Ce samedi 25 mars, a eu lieu le premier des concerts intermédiaires : l’Eurovision PreParty de Riga, organisée par la branche lettone de l’OGAE. Nos amis lettons ont accueilli avec égard leurs invités, leur faisant visiter leur capitale.

Des conférences de presse ont également été organisées. La première pour les candidats 2017. L’avion de Kasia Mos ayant été retardé, elle n’a pu y assister.

La seconde, pour Ruslana. Juste Ruslana. Privilège des altesses eurovisonesques…

À 20h, heure locale, au Crystal Club, Roberto Meloni lança ce petit concert : cinq participants, deux invités, un public enthousiaste et des prestations fort attendues. Les voici compilées, grâce à nos infatigables reporters de Wiwibloggs et pourvues de mes petits commentaires personnels (qui comme d’habitude, n’engagent que moi).

Ouverture

Justs monta le premier sur scène, pour interpréter Heartbeat et Message To You. Toujours ce goût poussé pour les vestes en cuir et toujours cette souffrance christique. Mais quel excellent souvenir de 2016 ! Combien j’ai aimé cette chanson ! Et combien je l’aime encore ! Son nouveau single est un peu moins percutant, mais demeure très bon. J’espère que notre ami connaîtra une carrière longue et fructueuse.

Place ensuite aux sélectionnés pour Kiev !

République Tchèque – Martina Bárta – My Turn – première demi-finale

Le positif : La présence seule de Martina à Riga est un point en sa faveur. Cela signifie que la télévision tchèque prend sa participation à l’Eurovision de plus en plus au sérieux. Tant mieux ! Et Martina est une candidate idéale à ce titre. Elle a l’expérience de la scène, cela se voit, cela s’entend. Ses trois minutes lettones le prouvent : sa voix de velours est son principal atout. Martina chante et nous voilà captivés. Sa prestation est ici impeccable. La chanteuse est dans son biotope naturel, elle irradie et emporte les cœurs. Du moins, le mien. Quant à My Turn, il s’agit d’une chanson classieuse, élégante, suffisamment intemporelle et universelle que pour toucher le plus grand nombre.

Le négatif : Aucun reproche à formuler à l’encontre de Martina, certes non. Mais My Turn est, pour moi, plutôt une chanson de concerts acoustiques (comme cette preparty, justement), de sessions unplugged, de cafés jazz, de tournées intimistes « l’artiste-un-piano-et-des-fans-transis ». Je ne suis pas convaincu que ce morceau aura un impact majeur sur la scène du Concours. Surtout cette année, surtout en première demi-finale. C’est doux, c’est gentil, mais il y a dix autres chansons plus marquantes. Injuste sur le plan « chanson », fatal sur le plan « Eurovision ».

Conclusion : La République Tchèque aime à nouveau l’Eurovision et cela fait chaud au coeur. Si seulement la Slovaquie… En attendant, la CT et Martina auront à ciseler leur prestation visuelle pour espérer se démarquer le 9 mai. Je doute que la chanteuse se qualifie, cependant. Qu’importe, elle fera honneur à son pays et au Concours. Et l’an prochain, j’aimerais vraiment une proposition tchèque audacieuse, novatrice, bousculant les codes eurovisionesques.

Biélorussie – Navi – Historiya majho zhitsiya – deuxième demi-finale

Le positif : Navi est un groupe en harmonie. Leur complicité sur scène est un régal. On les sent en communion avec le public, à qui ils transmettent beaucoup d’énergie et d’ondes positives. C’est l’Eurovision rêvée par les pères fondateurs : l’union des artistes et des téléspectateurs pour un monde meilleur. Rien à redire quant à la prestation vocale. Arciom et Ksienija ont de belles voix, de l’assurance et du coffre. HMZ, de son côté, est un morceau dynamique et joyeux, à des années-lumière de 1944. Il donne envie de taper du pied et de claquer des doigts. L’on en ressort avec des désirs de grandes fêtes folkloriques.

Le négatif : À nouveau, je ne vois rien à reprocher directement à Arciom ou Ksienija. Ils croient en leur chanson et la défendent avec conviction. Mais pour moi, HMZ ne dépasse pas le niveau de ces fêtes campagnardes, avec couronnes de fleurs, nappes à carreaux et tournoiements de serviette au dessert. C’est marrant, c’est gentil aussi, mais cela ne transcende pas son côté amateur. La deuxième demi-finale comporte des productions autrement plus professionnelles et quitte à revenir aux origines, autant choisir la proposition hongroise.

Conclusion : Arciom et Ksienija accomplissent leur rêve et leur ambition professionnelle. Tant mieux pour eux, qu’ils en profitent et qu’ils vivent intensément leur expérience eurovisionesque. Je ne pense pas qu’ils se qualifieront avec leur HMZ et je ne pense pas que l’Euromonde en sera tourneboulé. Quant à la télévision biélorusse, si elle souhaite un jour laisser sa marque sur le Concours, elle a intérêt à repenser son approche. Par exemple, en s’alliant avec des maisons de disque, comme le font désormais la France et la Belgique.

Pologne – Kasia Moś – Flashlight – première demi-finale

Le positif : Kasia est une grande chanteuse. Elle le démontre à nouveau, même sur une petite scène, même avec une petite sono. Sa voix est profonde, riche, captivante ; sa prestation, digne des plus grandes chanteuses à voix. Kasia transmet passion et émotion à son public, un point essentiel à l’Eurovision. Sa beauté renforce son impact. Flashlight lui permet d’étaler au mieux ses capacités. L’on sent que le morceau est du sur-mesure, fait pour elle et pour son organe. Son introduction est intrigante ; son déroulement, classique et bien ordonné. Avec une présentation visuelle au cordeau, Kasia décrochera sans faillir son ticket pour la finale.

Le négatif : Entre la chanteuse à voix et la diva, la frontière est mince. Kasia a des attitudes parfois maniérées sur scène, des gestes mélodramatiques et surtout, des trémolos et des roulements inutiles dans la voix. La version studio était dépourvue de ces derniers, elle donnait plus dans la limpidité. Je pense que Kasia devrait en revenir à cette clareté, cette simplicité. Cela lui siérait mieux et diminuerait l’effet « j’envoie-l’artillerie-lourde-pour-que-vous-ne-m’oubliez-pas-au-moment-de-voter ».

Conclusion : La saga triomphale de la Pologne à l’Eurovision se poursuivra cette année encore. Kasia a l’étoffe d’une star internationale et mériterait cent fois de le devenir. Flashlight marquera les esprits, certainement des jurés qui se croient souvent à The Voice et sont friands des démonstrations vocales, ainsi que des longues notes finales. Kasia repartira-t-elle avec le micro de cristal ? Sans doute pas, mais son talent et son investissement lui vaudront une belle place en finale.

Norvège – Jowst – Grab The Moment – deuxième demi-finale

Le positif : Jowst est ma surprise de l’année. J’étais passé à côté de lui, lors du dévoilement des chansons en lice pour le MGP, et le soir venu, comme tout le monde, j’ai regardé la finale du Melodifestivalen. J’ai été surpris de sa victoire et en écoutant sa prestation, je m’en suis voulu de ma surdité et de ma cécité. Jowst est un artiste de talent, avec un univers intéressant et surtout, dans l’air du temps. Grab The Moment, sa composition, est une proposition contemporaine, qui prend vie sur scène et qui fait écho au meilleur de la scène musicale actuelle. Le chanteur la porte avec foi et sa prestation vocale est tout à fait à la hauteur.

Le négatif : L’entame de GTM demeure un peu timide. Jowst débute en mode mineur, avant de laisser sa chanson se déployer. Cela explique pourquoi je ne m’y suis arrêté qu’à la deuxième écoute. Les premières strophes sont déclamées par un chanteur dans la retenue, alors qu’il faudrait un départ musical marquant. C’est le seul reproche à adresser à ce choix norvégien. Un visuel adéquat, étonnant, choc, compenserait et retiendrait sur le champ l’intérêt du téléspectateur.

Conclusion : La Norvège propose une chanson de qualité, portée par un interprète crédible. Compositeur, producteur, DJ, Jowst est également un chanteur doué. Tout est possible pour lui, la deuxième demi-finale étant assez ouverte. J’aimerais à titre personnel qu’il se qualifie, pour la crédibilité du côté « chanson ». Je crains cependant que le côté « Eurovision » l’emporte et que Jowst passe inaperçu, entre deux yodel (Raahh ! Raahh ! Vade Retro Yodelas !).

Lettonie – Triana Park – Line – première demi-finale

Le positif : Triana Park est un groupe de scènes enfumées et alcoolisées, un groupe de concerts craspec donnés dans des squats envahis par les rats et c’est tout ce dont a besoin l’Eurovision : de l’alternatif, de l’indie, du punk, du sale, du dégueu. L’énergie dégagée par ses quatre membres est prenante ; la communication avec le public, immédiate. À l’inverse de GTMLine retient l’attention dès sa première note, dès sa première strophe. La voix d’Agnese est captivante et fort bien posée. La Lettonie nous offre une proposition à mille lieux de « La paix sur Terre, c’est ma prière » et ça fait du bien.

Le négatif : Revers de la médaille néo-punk, Agnese n’est pas la reine de la justesse et Line a une structure peu élaborée. L’on sent que la chanteuse a plus l’habitude du chant comme cri de rage. Or ici, il faut amener de la nuance, de la subtilité, du contraste. Lors de sa dernière prestation au Supernova, elle avait atteint l’équilibre. Il lui faudra réitérer l’exploit en mai. Quant à la chanson, arrivée au refrain, elle fait du surplace. La strophe « where we draw the line » est répétée à l’infini. Résultat : trois minutes pauvres en texte.

Conclusion : Une bonne proposition de la Lettonie et un groupe qui, lui, saura marquer les esprits. Grand méchant look, attitude rebelle, grimaces d’Agnese, casse du matériel, Triana Park nous gratifiera d’un spectacle total. Je trouverais intéressant qu’ils suivent la même piste que Nika Kocharov, l’an dernier, avec des effets visuels un brin psychédéliques. La première demi-finale s’annonçant sanglante, la moindre faiblesse vocale et musicale sera sanctionnée. Je ne parierais donc pas sur une qualification de la Lettonie. 

Conclusion

Ce concert letton était l’amuse-bouche, le hors-d’oeuvre de cette édition 2017. Les choses sérieuses débuteront ce samedi, à Londres, où 22 artistes sont attendus, dont Martina, Kasia, Jowst, ainsi qu’Agnese et sa bande. Le principal intérêt était ici d’entendre les artistes dans un environnement modeste. Ils s’en sont tous fort bien tirés, c’est l’essentiel. Ils devraient confirmer leur qualité intrinsèque sur la scène du Concours. Nous vous laissons en compagnie de Ruslana. Elle aussi sera à Londres (dis-je en soupirant et en levant les yeux au ciel)… Une fois que vous en aurez fini avec la tigresse ukrainienne, répondez à notre petit sondage, juste en-dessous !

Sondage

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