La semaine dernière, la VRT a donc présenté au monde la représentant belge pour Lisbonne, Laura Groeseneken. Vous avez déjà apprécié l’étendue de ses talents vocaux et découvert son univers musical, caractéristique de la production musicale belge contemporaine. Passons à présent en revue, les réactions et commentaires consécutifs à cette annonce.

Commençons par la principale intéressée, Laura elle-même. Lors d’une rencontre avec la presse, elle a révélé ne pas avoir hésité longtemps avant d’accepter la proposition de la VRT. C’est pour elle une chance énorme et elle est très enthousiaste à la perspective. Elle se dit impatiente de trouver sa chanson et de créer son visuel.

Justement, concernant sa chanson, Laura est ouverte à toute idée et proposition. Ce pourrait être une ballade ou une chanson dansante, mais cela devra être une vraie chanson pop. Elle l’a réaffirmé cependant : elle ne dansera pas sur scène, car cela n’est pas son fort. La chanteuse co-écrira très certainement sa chanson, mais ce sera la VRT qui choisira son producteur. L’important pour elle est que la chanson soit authentique, qu’elle reflète sa personnalité et qu’elle contienne une certaine dose de drame. Elle chantera par ailleurs en anglais. Sa voix, estime-t-elle, rend mal en néerlandais.

Au passage, Laura a révélé suivre le Concours depuis de nombreuses années, c’est même une tradition dans sa famille. Sa chanson préférée est le 1944 de Jamala. Elle a cependant souligné que si la chanson est importante, mais que le visuel et le décor le sont tout autant. Elle y travaillera activement, s’appuyant sur son expérience professionnelle de visual merchandiser. Pour rappel, Laura est responsable de la mise en valeur esthétique des meubles et accessoires dans un magasin IKEA.

La chanteuse admet que la pression sur ses épaules sera forte, surtout après trois années aussi glorieuses pour la Belgique. Mais Selon elle, il s’agit là d’une pression positive. Pour l’heure, elle ne donnera plus d’interview et se concentrera uniquement sur la préparation de ses trois minutes lisboètes.

Son partenaire de scène, Ozark Henry, s’est dit fier d’elle et fier qu’elle représente la Belgique à l’Eurovision. Selon lui, elle possède tous les atouts nécessaires, à commencer par sa voix. Le chanteur souligne par ailleurs l’intégrité artistique de Laura, sa personnalité unique et son désir constant d’apprendre et de s’améliorer. Tous deux collaborent depuis quatre ans et Ozark Henry a assisté à son épanouissement personnel et artistique. Selon lui, elle est une battante et une future figure majeure de la scène musicale belge. Laura et Ozark Henry ont déjà composé plusieurs morceaux ensemble pour le chanteur et récemment, pour la chanteuse. Il est donc possible que la chanson participante soit co-écrite par eux. Ozark Henry s’est dit tout à fait partant pour l’aider.

De son côté, Peter Van de Veire, le commentateur flamand du Concours, a déclaré avoir toute confiance en Laura. Il est convaincu qu’elle brillera sur la scène lisboète et qu’elle mènera la Belgique jusqu’en finale. Pour lui, la chanteuse dispose de tout le talent nécessaire. Optimiste, il espère même plus, « beaucoup plus », pour reprendre ses mots.

La télévision publique flamande, quant à elle, par la voix de son responsable Internet, M. Olivier Goris, est tout aussi optimiste. Tous suivaient Laura depuis plusieurs années et ont été très heureux qu’elle accepte leur proposition. Selon eux, sa voix est son principal atout : unique, chaude, captivante et puissante. À présent, la chanteuse et la cellule musicale de la VRT vont œuvrer ensemble, à la recherche du meilleur morceau possible et de la présentation visuelle la plus marquante.

La presse belge néerlandophone a bien entendu répercuté l’annonce. Les quotidiens ont présenté l’artiste, sa carrière, son univers musical et ont cité ses premières déclarations publiques. Tous insistent sur son parcours artistique et son expérience en la matière, les voyant comme de bons présages. Mais tous soulignent sa délicate mission : succéder à trois artistes ayant atteint les dix premiers en finale. Tous demeurent dans l’attente de la chanson, clé de voûte.

De Morgen se montre plus critique et souligne que la VRT a choisi une inconnue sans chanson. Le journal a interrogé plusieurs personnalités impliquées dans le Concours pour tirer cela au clair. Marcel Vanthilt, ancien juré de l’Eurosong, rappelle que la chanson est essentielle, mais qu’elle ne doit pas être connue d’emblée. L’important est que l’artiste se choisisse un morceau à fort potentiel. Comme le pointe Vanthilt, une chanson pour l’Eurovision est le gage d’importantes répercussions, diffusions et droits d’auteur. Laura devrait donc recevoir bon nombre de propositions. Le journal reconnaît au final que la voix de la chanteuse est son atout majeur. Il lui conseille de ne garder que son prénom, pour plus d’impact international, et surtout de se trouver une chanson marquante et forte. La comparaison leur tombe sous le sens : un morceau à la Amar pelos dois.

Par ailleurs, la presse belge francophone a, elle-aussi, réagi à l’annonce. Ce qui est exceptionnel et témoigne d’une évolution positive de l’image du Concours, ainsi que d’une meilleure communication de la VRT en direction du public francophone. La plupart des journaux et sites d’information ont relayé l’information sans commentaire particulier. Ils soulignent que Laura est peu connue du grand public, mais qu’elle a une solide expérience dans le domaine musical. Tous attendent à présent, la présentation de sa chanson.

Plus remarquable encore : le principal quotidien belge francophone, Le Soir, qui a toujours traité l’Eurovision avec une hauteur confinant au mépris, s’est fendu d’un long article sur le sujet. Vous dire d’où l’on vient : il leur est arrivé d’écrire des tartines sur Loïc Nottet sans mentionner une seule fois son passage à Vienne ou de ranger les annonces relatives au Concours sous le titre « chansonnette » (sic). Bref, le journaliste du Soir analyse fort justement le contexte et souligne que la VRT s’est inspiré de la RTBF. Il estime que Laura optera pour l’émotion et la retenue, se plaçant dans la droite ligne de Salvador.

De votre côté, vous avez pu lire les réactions des fans du Concours, sur les sites spécialisés et les réseaux sociaux. Les commentaires sont globalement positifs. Chacun a pu apprécier le talent de Laura, ainsi que ses capacités remarquables à chanter en direct. Tous réservent cependant leur jugement final, faute de chanson, mais l’espoir est là. Certains esprits chagrins et butés regrettent que la VRT n’ait pas sélectionné Stromae. Qu’ils reviennent à la raison : la participation du chanteur au Concours demeure hautement improbable.

Mon petit avis personnel

Je rejoins la majorité d’entre vous : Laura a du potentiel. J’aime particulièrement son quadruple statut d’auteur-compositeur-interprète-musicienne. Voilà qui assure sa crédibilité. Son expérience lui servira à construire un numéro solide et à affronter l’inévitable pression médiatique et compétitive. Tout comme vous, je ne me prononcerai définitivement qu’une fois la chanson révélée. Dans l’attente, j’accorde à Laura toute ma confiance.

Soulignons encore une fois la situation particulière de la VRT. Cette année, elle n’a pas le droit à l’erreur. Les médias flamands lui ont clairement signifié qu’une élimination en demi-finale, n’était pas envisageable, après les brillants résultats de la RTBF en 2015 et 2017. Selon eux, si la télévision francophone en est capable, la télévision néerlandophone doit l’être aussi. Donc, attendez-vous à ce que la VRT investisse beaucoup d’énergie dans sa représentante. Ce qui sera une excellente chose pour elle, pour eux, pour nous, pour la Belgique, pour le Concours et pour la musique en général.

Tout est-il au mieux dans le meilleur des mondes ? Presque. Je concluerai sur une déclaration de Peter Van de Veire, reprise par tous les médias et qui m’aura fâché : « Maintenant que l’Eurovision est réellement un concours de chansons… » Ce qui sous-entend qu’il ne l’était pas auparavant… Je vous laisse quelques instants, pour repasser dans vos esprits tous les clichés éculés sur le Concours, contenus dans ces quelques mots… Bref, espérons que notre ami Peter profitera des prochains mois pour réviser son histoire du Concours. De votre côté, vous avez un quart d’heure pour repérer, dans la compilation ci-dessous, toutes les non chansons… Bon week-end !