eurovision-1956Mon cœur se déchire à l’entame de cette chronique et je la rédige à travers un rideau de larmes. Le calendrier, impitoyable, me l’a rappelé : août se termine, septembre s’annonce ! Voici donc venus la rentrée, la fin de vacances, le rideau qui retombe sur l’été, le farniente, l’insouciance, la douceur de vivre. Et sonne de concert, le retour au bureau, au travail, aux obligations de toutes sortes. Surtout, pour moi, cela signifie la fin de ma chronique hebdomadaire. Je vais devoir vous lâcher la main, vous laisser avancer seuls dans les brouillards musicaux qui vous entourent et dans lesquels vous devrez progresser dix mois durant, privés de mes lumières et de mes judicieux conseils. J’en tremble déjà à l’idée : que ferez-vous sans moi, mes petits tournesols dont j’étais le soleil ? Soyez prudents et rassurés d’autre part : je ne serais jamais loin et à la première nécessité, je redescendrais de mon empyrée, afin de  vous indiquer la juste direction musicale.

mireille-sourireVous me connaissez à présent : vous savez que je suis une personne éminemment positive et constructive. Je suis entièrement dirigée vers l’avenir, ses promesses, ses possibilités infinies, ses mois de mai, ses éditions annuelles du Concours Eurovision et les nouvelles victoires de la France, si attendues, si désirées, si proches. L’idéal serait d’en décrocher deux autres dans la décennie à venir. Une première pour moucher la Suède, une seconde pour égaler l’Irlande. Nous aurons alors regagné notre place naturelle : celle de première nation de l’Eurovision. Nous la méritons, mille fois plus que ces machins qui chantent en anglais ou ces bidules interchangeables qui retombent le lendemain dans l’oubli. Alors que nous, nos artistes, nos interprètes, nos représentants brillent de mille feux et pour longtemps au firmament des cieux musicaux. Nous l’avons dit et redit, de Mathé Altéry à Lisa Angell, la France a marqué l’Histoire du Concours et de la Musique.

Mais je demeure confiante. La merveilleuse Madame André, Madame Martineau et moi-même allons jouer les drôles de dames de France Télévisions et dénicher la perle rare, qui nous couronnera des lauriers de la victoire, à Stockholm, le 14 mai prochain. Il serait d’ailleurs plus que temps que Madame André m’appelle, afin que nous nous coordonnions. Le temps presse ! Je suis d’avis, quant à moi, qu’il faut partir tôt pour arriver vainqueur sur la ligne d’arrivée. Choisissons notre représentant rapidement, coachons-le afin qu’il s’élève à un niveau inégalé, qu’il peaufine quelques chansons, que nous les testions en ligne et en direct et qu’on lui choisisse la meilleure possible pour décembre. À partir de là, nous travaillerons en profondeur sur la présentation, la chorégraphie, le visuel, de sorte à être fin prêts pour mars. Alors, nous nous présenterons à la presse internationale, irons à l’Eurovision En Concert, à la Fête Londonienne et ferons d’autres évènements promotionnels. Les répétitions arrivées, nous cisèlerons nos trois minutes jusqu’à la perfection et le soir de la finale, crac dedans ! La victoire nous tombera dans la gueule comme une alouette rôtie !

En attendant ce moment magique, rendons hommage à celle qui, je le sens, nous conduira à cette apothéose, l’immense, la sublime, l’unique, l’inénarrable, l’inamovible reine de la grande chanson française : Mademoiselle Mireille Mathieu. Cinquante ans de carrière, des millions de disques vendus partout à travers le monde, des succès comme s’il en pleuvait, des morceaux gravés à jamais dans la mémoire collective de l’Humanité, un visage reconnu partout du Canada à la Russie, une voix céleste demeurée intacte, une aura, un charisme, une présence sur scène, une allure inimitable… Mireille a dépassé les cadres normatifs habituels pour atteindre le mythe, la légende ! Et quelle plus ambassadrice pour notre beau pays que celle qui servit de modèle à Marianne ? C’était… en 1978 justement ! L’année où le Concours était organisé à Paris ! Si ce n’est pas un signe… Aujourd’hui donc, Mireille, sa vie, son œuvre, sa gloire, le tout en trente-cinq chansons.

Naissance et jeunesse

mireille-mathieu-1Mireille naît à Avignon, le 22 juillet 1946. Elle est l’aînée d’une famille de quatorze enfants et est initiée dès son plus jeune âge à la chanson, par son père, amateur d’opéra et chanteur à ses heures perdues.

1962 est une année-clé pour Mireille : elle décide de devenir chanteuse professionnelle. Elle se présente à un concours de chant organisé par la mairie d’Avignon. Elle termine deuxième, derrière Michèle Torr, se représente en 1964 et le remporte avec une reprise de La Vie En Rose.

Débuts et succès

Mireille chante dans de nombreux galas et le 21 novembre 1965, fait sa première apparition à la télévision. Elle passe au Jeu de la Chance et décroche dans la foulée, son premier contrat. Elle chante pour la première fois à l’Olympia, en première partie, puis en vedette.

En 1966, Mireille décroche son premier succès commercial : Mon Credo, qui se vendra à plus d’un million d’exemplaires. Elle enchaîne avec Qu’Elle Est Belle et Paris En Colère, inclue sur la bande originale du film de René Clément, Paris Brûle-T-Il ?



Concours Eurovision de la Chanson

Toujours en 1966, Mireille se retrouve parmi les artistes présélectionnés par l’ORTF pour la représenter à Luxembourg, au onzième Concours Eurovision de la Chanson. Elle voisine avec Michèle Torr, Anne Sylvestre et Odile Vasselin. C’est finalement Dominique Walter qui sera retenu, avec Chez Nous. Il terminera hélas avant-dernier avec à peine un point. La chanson de Mireille, C’Est Ton Nom, sera elle intégrée sur son premier album, En Direct De L’Olympia, sorti lui aussi en 1966.

Les années soixante

Le succès s’accroît pour Mireille dans les années suivantes, jusqu’à l’amener sous les feux des projecteurs internationaux. Elle chante La Dernière Valse, adaptation française de The Last Waltz d’Engelbert Humperdinck, et entame des tournées au Royaume-Uni, au Canada et aux États-Unis.

Ses succès en français se poursuivent : J’Ai Gardé L’Accent, Les Bicyclettes de Belsize, C’Est À Mayerling,…



En 1969, Mireille entame une fructueuse carrière en Allemagne, qui perdura à travers les décennies. Elle enchaîne ainsi les succès en allemand : Hinter den Kulissen von Paris, An einem Sonntag in Avignon, Es geht mir gut Chéri, Der pariser Tango,…




Les années soixante-dix

La réussite de Mireille se poursuit durant toute la décennie suivante. Elle enregistre certains de ses morceaux les plus emblématiques : Acropolis Adieu en 1971, La Paloma Adieu en 1973, On Ne Vit Pas Sans Se Dire Adieu en 1975, Milles Colombes en 1977, Santa Maria De La Mer en 1978,…





Parallèlement, Mireille est appelée par deux cinéastes, afin de chanter dans leurs films. En 1973, elle interprète ainsi Mon Paris dans L’Évènement Le Plus Important Depuis Que L’Homme A Marché Sur La Lune de Jacques Demy et La Bonne Année dans La Bonne Année de Claude Lelouch.

Les années quatre-vingt

Mireille poursuit sur sa lancée et transforme en or tout ce qu’elle chante : Je Veux L’Aimer en 1983, Made In France en 1985, L’Enfant Que Je N’Ai Jamais Eu en 1988,…


Mireille élargit son spectre musical en adaptant des chansons anglaises à succès. Elle reprend ainsi Barbra Streisand (Une Femme Amoureuse, en 1980) et ABBA (Bravo, Tu As Gagné, en 1981).


Elle chante aussi en duo : avec Charles Aznavour en 1981, sur Une Vie D’Amour, et surtout avec Patrick Duffy en 1983, sur Together We Are Strong, son plus grand succès anglophone, qui a été composé par nul autre que Ralph Siegel.


Elle s’attaque enfin à l’opéra et joute vocalement en compagnie de Peter Hofmann sur Scaborough Fair et de Placido Domingo sur Tous Mes Rêves en 1982.


Les années quatre-vingt se concluent au sommet : Mireille effectue deux tournées triomphales en Chine et en Union Soviétique ; elle publie sa première autobiographie, Oui Je Crois ; elle chante La Liberté Sur L’Atlantique pour le centenaire de la Statue de la Liberté et La Marseillaise pour le bicentenaire de la Révolution.


Les années quatre-vingt-dix

En 1993, Mireille remporte un autre triomphe avec son album-hommage à Édith Piaf, la chanteuse qu’elle admire le plus.

Elle espace ensuite ses tournées et ses enregistrements, publiant un autre album en 1995, le dernier pour cette décennie.

Les années deux mille

Mireille revient à la chanson en 2002, avec la publication d’un nouvel album, le trente-septième de sa carrière. Elle reprend une tournée dans les pays francophones, puis sort son album sans nom, en 2005.


Mireille devient politique: elle reprend Mille Colombes, place de la Concorde, le 8 mai 2007, pour l’élection du président Sarkozy. En 2011, celui-ci la promeut au rang d’officier de la Légion d’Honneur.


Mireille se produit avec succès en Allemagne et en Russie. Elle publie deux nouveaux albums en allemand, en 2007 et en 2009. Sur ce dernier, elle compose pour la toute première fois de sa carrière, deux morceaux : C’Est L’Amour et Immer Wieder.


Les années deux mille dix

Mireille continue ses tournées et ses concerts, en France et en Russie. En 2014, elle fête son jubilé d’or, ses cinquante ans de carrière. France 2 lui consacre une émission spéciale, durant laquelle Mireille interprète ses plus grands succès et d’autres artistes lui rendent hommage.





Bonus

Ne pleurez pas, mes tournesols : il ne s’agit que d’un au revoir ! Nous nous reverrons fort bientôt. En attendant, soyez bien sages et surtout, soignez votre orthographe. Je trouve cela navrant que de braves jeunes gens comme vous confondiez encore « ce » et « se ». Tss, tss, pensez à la pureté de notre belle langue française, la plus belle de toutes… Et rappelez-vous votre devoir d’exemplarité envers nos amis francophones de par le monde, spécialement nos amis belges qui écrivent « septante » pour « soixante-dix » et confondent « dîner » et « déjeuner ». Les pauvrets… Là-dessus, je vous transmets les meilleures salutations de Madame Martineau. Elle aussi éprouve quelque tristesse à vous quitter en cette fin d’été. En guise de consolation, elle vous transmet six nouveaux interprètes dont elle estime qu’ils pourraient nous représenter dignement à Stockholm. Vous savez ce que j’en pense…






Je vous embrasse et conclut par ce cri du cœur : Vive l’Eurovision ! Vive la République ! Vive la France !

Bien à vous,

Francine MICHU

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