Le week-end pointe son nez. Nous sommes samedi, jour de repos tant attendu pour beaucoup d’entre nous. Mais il ne s’agit pas que d’un simple jour de repos. C’est aussi l’heure d’ouvrir son abécédaire et de reprendre des notes. Le savoir eurovisionnesque n’attend pas ! Récitons ensemble l’abécédaire de l’Eurovision !

H comme…

  • Hard Rock Hallelujah !

Certains associent l’Eurovision à un moment paradisiaque. Moi, je vous propose l’enfer en guise d’entrée pour cette page de l’abécédaire ! L’Eurovision a vu la participation d’un grand nombre de candidats aux origines très diverses, aux styles variés, des plus classiques aux plus déjantés, et défendant chacun des valeurs bien différentes les uns des autres. Seuls soixante-sept d’entre eux ont gagné le Concours. Et parmi ces soixante-sept gagnants, il y en a un qui détonne clairement. Je veux bien sûr parler de Lordi !

Lordi est un groupe de heavy metal finlandais créé en 1992 par le chanteur du groupe, Mr. Lordi. Ce dernier, de son vrai nom Tomi Petteri Puttaansuu, baigne dans le heavy metal depuis son enfance et voue un véritable culte au cinéma, tout particulièrement au genre horrifique. Inspiré et captivé par Alice Cooper, Twisted Sisters ou encore Kiss, Tomi se rend compte de l’importance que revêt l’aspect visuel. Alors qu’il n’a que dix-huit ans, il réalise sa première démo intitulée Napalm Market. L’identité de Lordi se construit petit à petit et prend toute son existence lorsque Tomi rencontre les autres membres du groupe en Suède. Un groupe qu’on ne peut ignorer puisque Mr. Lordi, en plus d’être un excellent chanteur, est un excellent créateur de costumes. Des costumes… de monstres ! On en vient même à considérer qu’ils possèdent un genre musical unique, qualifié de « monster hard rock ». Finalement – et presque inévitablement, j’ai envie de dire – le groupe connait un important succès avec Would You Love a Monsterman ? en 2002.

Lordi

En 2006, Lordi est retenu avec son titre Hard Rock Hallelujah dans la liste des candidats de l’Euroviisut 2006 par la télévision finlandaise YLE. La suite, vous la devinez. Lordi remporte la sélection nationale avec un total de 67 369 votes, soit 21 938 votes de plus que son dauphin appelé lui aussi Tomi. Le ticket pour l’édition d’Athènes étant obtenu, leur participation commence à faire réagir. Une polémique éclate en Finlande où des groupes conservateurs s’opposent vivement à leur participation. Présentés comme des Satans ou accusés de vouloir répandre le satanisme, la polémique grandit même jusqu’en Grèce. Les membres du groupes, eux, démentiront ces accusations.

Cela n’empêchera pas Lordi de participer à l’Eurovision 2006. Et quelle participation ! Hard Rock Hallelujah est, comme l’annonce le titre, un bon morceau hard rock qui, combiné au look monstrueux du groupe, dépoussière clairement le Concours. Les nombreux effets spéciaux, le rythme élevé du titre et les nombreux changements de caméra qu’il implique font de cette prestation un moment unique et une grande première de l’Eurovision. Il s’agit de la première prestation entièrement gérée par un ordinateur ! Evidemment, les réactions ne se font pas attendre, tout particulièrement en France où les commentateurs Michel Drucker et Claudy Siar manifestent clairement leur dégoût à l’égard du groupe, exprimant entre autres qu' »ils seront au zoo de Vincennes à la rentrée ». Alors persuadés que la Finlande ne gagnera pas, ces deux présentateurs se rendront vite compte à quel point ils ont tort. Lordi amasse les points lors de la séquence de vote et bat le record avec 292 points ! Une belle vengeance pour le groupe qui apporte à la Finlande sa toute première victoire après 44 ans d’attente et pulvérise le précédent record du pays. Une sixième place, obtenue en 1973. Quant à Drucker et Siar, ceux-ci devront présenter leurs excuses publiquement par rapport aux mots durs qu’ils ont tenus.

  • Huit !

Huit quoi ? Huit bananes ? Non, je parle du nombre de fois qu’un pays a accueilli l’Eurovision. Rappelez-vous, lors de l’abécédaire #D, je parlais de Dublin qui est à ce jour la ville ayant le plus accueilli le concours. Est-ce donc l’Irlande qui trône en tête de ce classement ? Vous l’avez deviné, il s’avère que non. Le pays en question collectionne les mauvais résultats lors des dernières éditions et fait partie du Big 5. Un véritable ancien monstre du Concours, totalisant cinq victoires, mais qui semble désormais complètement désintéressé par l’Eurovision. Quel changement étonnant, quel revers entre deux époques. Avez-vous deviné ? Oui, je parle bien du Royaume-Uni.

Le Royaume-Uni a donc accueilli huit fois l’Eurovision pour des raisons très diverses et ceci dans cinq villes différentes. Londres trône en tête des villes britanniques avec un total de quatre éditions. La toute première eut lieu en 1960 au Royal Festival Hall suite à la victoire double du Pays-Bas en trois ans. Ces derniers ayant déjà organisé l’édition 1958, ceux-ci refusèrent de payer de nouveau les frais d’organisation. La BBC, alors arrivée deuxième en 1959, accepta d’organiser l’édition de 1960. Rebelote en 1963 au sein du BBC Television Centre suite au désistement de la France ayant gagné trois fois en cinq ans dont 1962. Les deux dernières éditions londoniennes eurent lieu au Royal Albert Hall en 1968 et au Wembley Conference Centre en 1977. Pour quelle raison ? Rien de spécial cette fois, il s’agit seulement du droit du Royaume-Uni d’accueillir le Concours suite à ses victoires en 1967 et 1976.

Royal Festival Hall
Royal Albert Hall

Or, deux autres éditions se déroulèrent entre ces deux ultimes éditions londoniennes. Et hallelujah ! L’une d’elle n’est pas anglaise mais écossaise. Il s’agira, à mon grand regret, de la seule. Édimbourg et son Usher Hall furent le théâtre de l’édition de 1972. Ceci résulte d’un conflit entre Monaco et la France. Monaco remporta l’Eurovision en 1971 et déclara accueillir avec joie l’édition de 1972. Le problème ? L’argent et le manque de matériel adapté. Monaco demanda alors de l’aide à la télévision française. La première désirant que cela se passe sur le sol monégasque, l’autre au sein de l’Hexagone, aucun compromis ne put être trouvé. L’UER proposa alors à l’Espagne et à l’Allemagne, deuxième et troisième à Dublin en 1971. Ceux-ci refusèrent et l’affaire retomba dans les mains de la BBC, érigée en tant que grande secouriste du Concours. Quant à celle de 1974, eh bien, rebelote pour des raisons identiques à 1960 et 1963. Le Luxembourg remporta la victoire deux fois d’affilée en 1972 et 1973, refusant donc pour des raisons financières d’organiser le Concours deux fois de suite. C’était donc au The Dome de Brighton qu’était convié l’Europe entière.

Usher Hall

Les deux dernières éditions britanniques en date ont eu lieu cette fois pour des raisons classiques: la victoire du pays l’année précédente. Je vous emmène donc à Harrogate en 1982, petite ville située dans le comté du Yorkshire du Nord en Angleterre comptant aujourd’hui 75 000 habitants. Elle était alors la plus petite ville hôte ayant jamais accueilli l’Eurovision. La scène du International Centre était d’ailleurs petite, voire ridicule, par rapport à celles des éditions précédentes. Une édition totalement opposée à celle de 1998, située au National Indoor Arena de Birmingham. Cette édition vit d’ailleurs l’ultime place de dauphine obtenue par le Royaume-Uni à ce jour !

National Indoor Birmingham, actuellement nommé Arena Birmingham
  • Hirsh !

A vos souhaits ? Non, non, je n’ai pas éternué ! Il s’agit du nom de famille d’une femme admirable ayant profondément marqué l’Eurovision. Nurit Hirsh est une auteure-compositrice israëlienne, née à Tel-Aviv le 13 août 1942. Elle a énormément contribué au parcours de son pays à l’Eurovision. Remontons en 1973 où Israël fit ses débuts. Les attentes étaient élevées. L’IBA (Israel Broadcoasting Authority) sélectionna en interne Ey Sham, écrite par Ehud Manor et interprétée par l’excellente chanteuse Ilanit. Ce choix se révélera judicieux puisque Israël fait sa rentrée dans la cour des grands avec une excellente quatrième place ! La compositrice de Ey Sham ? Eh bien oui, vous l’avez deviné, il s’agit de Nurit Hirsh. Cependant, ce n’est pas en tant que compositrice qu’elle s’illustre dans le panthéon eurovisionnesque. Cette année-là, pour la première fois de l’histoire du Concours, nous vimes la participation de femmes chefs d’orchestre. Nurit Hirsh n’est pas la première à vrai dire, Monica Dominique l’ayant devancé avec la Suède, passant en douzième position lors de la soirée. Cela n’enlèvera pas le symbole qu’elle représente lorsque son pays sera appelé en dix-septième position.

Nurit Hirsh

En revanche, elle sera la première et, à ce jour – et pour toujours si l’orchestre n’est pas rétabli dans le futur, l’unique cheffe d’orchestre à avoir réussi l’exploit suprême pour son pays. Nous sommes en 1978. Nurit Hirsh s’allie de nouveau avec Ehud Manor pour proposer un titre à la toute première finale nationale israëlienne, le Festival de la chanson israëlienne 1978. C’est ainsi qu’est né A-Ba-Ni-Bi, interprété par Izhar Cohen & Alphabeta. Ils finissent premier ex-æquo de ladite finale nationale et, après départage via la règle des douze points, s’envole pour la seule édition parisienne de l’Eurovision. Le succès est au rendez-vous. Le titre enjoué aux sonorités propres à Israël s’envole, récoltant six fois la note maximale dont celles de la Belgique et de la Suisse, et finit en tête du classement avec 157 points, soit 32 points devant le dauphin… belge ! Nurit Hirsh rentre alors dans l’histoire en tant que première et unique femme chef d’orchestre gagnante de l’Eurovision. Rendons-lui hommage en (ré)écoutant son titre vainqueur.

Encore une fois un grand merci pour votre fidélité ! Je lis tous vos commentaires et suis heureux que cette rubrique vous plaise toujours autant. Rendez-vous mercredi prochain pour la prochaine lettre 😉