle chanson, belle interprétation, beau message. Salon silencieux, pris par poésie de l’instant. Moi, tout de même bien surpris. N’en reviens pas qu’Irlande soit en finale, que numéro soit si bon et que finis moi-même par aimer. Hurlements du public quand arrivée des danseurs. Peter souligne que les commentateurs russes les font passer pour les meilleurs amis du monde, une belle histoire d’amitié. Rires. Neige. Salon s’interroge : pourquoi la neige irlandaise est-elle si réussie, alors que la neige danoise semble si minable à l’écran ? Mystère de l’Eurovision. Là-dessus, Ryan est envahi par l’émotion et perd un brin le fil de sa prestation. Très choupinou, mais vocalement moyen.

Chypre

Salon en feu ! Enfin, sa favorite. Moi, n’aurais pas parié un kopeck sur elle, il y a deux semaines. Suis à présent déterminé à voter pour elle. Pour elle, pour Eleni, ce personnage, cette diva incandescente. Toujours moyennement convaincu par Fuego. Pas chanson de l’année. Mais Eleni, Eleni ! Fascinante. Salon au Paradis, chante, danse. Peter enchaîne les sarcasmes. En partie raison : trois minutes à prendre au second degré. Eleni impeccable. Numéro très bien rodé. Salon décidé à se laisser pousser les cheveux jusqu’Halloween pour y aller en Eleni. Eleni entre en transes, salon aussi. Se termine dans les flammes et dans les applaudissements les plus nourris et les plus vifs de la soirée. Tenons notre favorite. Me surprends moi-même, mais convaincu qu’elle va l’emporter.

Italie

Fatalement, après tant d’enthousiasme, atmosphère retombe dans salon. Difficile de se concentrer à nouveau sur l’écran. Belle chanson, belle interprétation. Sous-titre distrayent des interprètes, mais fournissent des explications bienvenues. Salon aime beaucoup et se tait soudain. Ermal et Fabrizio ont réussi à attirer l’attention générale. Très convaincants. Belle surprise de la soirée. Italie grimpe dans nos classements. Salon positivement impressionné. N’attendait plus rien, cadeau musical. Moi, sous le charme. Décidément, Italie trop forte depuis son retour de 2011. Pensée émue pour Francesco. L’ai tellement aimé… Intelligent d’avoir fait se conclure cette édition par cette chanson porteuse d’espoir…

Oh mon Dieu, non ! C’est déjà fini ! Au bord des larmes… Passe trop vite, trop vite… Salon compatissant et encourageant : encore le vote. Apparition d’Eleni entre les jambes des présentatrices. Puis de Sacha Jean-Baptiste. Explique de qui il s’agit. Salon rit : assise avec Eleni et pas avec Jessica Mauboy. Comprend pourquoi…

Moment crucial des comptes sur nos tableaux de vote. Sans surprise, Chypre s’impose. Mes cinq préférés dans l’ordre : Chypre, Autriche, République Tchèque, Suède et Lituanie. Lanterne rouge : Hongrie. Et nous voilà partis pour deux heures d’incertitude… Tout le monde s’acharne en silence sur son téléphone portable, tandis que passent les récapitulatifs. Chacun vote et obtient donc le droit futur de se plaindre du résultat.

Salon en convient : à nouveau, excellente année, excellent cru musical. De très bonnes chansons, de très bons interprètes, de très bonnes mises en scène. Eurovision conserve sa couronne de meilleur spectacle musical et télévisuel du monde. Avons passé merveilleuse semaine ensemble. Rituel devenu l’un des piliers fondamentaux de notre amitié.

Retour surprise de Sara Tavares. Content de la revoir, mais entracte assez ennuyeux. Salon fatigué de ces musiques portugaises. Petit intervalle comique… qui tombe à l’eau, car salon ignorant qui est Suzy. Puis, bons souvenirs de l’Eurovision Junior. Polina a sacrément grandi. Incroyablement belle. Convaincu qu’elle représentera la Russie un jour au Senior. Étoffe d’une diva eurovisionesque.

RTP en remet une couche, avec le retour de Salvador. Conspué par le salon. Très peu populaire parmi nous. Salon content pour lui, qu’il se soit remis de ses ennuis de santé. Mais chanson, personnage et victoire toujours en travers de la gorge. Petit ennui flottant dans l’air. Regrets éternels de Petra, Måns, Love Love Peace Peace et Justin Timberlake. Râles d’agonie quand arrive la reprise d’Amor pelos dois. Évidemment, personne ne sait qui est Caetano Veloso. Moi, non plus, il y a un mois de cela… Salon impatient de voir Salvador remettre le trophée à Eleni. Savoureuse vengeance en perspective…

Soudain, décharge électrique dans le corps ! Apparition de Jon Ola Sand. C’est l’heure du vote, à commencer par celui des jurys ! Tendu comme un arc.

Toujours aussi incroyable, renversant, bouleversant. Ne sais plus qui je suis, où je suis, ce qui se passe. Les votes partent dans tous les sens. Difficile à suivre. Podium change perpétuellement.  Suis parcouru par des tempêtes et des ouragans. République Tchèque oubliée. Espagne et Royaume-Uni, toujours aucun point. France patine. Suspense intenable. Très surpris : Allemagne s’envole, Finlande coule. De plus en plus déconcerté : Autriche et Suède semblent avoir conquis les jurés. Ne m’attendais pas à cela. Pas plus à ce qu’ils portent l’Australie aussi haut et qu’ils assassinent ainsi l’Ukraine. Au tour de Chypre de patiner et de perdre du terrain. Suis dans le dernier état de confusion. Jury belge néerlandophone adore Autriche, Pays-Bas et Suède. Impossible interruption des votes pour un entracte. Nerfs à vif ! Reprise du décompte. Peter tout aussi perdu. Repète que les surprises s’enchaînent. Portugal en queue de peloton. Allemagne ne cesse de grimper. Mon opinion change : fini pour Chypre, Autriche va l’emporter. Ne parviens pas à y croire. Une de mes chansons préférées ! Palme du vote le plus à côté de la plaque au jury monténégrin. Benjamin et Cesár semblent dépassés par les événéments. Netta toujours en embuscade. Suisse ignore France au profit de l’Allemagne. N’en reviens pas de cette place allemande. Tant mieux pour Michael, au fond. Jury slovène qui est censé ne jamais se tromper accorde ses douze points à la Suède. Ne peux y croire. Une septième victoire suédoise ? Ai les neurones en compote. Salon continue de croire en Eleni. Pas impossible, mais désormais difficile. Peter abasourdi.

Passage dans la green room. Cesár semble sous le choc et à bout de mots. Retour de Jon Ola Sand. Temps du télévote. Au bout de ma vie, comme chaque année.

Terrible. TERRIBLE. Système vraiment du dernier des cruels pour les spectateurs et les participants. Limite odieux et humiliant. Énorme claque pour Jessica. Peter traumatisé. Salon rit. Jeu de massacre se poursuit : Portugal et Espagne crucifiés. Moment le plus terrible de la soirée : Suède à peine 21 points. Salon pousse un cri. Moi, tombe en morceaux sur ma chaise. Comment est-ce possible ? Peter tourneboulé. Moi, ne comprends plus rien, Eurofan dans la brume. Terriblement déçu pour Finlande. Fin de partie pour les Pays-Bas et pour la France. Salon interdit. Croyais tout de même que public serait sensible. Ben non ! Pinçement au coeur pour les fans et la délégation. Y ont tellement cru. Mais quelle année ! Mais quel vote ! Repense à Terry Wogan. Disait toujours : « the mad voting« . Terriblement vrai. Nous prenons la main. Cri terrible : Autriche mise de côté. Quelqu’un a alors une intuition : ce sera Israël ! Salon hésitant : se jouera entre Chypre et Israël. Suis dans un état second. Mon cerveau n’enregistre plus rien. Eleni au bord de l’évanouissement. Moi aussi. Scores grimpent en importance. Le premier du public l’emportera. Italie, troisième du télévote. Chypre et Israël face à face. Tension à mourir. Et Israël l’emporte !

Salon plongé dans la stupeur. Moi, ne parviens pas à accepter la réalité. Elle était la favorite, elle ne l’était plus, elle l’emporte malgré tout. Que de renversements de situation… Et le Portugal qui termine dernier… Quelle abominable humiliation pour le pays-hôte… Salon concède : bonne chanson, bonne chanteuse. De là à gagner… Peter souligne la beauté statistique des victoires israéliennes à l’Eurovision. Salvador remet le trophée à Netta… et disparaît aussitôt. Fait rire le salon, qui reprend doucement ses esprits. Moi, toujours dans les limbes. Netta très touchante, beau discours.

Reprise bancale, l’émotion et la joie l’emportant. Ne parviens toujours pas à me reprendre. Il me faudra plusieurs jours pour rentrer en moi-même et digérer ces montagnes russes d’émotions. Salon se sépare à regret. Voudrait prolonger ces instants pour l’éternité. Au Paradis, Eurovision perpétuel, en suis convaincu. Lendemain, article dans la presse : « regarder l’Eurovision rend plus heureux ». Tout à fait d’accord : émission, rare moment de joie, de bonheur et de fraternité purs et intenses. Précieux en ce siècle. Particularité que les détracteurs du Concours ne comprendront jamais. Larmes. Vivement l’an prochain ! Vivement que tout recommence ! Et faites que cela dure pour les siècles et les siècles ! Amen.

Conclusion

Ce fut pour nous, une édition intense et réussie. Du moins, au niveau du plaisir ressenti. Car, pour la troisième année consécutive, nous avons été largement à côté de la plaque en ce qui concerne le vainqueur. Voyez plutôt notre classement final :

1 – Chypre – 17,42
2 – République Tchèque – 16,33
3 – Suède – 15,5
4 – Autriche / Norvège – 15,33
6 – Italie / Lituanie – 14,83
8 – France – 14,75
9 – Estonie / Royaume-Uni – 14,67
11 – Moldavie – 14,58
12 – Pays-Bas – 14,5
13 – Finlande – 14,17
14 – Irlande – 14,08
15 – Bulgarie – 13,97
16 – Slovénie / Allemagne – 13,92
18 – Ukraine – 12,5
19 – Albanie – 12,17
20 – Danemark – 11,67
21 – Israël – 10,58
22 – Hongrie – 10,5
23 – Espagne – 10,17
24 – Portugal – 9,92
25 – Australie – 8,92
26 – Serbie – 7,17

Encore une fois, nous n’avons suivi ni les jurés, ni les spectateurs. Vous le constatez : nous n’avons vraiment pas été séduits par Netta. Quant à Eleni, elle demeurera à jamais notre gagnante personnelle. Du coup, nous nous interrogeons : qu’adviendra-t-il à l’avenir ? Continuerons-nous à nous tromper jusqu’à la fin des temps ? Finirons-nous par rejoindre les goûts du public ? Notez qu’en huit ans, nous n’avons eu le nez creux qu’à deux reprises : en 2012, avec Loreen et en 2014, avec Conchita. Mais depuis 2016, curieusement depuis l’introduction du nouveau système de vote (y aurait-il un étrange rapport ou n’est-ce qu’une coïncidence ?), nous nous plantons dans les grandes largeurs. Soyez rassurés, cela n’affecte en rien notre passion pour le Concours. Néanmoins, nous espérons que l’an prochain, nous viserons juste. Cela nous changerait…

Ma conclusion personnelle est que cette victoire de Netta reste dans la lignée de celle de Salvador. Oui, malgré les apparences. Je pense que son morceau a convaincu, mais que c’est surtout elle, son personnage, son histoire qui auront marqué, touché et enthousiasmé les spectateurs. Tout comme Salvador les avaient touché l’an dernier. Finalement, l’Eurovision se résume à la manière de l’élection présidentielle française : c’est la rencontre entre un artiste et un peuple, le peuple européen.

Notez également l’intérêt de cette victoire israélienne. Certains ont craint que la situation politique et la réputation fluctuante du pays pourraient entraver ses chances. Il n’en a rien été. Preuve à nouveau que l’Eurovision transcende les clivages et les clichés. Je me demande d’ailleurs si les téléspectateurs réflechissent aussi loin au moment de voter… À mon avis, ils voient l’Eurovision pour ce qu’il est : un concours de chanson. Ni plus, ni moins.

Quant à l’organisation de l’an prochain, je me fais peu de soucis. Le gouvernement israélien ne ratera pas l’opportunité d’une telle publicité positive et, j’en suis convaincu, fera tout pour que l’édition 2019 soit une réussite. L’enjeu symbolique est trop important que pour se permettre le moindre faux pas. Ce qui m’inquiète plus est les manipulations du Concours à prévoir. Les appels au boycott ont déjà commencé et les extrémistes de tout poil se déchaînent dans les médias (y compris israéliens). Bref, comme dirait Margo Channing : « fasten your seatbells, it’s going to be a bumpy night« .

Sur ce, je vous embrasse et vous remercie mille fois pour votre fidélité, vos commentaires et votre amitié si précieuse ! Vous avez rendu mon Eurovision plus beau ! À très bientôt !