Ce samedi 15 avril, a donc eu lieu le cinquième et dernier concert intermédiaire : l’Eurovision PreParty de Madrid. L’événement en était à sa première édition et a accueilli vingt-et-un des quarante-trois représentants de cet Eurovision 2017.

Voici la compilation des prestations, par ordre alphabétique, le tout fourni gracieusement par nos amis de EscKaz. J’y ai ajouté mes petits commentaires personnels, en me montrant plus concis pour les artistes déjà entendus à Riga, LondresTel-Aviv et Amsterdam (tous, quoi).

Albanie – Lindita Halimi– World – Première demi-finale

Cette passion de Lindita pour les bodys… Nous montrera-t-elle ses fesses à Kiev aussi ? Suspense… Dans l’attente de cette grande première eurovisionesque, Lindita survole vocalement la preparty madrilène. Sa prestation est à nouveau renversante. Une chanteuse majeure… au service d’une grosse meringue. World est décidément la tarte à la crème de ce Concours 2017 : lourd, débordant et directement dans ta tronche. Si on était à The Voice, je me retournerais. Mais ici, à l’Eurovision, je ne décrocherais pas mon téléphone de petit Belge. Motif : trop de tout, sauf de modernité.

Autriche – Nathan Trent – Running On Air – Deuxième demi-finale

Vous l’aimez et moi aussi. Sauf qu’en tant que Belge, je ne peux rien pour lui. Son sort dépend (entre autres) des Français et des Suisses. Vous savez ce qui vous reste à faire, le 11 mai vers 22h20… Dans l’attente, Nathan demeure constant dans sa bonne humeur et ses prestations vocales. C’est fort bien, dynamique, joyeux, etc., etc. Si seulement ROA était plus pointu, plus marquant, plus fort… Et le voilà maintenant en sandwich, entre Jana et Tijana. Notez que si la Macédonienne se plante vocalement, les jeux seront plus ouverts pour Nathan. Sur ce, Keep the faith comme qui dirait.

Belgique – Blanche – City Lights – Première demi-finale

C’est mieux, encore une fois, mais ce n’est toujours pas l’Everest. La prestation vocale me semble plus assurée, plus réussie qu’à Tel Aviv. Plus rien à redire sur ce plan. Côté scénique, notre Blanche nationale gagne en assurance. Elle ose décrocher son micro et s’avancer vers le public. C’est plus chaleureux. Néanmoins dans la première partie, elle demeure plantée là, comme un poteau électrique dans un champ de navets, avec en outre, les mains bien crispées sur le micro. Du coup, impossible de voir son visage. Bref, j’espère que la délégation belge a engagé un scénographe du tonnerre et un un coach physique du feu de Dieu. Sinon, notre marche triomphale se transformera en calvaire télévisuel…

Bulgarie – Kristian Kostov – Beautiful Mess – Deuxième demi-finale

En voilà au moins un qui peut dormir sur ses deux oreilles. La qualification de Kristian est désormais une évidence, l’une des rares de cette deuxième demi-finale (avec celle de la Roumanie, bien entendu). Le jeune chanteur balaie à nouveau la concurrence sur la scène madrilène. Tout a été dit à son propos et je ne vois rien à lui reprocher. Là-dessus, si la télévision bulgare avait l’amabilité de rédiger un mémo pour ses homologues allemande et espagnole…

Chypre – Hovig – Gravity – Première demi-finale

J’ai brocardé Hovig sur ses soutiens grecs et arméniens, sous-entendant qu’il se serait qualifié même en chantant le bottin téléphonique à l’envers. Je me dédis et reconnais mon erreur. Face à ses prestations vocales si réussies, je voterai pour lui, le 9 mai prochain. Notre représentant chypriote mérite sa qualification, car il chante fort bien et occupe la scène en professionnel. Gravity est une chanson facile, ce qui est toujours mieux qu’une mauvaise chanson (coucou Manel) ou qu’une chanson anonyme (coucou Levina), mais elle est efficace et devrait plaire aux lambda, même non-Grecs et non-Arméniens.

Espagne – Manel Navarro – Do It For Your Lover – Finale

Ce week-end, je me suis mis en colère. Le journal Le Soir, dans ses colonnes, a eu la bonté de qualifier l’Eurovision, de concours de « chansonnettes ». La vie est pénible lorsque le principal quotidien de votre pays méprise l’événement le plus important de votre année (j’exagère à peine). Le plus terrible est qu’il s’agit d’une ligne éditoriale voulue et assumée. Et vous vous étonnerez encore du désintérêt et du dédain marqué par l’opinion publique belge francophone à l’égard du Concours… Là-dessus, j’ai regardé Manel en ses terres natales et j’ai été ravagé : Le Soir fera ses choux gras du représentant espagnol et de sa chanson. Car DIFYL n’est rien d’autre qu’une chansonnette, pénible qui plus est. Je tiens les paris : c’est elle que le journal mettra en avant pour renforcer ses lecteurs dans leurs préjugés. Ô rage, ô désespoir, ô presse ennemie…

France – Alma – Requiem – Finale

Certains d’entre vous ont souligné que la France ne se limite pas à Paris et à la Tour Eiffel. Mais demandez un peu à une ménagère géorgienne ou un retraité letton de vous citer un monument français… Je ne change donc pas d’avis : vendez la France rêvée aux autres pays participants et ils voteront en retour pour le pays des poètes romantiques et des artistes amoureux. C’est l’année où jamais pour jouer de cette corde : Alma est une ambassadrice idéale. Elle le prouve à nouveau, par cette prestation parfaite : elle sourit, elle chante, elle rit, elle enchante. Que demande le peuple ?

Géorgie – Tamara Gachechiladze – Keep The Faith – Première demi-finale

Finalement, Lindita, Tamara, même combat. De très grandes chanteuses, capables des prouesses vocales les plus acrobatiques, au service des deux ballades pompeuses. À nouveau, si nous étions à The Voice, Tamara mériterait de se qualifier haut la main. Mais, à l’Eurovision, la chanson demeure essentielle et KTF tombe dans la catégorie « ballade-vue-et-revue ». Une occasion manquée pour Tamara et la Géorgie, selon moi. Pareille pointure vocale aurait mérité un City Lights ou au moins un Beautiful Mess pour marquer cette édition du Concours.

Irlande – Brendan Murray – Dying To Try – Deuxième demi-finale

Brendan réalise une nouvelle prestation sans reproche, il tient même les notes les plus aiguës. Son falsetto devrait retenir l’attention des spectateurs. Quant à sa chanson, elle est décidément un bel hommage aux années 2000. Des goûts et des couleurs : DTT est à peine plus moderne que KTF, mais je la trouve plus marquante, plus prenante, plus « je-ne-sais-quoi ». L’Irlande mériterait de renouer avec la finale, ne fut-ce que pour encourager la RTE à persévérer dans cette voie.

Israël – Imri Ziv – I Feel Alive – Deuxième demi-finale

Imri et IFA ressemblent, au final, à une campagne promotionnelle de l’Office du Tourisme de Tel Aviv. Chanteur et chanson atteignent leurs objectifs : c’est bien interprété, bien produit, bien fini et cela donne envie d’aller y passer ses vacances. Les téléspectateurs devraient ressentir cette fameuse Schlagerschmeichelei : cette satisfaction émue provoquée par la culture de masse manipulatrice, satisfaction renforcée par la conscience persistante d’être manipulés (quelle magnifique langue que l’allemand, n’est-il pas ?). Les jurés devraient être plus sévères dans leur jugement (quoique, eux aussi sont humains…). Israël rééditera, selon moi, ses résultats des deux années précédentes.

Lettonie – Triana Park – Line – Première demi-finale

Le 9 mai venu, l’on pourra compter sur Agnese et sa bande pour emflammer le CEI et conclure la première demi-finale en beauté. La chanteuse lettone demeure ici constante dans son art. Ses mouvements scéniques donnent de l’énergie à ses trois minutes, mais se font au détriment de la qualité vocale (traduction de cette belle phrase : quand elle gesticule, elle chante moins bien). La présentation visuelle et le tableau final devraient décider du sort de la Lettonie.

Lituanie – Fusedmarc – Rain Of Revolution – Deuxième demi-finale

Un documentaire d’Arte m’a fait réaliser l’évidence : Viktorija a tout piqué à Catherine Ringer ! Le manteau, la coiffure, les attitudes, c’est un copié-collé des Rita Mitsouko. Mais un mauvais copié-collé ! Du moins pour les prestations vocale et scénique. Je persiste à trouver des qualités au morceau, mais sur scène, il est charcuté, réduit en hachis, passé au robot-mixeur. Au final : des glapissements discordants et les cris désespérés d’un chat à qui l’on donne son bain. C’est pour moi le plus grand gâchis de cette édition 2017 (sans mentionner les trois mois de vie inutilement perdus devant l’Eurovizijos atranka).

Moldavie – SunStroke Project – Hey Mamma – Première demi-finale

Notre trio moldave poursuit son bonhomme de chemin, dans le sourire et la bonne humeur. C’est du divertissement léger, très léger. Pas d’arrière-grand-mère déportée par Staline, ni de réflexions métaphysiques sur notre société de consommation. Juste trois minutes pour nous faire oublier la morosité ambiante. Sur ce plan-là, c’est réussi. Sur le plan « concours » (comme dans « Concours Eurovision de la Chanson »), c’est grillé selon moi. Rien de personnel : la concurrence est meilleure, voilà tout.

Monténégro – Slavko Kalezic – Space – Première demi-finale

Cette tresse est freudienne, je m’en rends soudain compte. Elle agit comme substitut phallique. Du coup, Slavko peut se tripoter tranquillement sur scène, la saisir à pleine main, la faire tournoyer et nous éblouir par sa longueur et sa flexibilité. Le tout en bottes de cuir et en kimono. Je sens que le journal Le Soir a trouvé sa vedette pour 2017. L’an dernier, c’était Ivan, à cause de l’avatar nu et des loups en hologramme. Cette fois, ce sera Slavko, sa verge capillaire et son exhibitionnisme exacerbé. Voyons le côté positif des choses : cela libèrera une place en finale pour un candidat plus sobre et plus mesuré.

Pologne – Kasia Mos – Flashlight – Première demi-finale

Quoi ? Comment ? Pas de robe transparente ? Serait-ce une ruse vestimentaire à trois semaines du Concours ? Vous me direz : avec de si belles jambes… Bref, sur un plan musical et vocal, Kasia survole ses trois minutes. Tamara, Lindita et elle se retrouvent sur le même créneau, dans la même demi-finale : ce sera le choc des divas. Je donnerais l’avantage à Kasia, sa ballade étant plus moderne et plus surprenante que les deux autres.

République Tchèque – Martina Barta – My Turn – Première demi-finale

Depuis son retour en 2015, la République Tchèque nous a offert chaque année des artistes crédibles et de solides chansons. Martina et My Turn le sont tous les deux, crédibles et solides. Mais il leur manque le côté « Eurovision » : c’est-à-dire marquer en trois minutes l’imaginaire collectif de 200 millions de personnes et devenir à jamais une icône de la culture populaire. À méditer du côté de Prague pour l’an prochain…

Roumanie – Ilinca & Alex Florea – Yodel It! – Deuxième demi-finale

Ça, eux, ils l’ont bien saisi le côté « Eurovision » ! Je vous remercie en tout cas de m’avoir procuré cette grande joie : leur élimination dans notre sondage maison. Pour le reste, Ilinca et Alex m’auront permis de progresser sur la voie de la sagesse et de la maturité. Oui, grâce à leur chanson urticante, je suis devenu plus philosophe. Il y a cinq ans de cela, j’en aurais fait une crise existentielle, avec hurlements, arrachage de cheveux et démolition de canapé. Aujourd’hui, je reste calme, serein, je prends mes distances. Je suis déjà prêt pour leur qualification et leur troisième place au télévote de la finale. J’attends cela avec calme et résignation. Zen attitude.

Saint-Marin – Valentina Monetta & Jimmie Wilson – Spirit Of The Night – Deuxième demi-finale

Ils sont bons, très bons même… et c’est ça le plus terrible dans ces trois minutes saint-marinaises ! Deux interprètes de talent, empêtrés dans une chanson démodée et anecdotique. Notez qu’en affinant mon analyse, ce ne sont pas tant les paroles qui sont à blâmer. Plutôt les arrangements musicaux. S’ils avaient été du niveau de City Lights ou de Dance Alone, Saint-Marin aurait brillé. Soit. Il ne reste plus à Valentina Monetta qu’à revenir l’an prochain. Elle deviendra alors une légende…

Serbie – Tijana Bogicevic – In Too Deep – Deuxième demi-finale

Ici, justement, les arrangements musicaux sont contemporains. Tijana porte à merveille sa chanson. Tous les ingrédients sont réunis pour pilonner le tableau de vote. Mais il manque un condiment quelconque pour relever cette préparation serbe. Un peu de poivre, un peu de sel, quoi. L’ensemble demeure fade. Reste la présentation visuelle. Elle pourrait compenser en partie l’absence de piment.

Suède – Robin Bengtsson – I Can’t Go On – Première demi-finale

Au fond, c’est la recette de ICGO : relever une suédoiserie en conserve par le biais d’un visuel fort, marquant, ingénieux, encore inédit sur la scène du Concours. Robin nous offre ici une nouvelle prestation irréprochable. Mais sans danseurs, ni tapis roulants, ni gros plans sur ses yeux bleus, l’ensemble manque de relief, de goût, de saveur. Ceci dit, le 9 mai venu, tous les ingrédients assemblés, le plat final devrait s’envoler vers la finale et le 13 mai, rafler des millions de votes. C’est décidément dans les vieilles marmites suédoises que l’on fait les meilleures soupes eurovisionesques…

Suisse – Timebelle – Apollo – Deuxième demi-finale

À propos de soupes suédoises… Vous noterez la relativité spatio-temporelle de la suédoiserie : choisie par l’Azerbaïdjan, c’est une plaie ; choisie par la Suisse, c’est une bénédiction. Il est vrai que la télévision suisse revient du néant. Tout était préférable au désastre de l’an dernier. Alors, Miruna et son Apollo, c’est Mozart en comparaison à Rykka. L’objectif est modeste, mais important : se qualifier. Le reste me semble détail. Ces trois minutes de La Riviera démontrent que Timebelle le peut.

Conclusion

C’est sur cet épisode madrilène que se concluent les concerts intermédiaires. Mon podium final ne devrait pas vous surprendre. Pour cette PreParty, j’attribuerai ma médaille d’or à Alma, toujours aussi parfaite. Médaille d’argent pour Kristian Kostov, le prodige de cette édition 2017. Et médaille de bronze pour Nathan Trent, notre très sympathique Autrichien.

Sur ce, je vous laisse en compagnie de Barei, Ruth et Suzy et vous souhaite un excellent weekend. Profitez-en bien et surtout, répondez à notre petit sondage ci-dessous. À très bientôt !

Sondage

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